Furia Azteca
marchand prospère affublé d'un oil d'or.
- C'est sur vos conseils, noble vieillard, que je suis parti. Pour quelle raison ne devra s-je pas jouir tout à mon aise de mon propre banquet donné
en l'honneur de ma réussite personnelle ?
- Personnelle ? reprit-il sur un ton moqueur. C'est comme pour le reste, vous avez tout fait par vous-même et sans l'aide de personne.
- Oh, non, bien s˚r, répondis-je en espérant éluder les implications équivoques de sa remarque. J'ai des associés dans cette affaire.
- Cette affaire ? Croyez-vous qu'elle aurait pu se faire sans ce cadeau inespéré de marchandises et de capitaux que vous avez investi dans votre expédition ?
- Non et j'ai bien l'intention de remercier mon bienfaiteur en lui donnant une part...
- Trop tard, coupa-t-il. Elle est morte.
- Elle ? répétai-je, interdit, car j'avais cru jusqu'à présent qu'il s'agissait de mon ancien protecteur, Neza-hualpilli de Texcoco.
- Votre défunte sour. Ce mystérieux cadeau était un don de Tzitzitlini.
- Voyons, vieillard, ma sour est morte, comme vous venez de le dire, répliquai-je en secouant la tête. Et elle n'a jamais eu de fortune à me léguer.
- Le seigneur Héron Rouge de Xaltoc‚n est mort, lui aussi, pendant votre voyage, poursuivit-il avec entêtement. Il a fait appeler un prêtre de la déesse Tlazolteotl et il lui a fait une confession si extraordinaire qu'elle n'a pu rester secrète. Je suis s˚r que plusieurs de vos distingués invités connaissent cette histoire, mais ils sont trop bien élevés pour vous en parler.
- quelle histoire ? quelle confession ?
- Comment Héron Rouge a caché les atrocités commises par son fils Pactli sur la personne de votre sour.
- Je n'ai jamais été dupe, dis-je en ricanant. Et vous savez mieux que quiconque comment j'ai vengé sa mort.
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- Pactli n'a pas tué Tzitzitlini. "
Sa déclaration m'avait profondément ébranlé et je le regardai sans comprendre.
" Le seigneur Joie l'a torturée et mutilée par le feu, le couteau et divers pr icédés vicieux. Mais, ce n'était pas son tonalli de succo nber à ces traitements et Pactli lui a fait quitter l'île avec la complicité de son père et l'accord tacite de vos parents. Voilà ce que Héron Rouge a confessé
à Mangeuse de Saleté et, quand le prêtre l'a dévoilé publiquement, il y a eu un grand émoi à Xalto-c‚n. Je suis bien peiné de vous apprendre qu'on a retrouvé le corps de votre père au fond de la carrière et que de toute évidence, il s'est jeté dans le vide. Votre mère a l‚chement fui et personne ne sait o˘ elle est, ce qui est heureux pour elle. Voilà, me dit-il en faisant mine de prendre congé. Voilà toutes les nouvelles depuis votre départ. Et maintenant, amusez-vous.
- Un instant ! " Je le retins fermement par l'épaule. " Vieux suppôt de Mictl‚n, racontez-moi la suite. qu'est devenue Tzitzi ? Comment a-t-elle pu me faire ce cadeau ?
- Elle vous a légué tout ce qu'elle a reçu - et Ahui-zotl lui a versé une coquette somme - quand elle s'est vendue à la ménagerie de Tenochtitl‚n.
Elle n'a pas voulu ou pas pu dire d'o˘ elle venait ni qui elle était, aussi les gens l'ont appelée la femme-tapir. "
Si je ne m'étais pas accroché si fort à son épaule, je me serais effondré.
Pendant un moment tout s'évanouit autour de moi et je m'enfonçai dans le long tunnel de la mémoire. Je revis la Tzitzitlini que j'avais adorée, son beau visage, son corps gracieux et ses gestes souples. Puis, je me représentai l'objet immobile et repoussant de la ménagerie des monstres et je me vis moi-même, vomissant devant ce spectacle et la petite larme de désespoir qui avait coulé de son oil unique.
Ma propre voix me sembla résonner dans mes oreilles comme si j'étais réellement dans un tunnel lorsque je lui lançai d'un ton accusateur : "
Vous le saviez ! Sinistre vieillard, vous le saviez avant même la confession de Héron Rouge. Et vous m'avez fait arrêter devant elle... et vous m'avez parlé de la femme avec qui je venais de î
s
coucher... et vous m'avez demandé si j'aimerais... " Je suffoquais, prêt à
vomir encore à ce seul souvenir.
" C'est une chance que vous ayez pu la voir une dernière fois, soupira-t-il. Elle est morte peu après. C'est heureux pour elle, à mon avis. Mais Ahuizotl en a été fort contrarié, après l'avoir payée si cher... "
Je retrouvai mes esprits pour secouer violemment le vieil homme et je l'interpellai avec fureur : "
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