Furia Azteca
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pierres magiques. A partir d'aujourd'hui, cent vingt-six nobles seulement vont pouvoir acheter un semblable cristal. Ils se livreraient à des surenchères incroyables, mon petit, même si ces objets n'étaient que de la boue compressée. Plus tard, vous irez en chercher d'autres, pour les vendre à d'autres nobles, mais jamais en trop grande quantité. "
Le visage de Cozcatl était tout rayonnant de bonheur et Gourmand de Sang semblait au bord de la p‚moison.
" Je ne vais certainement pas refuser la perspective d'une fortune aussi conséquente.
- Ne vous en faites pas. Vous allez tous les trois commencer à en dépenser rapidement une partie. Vous avez déjà mentionné les taxes à verser au Trésor et à notre dieu Yacatecuhtli. Vous êtes peut-être au courant de nos traditions : quand un pochtecatl rentre avec un beau bénéfice, il doit offrir un banquet à tous les pochteca de la ville. "
Je consultai mes associés du regard et ils me répondirent aussitôt par un signe de tête affirmatif. " Ce sera avec grand plaisir, seigneurs, mais nous n'avons pas l'habitude...
- Je serai heureux de vous venir en aide, dit l'un des pochteca. Disons après-demain soir. Nous mettrons les installations de notre Maison à votre disposkion. Nous nous occuperons de commander la nourriture, la boisson, les musiciens, les danseurs et la compagnie féminine et nous inviterons tous les pochteca agréés qui se trouvent en ville en ce moment. Vous pourrez également faire venir tous les amis que vous voudrez. Et maintenant, ajouta-t-il, sur un ton bourru, c'est à vous de décider si ce banquet sera modeste ou magnifique. "
Je me tournai une nouvelle fois vers mes associés, puis je déclarai avec fougue : " Ce sera notre premier banquet. Je voudrais qu'il soit à l'image de notre réussite. Si vous le permettez, j'aimerais que chaque plat, chaque boisson, chaque divertissement soit de la plus grande qualité, sans tenir compte du prix. Je veux que cette fête reste dans toutes les mémoires. "
Moi, en tout cas, je m'en souviens comme si c'était hier.
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Hôtes et invités, tout le monde s'était fait beau. Maintenant que nous étions des pochteca prospères et à part entière, Cozcatl, Gourmand de Sang et moi, nous étions autorisés à porter des ornements d'or et de pierreries, pour témoigner de notre ascension sociale. Cependant, nous nous étions contentés de quelques colifichets. J'avais uniquement mis l'agrafe de jaspe qui m'avait été offerte par la Dame-de Tolan et une émeraude dans ma narine droite. Par contre, j'avais revêtu un manteau du plus fin coton et très richement brodé et des sandales en peau d'alligator lacées jusqu'au genou et mes cheveux qui avaient considérablement poussé pendant mon voyage, je les avais noués sur la nuque avec un lien de cuir rouge tressé.
Dans la cour de la Maison des Pochteca, trois cerfs embrochés tournaient en grésillant au-dessus d'un gigantesque lit de charbons ardents. Tous les mets étaient aussi copieux que recherchés. Les musiciens commencèrent à
jouer en sourdine pour ne pas gêner les conversations. Un essaim de jolies filles circulait dans la foule et, de temps à autre, l'une d'entre elles se mettait à danser au rythme de la musique. Trois esclaves avaient été
assignés à notre service exclusif et quand ils n'avaient rien d'autre à
faire, ils agitaient au-dessus de nous de grands éventails de plumes. On nous présenta les pochteca qui arrivaient et ils nous racontèrent leurs expéditions et leurs acquisitions les plus remarquables. Gourmand de Sang avait invité quatre ou cinq de ses anciens camarades de l'armée et ils eurent tôt fait d'être joyeusement ivres. Cozcatl et moi, nous ne connaissions personne, mais il arriva un invité inattendu qui se trouva être une vieille connaissance.
J'entendis une voix me dire : " Vous m'étonnerez toujours, la Taupe. " Je me retournai et vis le vieillard édenté au teint cacao qui avait la spécialité d'apparaître aux moments marquants de mon existence. Pour cette occasion, il s'était habillé un peu plus proprement et avait enfilé un manteau sur son pagne.
" Je ne suis plus une taupe ", répliquai-je en souriant et en levant ma topaze pour le regarder ; j'eus alors l'impression que son visage me rappelait quelqu'un.
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II eut une expression sarcastique. " Je vous ai connu rien du tout, étudiant, scribe, courtisan, malfaiteur amnistié, héros de guerre et, pour finir,
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