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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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de tête.
    — Borgia a laissé des instructions pour que l’on n’emporte l’édit nulle part sans sa permission, mais lorsque le jour se lèvera…
    Il laissa la fin de sa phrase en suspens, mais une lueur d’espoir s’éveilla tout de même en moi. Le Vatican n’a rien à envier aux autres administrations de par le monde. Morozzi aurait beau faire toutes sortes de demandes impérieuses au nom du pape, il y avait tout de même une procédure à respecter. Un responsable devrait être réveillé en pleine nuit, et la situation lui être expliquée. À son tour, cet individu devrait faire prévenir Borgia, qu’il s’agirait ensuite de trouver. J’étais prête à parier qu’il aurait eu l’idée d’aller passer la nuit dans le lit de la belle Giulia. Une fois localisé, il s’agirait pour lui de revêtir une tenue décente : Il Cardinale veillait toujours à être le plus digne possible lorsqu’il se rendait quelque part. Le temps que tout cela se fasse, on l’aurait averti de ma disparition ainsi que de celle de Vittoro. Il en conclurait qu’il se passait quelque chose, et manœuvrerait avec prudence – ce qui signifiait invariablement avec lenteur.
    Cela ne voulait pas dire, en revanche, que nous pouvions nous permettre de faire de même.
    — Sais-tu où l’on a enfermé les garçons ? demandai-je.
    — Dans une chambre à l’autre bout du couloir par rapport aux appartements du pape. Innocent fait le délicat : il n’aime pas les savoir trop près de lui, mais veut quand même les avoir sous la main.
    — À ton avis, un médecin se trouvera-t-il avec eux ? demanda David.
    Vittoro hocha la tête.
    — D’après ce que les gars m’ont dit, c’est l’heure où on les saigne.
    — Pourquoi si tard ? m’enquis-je.
    — Innocent craint la nuit, répliqua Vittoro avec un haussement d’épaules. Il agit comme si c’était le jour.
    Nous ouvrîmes la porte et avançâmes furtivement dans le couloir. David passa en premier, et je le suivis. Vittoro resta en arrière pour jouer le rôle qui lui était dévolu dans le plan que nous venions d’élaborer à la hâte. Ce n’en était pas vraiment un, mais nous avions fait au mieux avec les éléments dont nous disposions.
    Nous n’avions parcouru que quelques mètres lorsque brusquement je m’arrêtai et agrippai la cape de David.
    — Tu as entendu ? murmurai-je.
    Il commença par secouer la tête, mais se mit à écouter et au bout d’un moment, acquiesça sinistrement.
    — Nous sommes proches.
    Nous venions d’entendre un enfant gémir, et la faible plainte me déchira le cœur. Je tentai de m’armer de courage pour la scène que nous allions trouver, mais en vain. Pour une raison qui dépassait l’entendement, j’eus soudain le sentiment d’être emmurée derrière le mur de mon cauchemar, en train de regarder l’horreur par un petit trou.
    Le gémissement se fit plus présent. Ma respiration devenait laborieuse, mais j’emboîtai le pas à David. Au bout du couloir, nous nous immobilisâmes devant une porte fermée : la complainte venait clairement de l’autre côté. Je pris une profonde respiration. David en fit de même et tourna la poignée en douceur.
    La chambre sans fenêtres, éclairée seulement par des lampes logées dans le mur, contenait pour tout mobilier quatre lits étroits, une table et plusieurs tabourets. Les lits étaient occupés par des petits garçons d’environ huit ou neuf ans. Trois d’entre eux étaient recroquevillés sous leurs couvertures, mais à en juger par la raideur de leur corps, ils ne dormaient pas. Le quatrième, maigre et pâle sous sa tignasse brune, était réveillé. Il avait à peu près le même âge que les autres, et des yeux remplis d’horreur. Allongé sur le dos, le garçonnet avait le bras gauche tendu au-dessus d’une jatte dans lequel son sang coulait goutte à goutte d’une profonde incision. D’autres plaies, non encore cicatrisées, étaient pleinement visibles sur toute la longueur de son bras.
    Un médecin en robe de velours pourpre et toque brodée s’affairait auprès de lui. Il ignora les geignements de l’enfant et opéra une pression sur son bras fluet pour que le sang coule plus rapidement. Je détournai le regard, sentant un haut-le-cœur monter. Le dos appuyé contre le mur, je fermai les yeux et luttai pour me calmer. Il n’y avait rien que nous puissions faire pour aider ce garçon, absolument rien. Seule la mort d’Innocent le sauverait, lui et les

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