Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
lâannée précédente, jâétais resté sous lâimpression que jâallais trouver preneur beaucoup plus tôt.
à lâépoque, toutefois, les joueurs canadiens étaient la plupart du temps sélectionnés assez tard au repêchage. Dans le jargon des recruteurs, les Canadiens étaient presque systématiquement considérés comme étant des draft and follow . Ce qui signifiait que le joueur choisi allait être épié par son équipe durant les 51 semaines suivant sa sélection au repêchage. Après cette période, si les dirigeants de lâorganisation étaient satisfaits des progrès réalisés par le joueur sélectionné, ils lui offraient un contrat avant quâil ne redevienne éligible pour le repêchage de lâannée suivante.
Le recruteur des White Sox qui mâavait recommandé à ses patrons sâappelait John Tumminia. Il avait contacté Alex Agostino, lâun des entraîneurs de lâABC, pour se familiariser un peu avec lâalignement de joueurs de lâABC.
â Je veux repêcher un joueur canadien cette année. Qui me recommandes-tu? avait-il demandé.
Agostino lui avait donné mon nom. Et Tumminia était par la suite venu me voir lancer à quelques reprises.
Deux mois plus tard, les White Sox me sélectionnaient. Et tout de suite après, Tumminia téléphonait à Agostino:
â This guy is gonna be famous! avait-il lancé avec beaucoup dâenthousiasme.
Famous? Longtemps avant tout le monde, Tumminia semblait avait perçu une étincelle que personne dâautre nâavait décelée. Une étincelle que moi-même je nâavais pas ressentie. Ni les dirigeants des White Sox, dâailleursâ¦
Au cours des 51 semaines suivantes, les patrons de Tumminia ne sont jamais venus assister à lâun de mes matchs. On raconte quâils avaient donné la permission à leur recruteur de me faire signer un contrat, à condition de ne pas dépenser plus de 5 000 $. Mais je nâai jamais reçu cette offre. Et de toute manière, à ce prix, la transaction nâaurait sans doute jamais eu lieu.
Les White Sox et moi nâétions sans doute pas faits lâun pour lâautre. à distance, leur dépisteur a tout de même continué à suivre ma carrière, sans doute afin de savoir si câétait lui ou ses patrons qui avaient commis une erreur. Et par un incroyable concours de circonstances, la prophétie quâil avait faite à Alex Agostino a fini par se réaliser plusieurs années plus tard.
Câest dâautant plus incroyable quâen juillet 1994, mes chances de remporter le gros lot de la 6/49 trois semaines dâaffilée semblaient plus élevées que mes chances de faire carrière au baseball. Jâétais dans un cul-de-sac. Il fallait que je déniche un programme de baseball prêt à me faire une place!
Je nâavais nulle part où aller jouer mais je nâavais pas le temps non plus dâépancher ma peine sur le contenu de la lettre de Baseball-Québec. Lâenveloppe était à peine ouverte que je devais plier bagage puisque jâavais été choisi pour faire partie de lâéquipe québécoise au Championnat canadien junior. La compétition avait lieu à Moncton, au Nouveau-Brunswick.
Après lâun des matchs de ce championnat, Ãric Boisjoly, son père et moi nous sommes retrouvés dans le stationnement du stade pour jaser un brin. Câétait le début de lâaprès-midi. Nous parlions de baseball et dâavenir. Surtout dâavenir.
Par lâentremise des Dodgers, Boisjoly venait tout juste dâobtenir une bourse dâétudes au Junior College de Seminole, en Oklahoma. Un Franco-Ontarien sélectionné par les Dodgers, Jeff Falardeau, avait joué à Seminole la saison précédente. Et les Dodgers avaient suggéré à Ãric Boisjoly de suivre le même cheminement que Falardeau.
Lâactualité me concernant était moins enthousiasmante et la nouvelle de mon renvoi de lâABC se répandait comme une traînée de poudre. Boisjoly et son père, Pierre, venaient tout juste de lâapprendre.
â Mon fils sâen va au collège aux Ãtats-Unis. Mais toi, Ãric? Quâest-ce que tu vas faire? avait demandé monsieur
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