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Francesca la Trahison des Borgia

Francesca la Trahison des Borgia

Titel: Francesca la Trahison des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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voir Nando si heureux avec Donna Felicia et ses filles… je me rends compte à présent de tout ce qu’une mère aimante aurait pu lui apporter, s’il en avait eu une.
    Je n’avais pas besoin de demander comment le patriarche qui avait perdu son unique héritier envisageait de s’associer au plus talentueux des jeunes maîtres verriers de Rome. Manifestement, la belle Carlotta (je me tourmentais déjà en imaginant sa beauté) aurait un rôle essentiel à jouer dans un tel arrangement.
    — Les femmes ne font pas toutes des bonnes mères.
    Je regrettai ces mots sitôt sortis de ma bouche. Leur goût âcre me piqua la gorge. Je savais par trop que je ne songeais pas à Carlotta en disant cela, mais à moi.
    — Quand bien même…
    Ses yeux s’assombrirent. Il me tendit une main – carrée, étonnamment douce aux extrémités, marquée ici et là des cicatrices de son art. Pendant une seconde, je crus qu’il allait me toucher.
    Nous sommes tous perchés en équilibre sur la roue de la déesse Fortuna, nous accrochant du mieux que l’on peut pour ne pas tomber par inadvertance dans la gueule des Parques, ces déesses infernales qui président aux destinées des hommes. Pourtant, il est possible (si nous l’osons) de lâcher prise, et dans ce moment merveilleux de trouver la force de déployer nos propres ailes.
    Mais je ne le savais pas encore, en ce temps-là.
    Un seul pas vers lui, probablement rien de plus n’aurait été nécessaire. L’eussé-je fait, tout le reste, le cours entier de ma vie à compter de ce moment-là, aurait changé. Du moins c’est ce que je me plais à imaginer.
    Le ciel s’assombrit tout à coup, et je me figeai sur place. Hormis les lents battements de mon cœur qui résonnaient dans mes oreilles, j’aurais tout aussi bien pu être une statue.
    Le regard de Rocco s’attarda sur moi.
    — Quand bien même…, répéta-t-il, avant de laisser retomber sa main.
    Je l’observai s’éloigner de moi, sa silhouette devenant incertaine, tel un reflet dans un bassin où l’on viendrait de lancer une pierre. Il disparut dans la foule. Je n’avais toujours pas bougé.

18
    La journée me parut interminable et je la passai dans un état d’hébétement, mais mon travail ne dut pas tant laisser à désirer que cela car personne ne fit de commentaire sur mon comportement, ou ne me regarda d’un œil désapprobateur – du moins, pour autant que je le sache.
    J’étais seule, Renaldo ne se trouvant pas dans les parages pour une fois, les secrétaires étant débordés comme à l’ordinaire et le reste du personnel de Borgia n’ayant guère envie d’être vu en ma compagnie. Au milieu de tous ces va-et-vient au palais, ma solitude me pesait davantage que d’habitude.
    Dès lors, une fois ma tâche quotidienne terminée, je cherchai à me distraire en attendant que vienne l’heure où je m’étais engagée à retrouver Alfonso. Je songeai bien à aller voir Lucrèce, mais un tel trouble s’empara de moi à l’idée de devoir encore parler longuement de son mariage que je finis par écarter cette pensée, tout en me faisant la promesse de remédier à ma négligence dès que possible.
    C’est ainsi que j’eus l’idée de me pencher sur le mystère des fréquentes disparitions de Borgia, qui avait piqué ma curiosité depuis qu’on me l’avait soumis.
    À cette heure-là (il devait être midi), Sa Sainteté était censée assister à un spectacle donné en l’honneur du malheureux émissaire espagnol par le chœur du Vatican, après quoi les deux hommes se retireraient pour poursuivre les négociations, en espérant que la vaisselle ne se remettrait pas à voler. Les secrétaires de Borgia l’escorteraient de près, comme à leur habitude. Son bureau serait donc vide.
    L’un des avantages à être crainte est que quasiment personne ne songeait jamais à questionner mes allées et venues au palais. Les gardes savaient que j’étais amie avec le capitaine Romano mais quoi qu’il arrive, eu égard à ma noire réputation, ils évitaient à tout prix de me demander des explications. Il en allait de même avec l’armée de clercs qui allaient au trot, les bras chargés de registres, de rapports, de correspondances et que sais-je encore, et sans qui aucune grande institution (encore moins l’Église) ne pourrait fonctionner. Ces ecclésiastiques ne manquèrent pas, en revanche, de détourner le regard en me voyant monter d’un bon pas l’escalier de marbre, suivre le

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