FBI
Département de la Justice. C’est le grand rival de Hoover. Anslinger envoie ses agents enquêter à Cuba. Ceux-ci découvrent que Lucky Luciano s’y trouve encore et a l’intention d’y résider en permanence.
Harry Anslinger ne peut accepter la présence de Lucky Luciano à une petite centaine de kilomètres seulement des États-Unis. Début février, le patron du FBN écrit aux autorités cubaines pour exiger que Luciano soit renvoyé en Italie. Pas de réponse. Il se rend auprès du président Harry Truman pour lui demander de faire pression sur La Havane. L’affaire menace de dégénérer en incident diplomatique quand Anslinger annonce un embargo des médicaments à destination de Cuba tant que Luciano n’en sera pas parti. En dépit des pressions de Meyer Lansky et de Fulgencio Batista, Luciano refuse de quitter l’île. Pis, le parrain des parrains planifie la riposte : si les Américains ne livrent plus de médicaments, les Cubains feront de même avec le sucre.
Cette fois, Lucky Luciano est allé trop loin. Il est arrêté fin février et expulsé vers l’Italie, où il finira ses jours.
Dans les journaux américains, il n’y en a plus que pour le FBN. Dès lors, J. Edgar Hoover déclare à qui veut l’entendre que la Mafia n’existe pas au niveau national, qu’elle ne constitue pas une menace pour l’État fédéral, et que le FBI n’a pas compétence pour s’en occuper. Déclarations pour le moins inopportunes, surtout si l’on tient compte de certaines de ses fréquentations…
Les liaisons dangereuses de J. Edgar
Vers la fin des années 1930, au sortir de sa guerre contre les gangsters, J. Edgar Hoover s’est en effet mis à fréquenter avec assiduité, on l’a vu, une des plus célèbres boîtes de nuit new-yorkaises, le Storke Club. Il n’hésite pas à s’afficher ouvertement avec le patron de la boîte, Sherman Billingsley, lui témoignant des signes d’amitié ostentatoires en dépit de son passé de bootlegger qui lui a valu de purger une peine de prison à Leavenworth. Dans cet établissement, la table de J. Edgar Hoover et de Clyde Tolson voisinait avec celles de certains des parrains les plus en vue de la mafia new-yorkaise, dont Frank Costello.
Hoover et Costello : l’un incarne le Bien, l’autre le Mal. Difficile de délimiter la zone grise de leurs rencontres. On sait qu’ils se méfient l’un de l’autre, mais certains responsables du Bureau pensent que Frank Costello a été l’un des informateurs de J. Edgar Hoover. Ce qui n’empêchait pas le parrain de traiter en public le directeur du FBI de maître-chanteur. Il est peu probable que Hoover ait éprouvé tant soit peu d’affection pour un homme qui régnait sur la pègre du pays. Pourtant, depuis la fin des années 1930, les rumeurs vont bon train sur les rencontres entre les deux hommes. Les plus folles parlent de conversations sur un banc de Central Park. Il est aussi question de discussions dans une des suites du plus prestigieux des palaces new-yorkais, le Waldorf Astoria. La ville bruit d’anecdotes savoureuses : un témoin affirme avoir vu les deux hommes en train de se faire raser dans la boutique du barbier du Waldorf. Costello aurait entamé la conversation, avant de battre en retraite quand Hoover lui aurait dit : « Restez dans votre bailliage, et je resterai dans le mien ! » On peut préférer une autre anecdote tout aussi apocryphe, colportée par un chroniqueur mondain : Costello aurait décliné la proposition de Hoover de venir prendre un café avec lui au tea-room du Waldorf en disant : « Il faut que je fasse attention à mes associés, ils pourraient m’accuser de m’acoquiner avec des gens douteux… »
Les deux hommes ont au moins deux amis en commun : Joseph Kennedy, avec qui Costello est en affaires depuis l’âge d’or de la prohibition, et Walter Winchell, célèbre journaliste new-yorkais. C’est Winchell qui a présenté Hoover à Costello peu avant l’arrestation de Louis Lepke Buchalter, le chef de Murder Inc. Costello, Winchell et Hoover partageaient une même passion : les courses de chevaux.
Souvent, J. Edgar Hoover et le fidèle Clyde Tolson prenaient leur après-midi en disant qu’ils allaient travailler sur des dossiers. Au Bureau, personne n’était dupe ; tout le monde savait que la voiture blindée noire qui quittait le Département de la Justice avec les deux hommes à son bord prenait la direction de l’hippodrome de
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