Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
Seminole. Cette petite ville du Sud, qui comptait quelques dizaines de milliers dâhabitants, était située à un peu plus dâune heure de route dâOklahoma City.
Durant le trajet, mon nouvel entraîneur essayait de faire la con-versation. Sauf que je ne comprenais pas lâanglais. Et en plus, le coach Simmons ne parlait pas lâanglais que jâavais lâhabitude dâentendre. Il avait un fort accent du Sud et cela faisait en sorte que je ne reconnaissais même plus les quelques mots de la langue de Shakespeare que jâavais appris dans le passé.
à bord de ce vieux pick-up brun, en regardant les champs à perte de vue qui longeaient la route, jâai tout de suite commencé à me demander dans quoi je mâétais embarquéâ¦
En arrivant à Seminole, Coach Z mâa déposé à la résidence étudiante et il mâa présenté les trois cochambreurs avec lesquels jâallais partager un appartement. Cette fois, ce nâétait plus un choc culturel, câétait un cataclysme!
Mes nouveaux roommates étaient trois Noirs de lâArkansas. à côté du slang quâils parlaient, lâaccent du Sud de Lloyd Simmons ressemblait à celui dâun présentateur de nouvelles de la BBC!
Je ne provenais pas dâun milieu raciste, loin de là . Le choc que je ressentais était purement culturel. Je me sentais déjà très loin de Montréal ou de Mascouche quand jâétais assis à bord du vieux pick-up de Coach Z. Et voilà que je me retrouvais avec trois gars qui nâavaient aucune idée dâoù je venais, qui nâécoutaient pas le même genre de musique, qui ne sâintéressaient pas aux mêmes émissions de télé et qui parlaient un dialecte incompréhensible. à mes oreilles francophones, en tous les cas.
Lâun de mes cochambreurs sâappelait Gaylord Dixon. Câétait un lanceur gaucher dont la rapide atteignait les 98 milles à lâheure. Mais ça nâallait pas très bien dans sa vie. Il semblait un peu mélangé. Le baseball ou les études ne semblaient pas figurer dans ses priorités.
Dixon avait déjà plusieurs enfants. Il sâabsentait souvent et il avait été écarté du programme de baseball à quelques reprises dans le passé. Mais le coach Simmons passait souvent lâéponge. Il semblait savoir ce que Dixon traversait et il tentait de lâaider. Dâautant plus que ce gars-là avait un potentiel immense.
Les deux autres gars avec qui je partageais lâappartement étaient des jumeaux dont je ne comprenais pas un traître mot.
Quelle galère!
Le lendemain de mon arrivée, un dimanche matin, le coach Simmons est venu me cueillir à la résidence pour mâemmener à lâéglise. Un autre choc culturel! Comme la grande majorité des familles québécoises, mes parents, mon frère et moi nâétions pas pratiquants. Nous fréquentions parfois lâéglise à Noël pour la messe de minuit, ou encore lorsquâil y avait un mariage ou des funérailles.
Pendant la messe, le prêtre mâa demandé de me lever afin que tout le monde puisse mieux me voir. Je ne comprenais pas bien ce quâil disait. Jâétais planté là devant tous ces inconnus et je ne savais pas quoi faire.
Jâai conclu que le prêtre me présentait à ses paroissiens et quâil leur expliquait que le coach Simmons mâavait recruté et que jâallais passer lâannée à Seminole. Je me suis rassis. La messe a pris fin et je suis rentré à la résidence.
La semaine suivante, Coach Z mâa demandé si je voulais retourner à lâéglise.
â Ce ne sera pas nécessaire, ai-je répondu.
Les entraînements étaient assez difficiles comme ça⦠Je préférais profiter du dimanche matin pour dormir et reprendre un peu mes forces.
Une semaine après mon arrivée, Jeff Falardeau sâest blessé assez sérieusement, ce qui lâa contraint à quitter lâéquipe et le collège. Jâai donc pu emménager avec Ãric Boisjoly, ce qui a eu pour effet dâatténuer un peu le mal du pays que je ressentais. Mais à peine.
Avant dâarriver à Seminole, les seuls voyages que jâavais faits dans ma vie mâavaient mené en Floride, et
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