Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
Vom Netzwerk:
affectation à une mission aussi servile.
    — Le bruit court qu’un incident a eu lieu non loin d’ici, il y a quelques heures. Je me demandais si vous saviez quelque chose à ce propos.
    Tout en parlant ses yeux s’arrêtèrent sur mon visage qui, étant aussi raide et douloureux que le reste de mon corps, devait également être contusionné, songeai-je.
    — Un incident, vraiment ? De quelle sorte ?
    — Ce n’est pas clair, mais une femme a peut-être été accostée.
    Il attendit, me laissant toute latitude pour raconter ce que lui-même avait assurément déjà deviné. Mais j’avais décidé de garder le silence. Au-delà de l’humiliation, je voulais éviter que quiconque, surtout le Cardinal, sache que j’étais au courant pour mon père – qu’il avait été délibérément pris pour cible. Pour improbable qu’elle fût, la possibilité que Borgia ait lui-même été impliqué dans ce meurtre n’en restait pas moins réelle. Et dans tous les cas, on ne pouvait nier qu’il était sans doute à la source des tourments de mon père dans les dernières semaines de son existence.
    — C’est terrible, repris-je. Si seulement il y avait plus d’hommes comme vous, Capitaine, Rome serait une ville plus sûre.
    Vittoro cilla de surprise devant ce compliment. L’homme était bien trop fin pour ne pas comprendre que j’étais en train de détourner la conversation, mais il savait aussi qu’il ne pouvait rien y faire. Tout au moins pour l’instant.
    — Ne faisons pas attendre Il Cardinale, conclus-je en refermant la porte derrière moi.
    Les appartements du Cardinal se situaient au premier étage du palazzo, face au fleuve. On avait visiblement dépensé sans compter pour la décoration et l’ameublement. Les parquets étaient recouverts de luxueux tapis mauresques, les murs ornés de magnifiques tapisseries représentant principalement des scènes de chasse, et les pièces agrémentées ici et là de divans en velours et de tables rehaussées de dorures. Tout ici évoquait la résidence d’un seigneur aussi puissant qu’un prince laïque – si ce n’était davantage.
    Vittoro me laissa dans l’antichambre décorée de peintures murales représentant la chute de l’homme. Ne voulant pas m’asseoir (et me trahir quand il faudrait me lever par quelque cri de douleur), je tentai de me distraire en étudiant ces scènes qui, si elles étaient tirées des Saintes Écritures, n’en étaient pas moins imprégnées d’une sensualité toute terrestre.
    Ève, dans sa glorieuse nudité, semblait avoir bien plus intéressé l’artiste que le malheureux Adam, qui faisait une seule apparition, au moment d’accepter la pomme fatidique. Quant à son écervelée d’épouse, elle était représentée en train de s’ébattre sous une cascade, sur un lit de fleurs sauvages, et en tout autre lieu mettant en valeur ses formes généreuses. Le Serpent faisait une apparition remarquée, principalement parce qu’il lorgnait Ève. Je l’examinai attentivement, cherchant à deviner si les rumeurs selon lesquelles l’animal avait été peint sous les traits d’un certain cardinal rival étaient fondées.
    Je n’avais pas encore tranché lorsque la porte dérobée menant au saint des saints s’ouvrit et qu’un secrétaire me fit signe de le suivre. Borgia était assis derrière un bureau en ronce de bois et marbre incrusté. Il paraissait plus jeune que son âge, et rempli de vitalité malgré la journée déjà fort chargée qu’il venait sans aucun doute de passer.
    En me voyant avancer vers lui sur l’épais tapis, Il Cardinale fronça des sourcils.
    — Que t’est-il arrivé ?
    — J’ai fait une chute, répliquai-je. Ce n’est rien.
    Borgia n’eut pas l’air convaincu, à tel point qu’il désigna un siège en face de son bureau. Une telle faveur était inhabituelle, et seul le dégoût à l’idée de me voir m’écrouler à ses pieds pouvait l’avoir suscitée.
    Juchée au bord du siège, droite comme un piquet, je me lançai :
    — En quoi puis-je vous être utile, signore ?
    — Tu peux commencer par me dire comment les choses allaient dans la maison de ma chère cousine.
    En cela tout au moins je n’étais pas prise au dépourvu : j’avais préparé ma réponse.
    — Madonna Adriana a eu la gentillesse de m’accorder audience. J’ai demandé à être informée de tout changement, qu’il concerne de nouveaux domestiques ou autre, ce qu’elle a accepté. Je l’ai également

Weitere Kostenlose Bücher