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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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visiteurs ayant eu la malchance de se trouver dessous, je n’avais pas réellement apprécié l’ampleur du délabrement dans lequel l’immense édifice se trouvait. Quelle qu’en soit la cause (invasions barbares à répétition, déplacement de l’autorité impériale à Byzance, déclin dramatique de Rome pendant le Grand Schisme), la nécessité d’entretenir une telle structure n’avait visiblement pas traversé l’esprit des successeurs de Pierre, qui l’avaient de toute évidence laissée pourrir. Mais plutôt que de le déplorer en se hasardant à la métaphore évidente que la basilique reflétait l’état de la sainte Église, je me contenterai de dire que l’endroit était un piège mortel.
    Pour ne rien arranger l’emploi des torches était hors de question, car là où le bois ne pourrissait pas, il était très sec. Nous dûmes donc avancer à tâtons en nous aidant des puits de jour qui pénétraient à travers les trous dans le toit. Certains n’étaient guère plus qu’un rai de lumière, quand d’autres étaient aussi larges qu’un prêtre bien en chair. Comme on pouvait s’y attendre, les pigeons avaient fait des lieux leur nichoir. Présentement la plupart étaient en dessous, sur la place, à chercher de la nourriture ; mais les quelques rares qui étaient restés s’envolèrent dans de grands battements d’ailes, en nous laissant le soin d’éviter de notre mieux leurs abondantes fientes.
    La basilique faisait plus de cent mètres en longueur – je le savais car mon père s’était intéressé au bâtiment au point de le mesurer avec un ami mathématicien. Le grenier couvrait quasiment toute cette surface, et nous-mêmes étions arrivés par l’entrée la plus éloignée du maître-autel. Tout en continuant à cheminer laborieusement, j’entendis le chœur commencer ses répétitions en dessous.
    — Assurément, il ne reste plus beaucoup de temps, dis-je.
    La poussière et la saleté me piquaient les yeux. Je les clignai plusieurs fois pour tenter d’y voir plus clair et pendant le plus infime des instants, je distinguai ce qui me parut être un mouvement, vers le fond du grenier. Se pouvait-il que ce soit l’exaucement de mon vœu le plus cher ?
    — Qu’est-ce que c’est que ça ? murmurai-je d’un ton pressant.
    César regarda dans la même direction que moi. L’obscurité était grande. Tout compte fait, cela pouvait fort bien être d’autres pigeons en train de s’envoler, ou bien de la poussière en train de tomber.
    — Des ombres, rien de plus ? répondit-il sans conviction.
    Mon désespoir était tel que je m’accrochai à son hésitation pour me convaincre que quoi que j’aie vu, cela valait au moins la peine d’aller vérifier. Tirant impatiemment sur les jupons qui me ralentissaient, je pressai le pas.
    Et n’avais pas fait cinq mètres que César me tirait d’un geste brusque en arrière. Au même moment, il leva une main et ses hommes s’arrêtèrent net.
    Tout doucement, il dit :
    — Pas un bruit. Tu as raison, il y a quelqu’un là-bas.
    — Où ça ? chuchotai-je en plissant les yeux pour tenter de mieux distinguer.
    — À cinquante mètres devant nous, peut-être moins. Si mes calculs sont bons, cela le placerait directement au-dessus du maître-autel.
    — C’est forcément Morozzi !
    César hocha la tête en silence. Je discernai un sourire sinistre sur ses lèvres.
    — Je m’en charge.
    Je secouai vigoureusement la tête.
    — Dès qu’il te verra, il se saura en danger. Et Dieu seul sait alors comment il réagira. Par contre, il croira n’avoir rien à craindre face à une femme.
    Mon raisonnement était sensé, mais pour être tout à fait franche je dois avouer que j’avais aussi envie d’affronter Morozzi. Appelez cela de l’orgueil, de la vanité ou ce que vous voulez, je ne pouvais me satisfaire de rester cachée derrière César.
    — Je n’ai besoin que d’un instant, le suppliai-je. Je peux le prendre par surprise. Ensuite, tu arrives et tu le maîtrises.
    — Je pourrais aussi bien le maîtriser sans toi, protesta César.
    — Il ne s’agit pas de tes prouesses, ici ! Il a un enfant avec lui, pour l’amour du ciel ! On ne peut pas prendre le risque de voir Nando blessé.
    En partant du principe, bien entendu, qu’il ne l’était pas déjà ; mais je préférais ne pas y penser. Je dus me raisonner pour ne pas me dégager violemment de l’étreinte de César et foncer tête baissée dans le

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