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Francesca la Trahison des Borgia

Francesca la Trahison des Borgia

Titel: Francesca la Trahison des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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passé. Mais j’ai beau avoir de nombreux vices, la lâcheté n’en fait pas partie. Par conséquent, je tins bon et parvins même à esquisser un sourire. M’apercevant, il fronça les sourcils et je sentis que cette réticence n’était pas de mon seul fait.
    — Comment va Nando ? lui demandai-je lorsque nous eûmes échangé des salutations quelque peu guindées. Je présumais que Rocco était venu rendre visite à son fils, et j’avais raison. Pour autant, sa réponse m’interpella.
    — Il est… heureux. (Je voyais qu’il restait sur ses gardes, mais un sourire contrit s’immisça tout de même sur son visage.) Donna Felicia est la bonté même. Elle le dorlote sans vergogne, et ses filles aussi. Je suis sûr qu’il a été davantage choyé, admiré, gâté en quelques jours passés chez eux qu’il ne l’a été depuis qu’on l’a mis dans mes bras. Pour sûr, il n’a jamais reçu autant d’attention.
    Ayant moi-même eu la chance d’avoir un père aimant, je savais pertinemment que Rocco était un parent dévoué : affectueux, patient, sage. Aucun enfant n’en demandait davantage.
    Cependant, lorsque je le lui dis, il se passa une main dans les cheveux et répliqua :
    — Ce n’est pas à moi d’en juger, mais je sais en tout cas ce que je ne suis pas, et ne pourrai jamais être : une mère.
    C’est à ce moment-là que je remarquai que ses yeux, d’ordinaire si francs, se concentraient présentement sur un point au-dessus de mon épaule. Il n’osait pas me regarder dans les yeux.
    — Francesca…
    Le savais-je déjà ? Avais-je confusément deviné, grâce à une sorte de sixième sens, que le sol allait se dérober sous mes pieds et toutes mes illusions s’écrouler ? Je me suis parfois posé la question depuis, mais je n’ai jamais vraiment trouvé de réponse.
    Je me contenterai de dire que j’en restai interloquée lorsque, ayant pris une profonde inspiration pour se donner du courage, Rocco m’annonça :
    — Cela fait quelque temps déjà que je veux t’en parler… c’est-à-dire, je crois que tu as le droit de savoir… il y avait une raison à mon absence l’autre jour, à la villa.
    Cela remontait à trois semaines maintenant, et il s’était passé beaucoup de choses entre-temps. J’avais depuis longtemps cessé de me demander pourquoi il n’était pas venu ; on ne peut pas vraiment dire que je m’étais beaucoup attardée sur la question, même. J’avais une telle confiance en Rocco que pour moi il était évident qu’il avait une raison valable.
    Mais Sofia, elle, s’était interrogée, n’est-ce pas ? Elle avait été moins négligente que moi sur ce point.
    — J’avais l’intention de venir, poursuivit Rocco. (Il devait se passer quelque chose de fascinant du côté des écuries, songeais-je, car il continuait à ne pas me regarder dans les yeux.) J’avais demandé à Donna Maria de surveiller Nando à la boulangerie. Mais à la dernière minute, j’ai eu un visiteur à l’échoppe.
    — Un visiteur ?
    J’entendais ma voix, calme, polie, modérément intéressée, comme de très loin.
    — Le Signore Enrico d’Agnelli. Il est venu en personne… seul. Vraiment, j’allais partir quand il est arrivé.
    Le souvenir de la visite du plus renommé des maîtres verriers de Rome le troublait visiblement. Il rougit.
    — Comme tu le sais peut-être, son fils unique est mort l’an passé. De fièvre, je crois.
    — Ah bon ?
    Pourtant j’en avais entendu parler, bien sûr, comme toute personne dotée d’une paire d’oreilles à Rome. Je ne connaissais pas le jeune d’Agnelli, ni aucun membre de sa famille d’ailleurs. Alors pourquoi sentais-je une telle crainte monter en moi ?
    — D’Agnelli a une fille, qui s’appelle Carlotta. Elle a eu dix-huit ans le mois dernier.
    — Ah bon ? répétai-je comme un perroquet sans pouvoir m’en empêcher. Dix-huit ans était un âge intéressant pour une femme ; un âge où même le plus indulgent des pères se sentirait obligé de se pencher sur une question cruciale : le mariage. Le mien l’avait fait.
    Pour la première fois depuis le début de cette discussion, Rocco me regarda vraiment. Il paraissait déchiré entre deux réalités conflictuelles – et irréconciliables.
    — D’Agnelli s’est mis en tête de me faire travailler avec lui. Je lui ai répondu que j’étais flatté mais que cela ne m’intéressait pas, et c’était la vérité… jusqu’à maintenant. De

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