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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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pouvais compter sur lui pour qu’il se montre honnête envers moi.
    Je serrai sa main en remerciement, fis de tendres adieux à Nando par-dessus l’épaule de son père, et me mis en marche pour le palazzo des Borgia. Je me disais qu’il allait falloir déballer les affaires fourrées si précipitamment dans le coffre à l’annonce de la mort de mon père, tout ce que j’avais pu mettre avant que les gardes du Cardinal ne ferment l’appartement. Ils avaient bien fouillé le coffre mais, n’y trouvant que des vêtements, n’avaient vu aucune raison de m’empêcher de le prendre. Pour sûr, s’ils avaient repéré le compartiment dissimulé dans le double fond, ils auraient agi différemment.
    Les cumulonimbus étaient en train de glisser vers l’ouest, et une brise rafraîchissante soufflait du nord. Cette relative fraîcheur rendit mon pas plus léger et contribua peut-être, si on y ajoute mon état général de préoccupation, à mon manque de vigilance. Quelle qu’en fût la cause, je me trouvai prise au dépourvu lorsque, étant presque en vue du palazzo, trois hommes surgirent d’une ruelle.
    Bloquant le passage, ils me toisèrent des pieds à la tête en ricanant.
    — Puttana , lança le plus gros des trois. Qu’est-ce que tu crois être en train de faire, putain ?
    — Laissez-moi tranquille, rétorquai-je brusquement.
    À cet instant-là, je n’avais pas encore pris peur. Ils avaient seulement l’air d’être trois idiots de plus d’humeur à harceler une femme. Mes vêtements indiquaient que je ne faisais pas partie de la noblesse mais que j’étais loin d’être pauvre, une femme jouissant d’une certaine protection. Peut-être auraient-ils l’effronterie de m’agresser verbalement, mais cela s’arrêterait là. Je n’attendis même pas leur réponse, et entrepris de les contourner.
    Je fus arrêtée net lorsque celui qui se trouvait le plus près de moi me saisit le bras.
    — Puttana , répéta-t-il avant de me jeter à terre.
    À ce moment-là, la situation changea du tout au tout pour moi. L’illusion de sécurité créée par le fait de remporter un défi contre Il Cardinale vola en éclats. J’avais pris un risque terrible, j’étais allée jusqu’à tuer un homme – pour en arriver là ? Cela semblait impossible et pourtant c’était bien en train de se produire, là et maintenant. Alors même que dans ma tête une voix hurlait de me remettre debout et de m’enfuir, le choc me paralysait.
    Avant d’avoir le temps de me ressaisir, l’un des hommes me donna un coup de pied dans l’estomac. Je poussai un cri de douleur autant que d’incrédulité, tout en me recroquevillant d’instinct en boule pour me protéger.
    — Qu’est-ce que vous faites ? Arrêtez !
    J’étais au service de l’un des hommes les plus puissants de la chrétienté, protégée par son omnipotence et mon savoir-faire. Ils étaient fous de s’attaquer à moi. Et pourtant, mon père avait joui de la même protection et il était mort, après s’être fait tabasser dans une rue ressemblant fort à celle où je gisais à présent, incapable de me protéger des coups qui pleuvaient telle une averse écarlate.
    — Arrêtez !
    — Un conseil, entre au couvent, puttana , dit l’un des hommes. Il se pencha et remonta d’un coup sec ma jupe pour découvrir mes jambes nues, et plus haut. La peur primale du viol me saisit, et j’arrêtai alors totalement de penser pour devenir un animal acculé, luttant pour s’échapper.
    Le son de leur rire m’enveloppa. Je levai les yeux à ce moment-là et vis le médaillon qui pendait au cou de l’un d’eux. Je m’entendis gémir. C’était la médaille papale, identique à celle que mon père avait reçue l’année précédente des mains du pape Innocent  viii lui-même, un honneur que le Cardinal avait obtenu pour son loyal serviteur. Mon père était fier de la porter, mais on ne l’avait pas retrouvée sur son corps. Sa disparition était restée un mystère… jusqu’à maintenant.
    — Arrête de causer des problèmes, lança une voix différente. (Je reçus un autre coup encore, cette fois la pointe en métal d’une botte contre mes côtes.) Sinon tu finiras comme ton père.
    Je n’arrivais pas à respirer et mon cœur cognait si fort, j’eus l’impression qu’il allait exploser. La douleur me submergea, rivalisant avec cette peur qui me rendait folle. De très loin, me sembla-t-il, j’entendis :
    — On y va doucement avec toi,

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