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Fiora et le Magnifique

Fiora et le Magnifique

Titel: Fiora et le Magnifique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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mince silhouette
blanche qui se tenait devant lui droite et digne, sans peur apparente mais sans
forfanterie. Les flammes du chandelier ciselaient les traits du délicat visage
et mettaient des reflets dorés dans les grands yeux gris sous la blancheur du
voile d’où glissait, sur une épaule, l’épaisse natte de cheveux brillants. Fray
Ignacio mordilla ses lèvres minces qu’il humecta ensuite du bout de sa langue.
Puis, quittant avec un soupir sa pose détendue, il vint s’accouder à la table :
    – Tu
prétends t’appeler Fiora Beltrami ? demanda-t-il après avoir jeté un coup
d’œil à quelques papiers posés devant lui.
    – Je
ne me suis jamais appelée autrement. La révérende mère ici présente peut l’attester ;
elle me connaît depuis longtemps.
    – Il
semblerait que la révérende mère ait été abusée par toi comme tous ceux de
cette ville et que tu n’aies aucun droit à ce nom.
    – J’ai
le droit que m’a accordé la Seigneurie en contresignant l’acte d’adoption que
lui avait remis mon père.
    – Mais
cet acte d’adoption était un faux puisque ton... père a sciemment trompé la
Seigneurie. En réalité, tu es la fille de deux misérables que la justice de
Dieu a dû plonger au fond des Enfers.
    – Dieu
seul peut dire ce qu’est sa justice et je crois, moi, avant tout, à sa
miséricorde.
    La
voix de Fiora demeurait ferme comme son attitude. Relevant tout à fait ses
paupières fripées, fray Ignacio la fixa comme si, par l’intensité même de son
regard, il eût voulu la réduire à la soumission. Fiora rencontra ces yeux sans
couleur définie et ne baissa pas les siens. Une légère rougeur colora les joues
maigres du moine espagnol.
    – Attitude
commode ! Est-ce parce que tu crains cette justice ? Pourtant, tu as
accepté bien facilement de te soumettre à la sentence de l’ordalie ? Il
est vrai que tu y as été un peu obligée... Ce n’est pas toi qui as accepté la
première mais celle que tu as accusée. Si elle est innocente, ainsi que tout
porte à le croire, tu vas mourir. Ne crains-tu pas la mort ?
    – Je
mentirais si je disais que je ne la crains pas. J’ai dix-sept ans, révérend
père... Mais si j’ai raison, je ne mourrai pas. Hieronyma, par contre, mourra
et c’est à elle qu’il faudrait demander pourquoi elle a accepté si
facilement...
    – Mais
justement, parce que sa conscience est aussi pure que son âme, s’écria la mère
Maddalena, et parce que sa foi en Dieu est totale. Je ne suis pas certaine que
l’on puisse en dire autant de toi !
    Levant
la main dans un geste apaisant, fray Ignacio mit fin à l’intervention de la
prieure.
    – Nous
verrons cela plus tard. Qui est ton confesseur ?
    Fiora
hésita. Elle se confessait assez rarement, tantôt au curé de Santa Trinita
tantôt au desservant d’Orsanmichele sans qu’il soit possible de dire lequel
avait sa préférence. C’était une question d’heure et d’humeur car n’ayant
jamais commis de grave péché, il lui semblait sans intérêt d’aller confier ses
plus intimes pensées à un presque inconnu. Elle avoua franchement cette double
participation à sa vie religieuse et comprit aussitôt qu’elle venait de
scandaliser grandement fray Ignacio en voyant son grand nez se pincer :
    – Quoi ?
Pas de directeur de conscience ?
    – J’ai
toujours eu confiance en la sagesse et la droiture de mon père. C’est lui qui
était mon directeur de conscience...
    – Un
homme qui savait si bien mentir ? Et qui, naturellement, ne te poussait
guère vers l’Église. C’est à elle que tu aurais dû être confiée dès ta
naissance afin que tu puisses expier, dans les rigueurs bienfaisantes d’un
couvent, le crime de ta conception et le lourd péché dont le baptême n’a pu
suffire à te laver...
    – Mon
père ne pensait pas qu’il me fallût payer ainsi pour ce que je n’avais pas
commis. Il voulait que je me croie, toujours, une fille comme les autres. Il me
voulait heureuse...
    – C’est
sans doute pourquoi, coupa mère Maddalena, il t’a fait élever dans les
préceptes impies de ces philosophes antiques dont la pensée infecte cette ville
où l’on consacre à ces écrits profanes, aux arts, aux fêtes et au plaisir ce
qui devrait n’aller qu’à Dieu.
    – Le
souverain pontife sait tout cela, ma chère sœur, et s’en soucie grandement Le
désordre spirituel de Florence l’afflige d’autant plus que l’exemple déplorable
vient d’en

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