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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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es loin de chez
toi et que vingt hommes seront là dans un instant si je siffle d’une certaine
façon !
    Santa
Croce hésita, mais la pointe de l’épée fit perler une goutte de sang sur son
cou :
    – Tu
me tuerais pour une bourgeoise ?
    – Sans
hésiter, parce que le pape me donnerait raison. Il tient à l’estime des
magistrats de cette ville.
    – Ça
va ! Baisse ton épée et rappelle tes chiens ! Je n’ai pas envie qu’ils
dévorent mes amis.
    A vrai
dire, de ceux-ci il ne restait plus que deux, ceux que Zeus et Héra
maintenaient à terre sous la menace de leurs crocs rougis. Les trois autres
avaient choisi une fuite sans gloire pour soigner leurs blessures et éviter des
ennuis plus sérieux. Sur un ordre de leur maître, les deux bêtes revinrent s’asseoir
à ses pieds. Mais l’un des deux hommes ainsi libérés eut un geste de fureur.
Tirant un stylet de sa ceinture, il en frappa Fiora :
    – Tiens,
la belle ! Tu expliqueras à ton notaire de mari où tu as attrapé ça !
    Il s’était
relevé d’un bond et s’enfuyait déjà quand, lancée d’une main sûre par l’Infessura,
une dague l’atteignit entre les épaules. Il s’abattit face contre terre sans un
cri, déjà rejoint par Santa Croce et son dernier compagnon qui se penchèrent un
instant sur lui avant de prendre le large sans plus insister. Mais cela, Fiora
ne le vit pas : le coup reçu joint à la terreur qu’elle venait d’éprouver
avait eu raison de sa résistance. Elle s’était évanouie...
    Quand
elle reprit connaissance, elle était toujours couchée dans l’herbe humide et
son corsage était encore ouvert, mais son sauveur, à genoux près d’elle, s’occupait
à appliquer un tampon de linge sur sa blessure. Il sourit en la voyant ouvrir
les yeux :
    – Tu
as eu de la chance. La lame a glissé contre la clavicule et n’a pas atteint ta
gorge. Néanmoins, cette blessure doit être soignée. Où allais-tu ainsi, seule
et au milieu de la nuit ?
    – A
Florence...
    – A
pied ?
    – Je
me sauvais. Je me suis évadée tout à l’heure du palais Borgia.
    En
quelques mots, elle raconta ce qu’elle avait vécu à cet étrange promeneur de la
nuit, sans rien chercher à dissimuler car il lui inspirait une totale
confiance. Elle avait même l’impression qu’il était le seul homme droit et
honnête de toute la ville.
    – J’aurais
juré que cela se passerait ainsi. Plus encore que ce taureau auquel il aime à
se comparer, Borgia est un bouc puant. Il a couru trop de risques en te faisant
évader de San Sisto pour ne pas réclamer le seul paiement qui l’intéresse. Il
ne se serait pas soucié de toi, même pour plaire au roi de France, si tu avais
été laide. Per Baccho ! je n’ai rien ici pour te faire un pansement et le
sang coulera de nouveau si ce tampon n’est pas maintenu. Penses-tu pouvoir
appuyer ta main dessus quand j’aurai refermé ta robe ?
    – Il
faudra bien... mais que vas-tu faire de moi ? Je... je ne me sens pas très
bien...
    Le
corsage remis en place, elle essaya de se relever, sentit que la tête lui
tournait. Infessura jura entre ses dents :
    – Il
faut pourtant bien que je t’emmène quelque part !
    Tirant
de son pourpoint une fiole enveloppée d’argent, le « scribe républicain »
la déboucha, en appuya le goulot contre les lèvres de Fiora et fit couler dans
sa bouche quelques gouttes d’une liqueur si forte qu’elle eut l’impression d’avaler
de la flamme liquide. La chaleur envahit tout son corps et il lui sembla que
ses forces revenaient.
    – Merci,
soupira-t-elle. Cela va mieux et si tu veux bien m’aider à me relever, je crois
que je pourrai marcher. Pas jusqu’à Florence, bien sûr. Oh, mon Dieu ! J’étais
si heureuse à l’idée d’y retourner, de retrouver bientôt...
    – Plus
tard, les attendrissements ! Il faut te tirer d’affaire. Le plus normal
serait de t’emmener chez moi, mais c’est trop loin. J’habite près de Santa Maria
Maggiore, sur l’Esquilin. Tu ne pourras jamais marcher jusque-là.
    – Que
faire alors ? N’y a-t-il pas ici près un hôpital, un couvent ?
    – Ce
serait te livrer. Non, je sais ce que nous allons faire. Je vais te conduire
chez une amie. Elle saura te soigner et personne ne viendra te chercher dans le
ghetto de Rome.
    – Le
ghetto ?
    Fiora
sentit se raidir le bras qui la soutenait tandis que la voix de son compagnon
redevenait sèche et coupante :
    – Tu
es de ces gens qui

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