Furia Azteca
Si j'avais su, jamais je n'aurais pu manger du tapir dans la jungle. Mais vous, vous le saviez. Comment l'avez-vous appris ? "
II ne répondit pas à ma question et poursuivit d'un ton calme : " Personne ne pouvait penser que la femme-tapir aurait été capable de déplacer sa masse boursouflée. Pourtant, elle a réussi à se renverser, face contre terre et, ne pouvant plus respirer, elle est morte par étouffement.
- C'est votre tour de mourir, maintenant, damné oiseau de malheur ! "
Le chagrin, l'horreur et la colère m'avaient mis complètement hors de moi.
" Vous allez retourner à Mictl‚n, d'o˘ vous venez ! " Je me frayai un chemin en bousculant les invités et j'entendis à peine qu'il me disait :
" Le gardien de la ménagerie est s˚r que la femme-tapir n'a pas pu mourir sans que quelqu'un l'aide. Elle était jeune et elle aurait encore pu vivre dans cette cage pendant des années et des années. "
J'allai trouver Gourmand de Sang et j'interrompis impoliment sa conversation avec ses amis : " II me faut une arme et je n'ai pas le temps d'aller en chercher une à l'auberge. Avez-vous votre dague sur vous ? "
II fouilla sous son manteau et me demanda en hoquetant : " Est-ce que c'est vous qui allez découper les cerfs?
- Non. C'est pour tuer quelqu'un.
- Déjà ! " II me tendit une courte lame d'obsidienne et plissa les yeux pour me voir mieux. " Est-ce quelqu'un que je connais ?
- Non, lui répondis-je. C'est seulement un méchant vieillard. Tout noiraud et ridé comme un grain de cacao.
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Ce ne sera pas une bien grande perte. Donnez-moi la dague, dis-je en avançant la main.
- Pas une grande perte ! s'exclama Gourmand de Sang en me retirant son couteau. Vous voulez assassiner le Uey tlatoani de Texcoco ? Mixtli, je crois bien que vous êtes aussi so˚l que les quatre cents lapins de la fable !
- C'est plutôt vous, coupai-je. Cessez de dire des balivernes et donnez-moi votre arme.
- Jamais. J'ai vu arriver cet homme et je l'ai reconnu sous son déguisement. " II rengaina son couteau. " II nous honore de sa présence, même s'il a choisi de se travestir. quels que soient vos griefs, mon garçon, je ne vous laisserai pas...
- Travesti ? Déguisement ? " Gourmand de Sang était très calme et je m'étais calmé moi aussi.
" II n'y a peut-être que nous qui avons souvent fait campagne avec lui qui l'ayons reconnu, remarqua un des invités de Gourmand de Sang. Nezahualpilli aime bien dissimuler son identité et observer ses sujets à leur niveau et non du haut de son trône. Ceux qui le connaissent depuis assez longtemps pour le reconnaître n'y prêtent même pas attention.
- Vous êtes tous complètement so˚ls. Moi aussi je connais Nezahualpilli et je sais, par exemple, qu'il ne lui manque aucune dent.
- Une goutte d'oxitl pour en noircir deux ou trois, hoqueta Gourmand de Sang. Des traits d'oxitl pour simuler des rides sur un visage foncé par du brou de noix. Il a le don de se faire une silhouette contrefaite et ratatinée et des mains noueuses comme celles d'un vieillard.
- En réalité, il n'a pas besoin de se grimer et de se contorsionner. Il lui suffit de se saupoudrer avec la poussière du chemin et on ne le reconnaît plus. " Le soldat hoqueta lui aussi et me suggéra : " Si vous avez vraiment envie d'assassiner un Uey tlatoani, mon jeune hôte, allez trouver Ahuizotl et vous rendrez service à tout le monde. "
Je les quittai, me sentant ridicule et perplexe, en plus du chagrin et de la colère qui s'étaient emparés de moi.
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Je cherchai à retrouver l'homme qui était Nezahualpilli - à moins qu'il ne f˚t un sorcier ou un dieu du mal. Je n'avais plus l'intention de le poignarder, mais de lui extorquer des réponses aux nombreuses questions que je me posais.
Je ne le vis nulle part. Il avait disparu avec mon envie de participer au festin et aux réjouissances. Je me glissai hors de la Maison des Pochteca et retournai à l'hôtellerie o˘ je commençai à mettre dans un petit sac les choses essentielles pour un voyage. Je tombai sur la petite statuette de Xochiquetzal, la déesse de l'amour. Je retirai ma main comme si je m'étais br˚lé. Je ne la mis pas dans mon sac.
" Je vous ai vu partir et je vous ai suivi. " Je vis Coz-catl sur le seuil de ma chambre. " que s'est-il passé ? que faites-vous donc là ?
- Je n'ai pas 'e cour de tout te raconter, mais il paraît que ce n'est un secret pour personne, alors tu en entendras parler bientôt. C'est pour cela que je
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