Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
ce que les autres lanceurs de lâorganisation faisaient. Mon job consistait simplement à bien me préparer afin de pouvoir fonctionner à pleins gaz à compter du match dâouverture.
Malheureusement, une blessure mineure à un genou mâa empêché de lancer durant la majeure partie du camp. Je nâavais dâailleurs lancé que sept manches dans la Ligue des pamplemousses quand le calendrier 2003 sâest mis en branle.
Malgré cela, jâai repris exactement là où la saison précédente avait pris fin. Il a fallu attendre ma 13 e sortie et mon 10 e sauvetage de la saison, le 4 mai, avant que jâaccorde un premier point à lâadversaire.
Jâétais le même lanceur que la saison précédente mais je me sentais investi de plus grandes responsabilités. Quand jâétais assis dans lâenclos et quâune situation de sauvetage survenait, je me sentais comme un animal en cage. Il fallait absolument que jâen sorte pour aller préserver notre avance.
Entre le 16 et le 22 mai, en lâespace de 7 jours, jâai sauvegardé 6 matchs de suite! Après cette hallucinante séquence, je comptais 18 sauvetages à ma fiche, soit 3 de plus quâà pareille date lâannée précédente.
Mes très nombreuses présences au monticule faisaient toutefois grimacer les observateurs les plus avertis. Utiliser le même lanceur six fois au cours dâune même semaine, qui plus est dans une période aussi peu significative que la mi-mai, est considéré comme une hérésie dans le monde du baseball: les risques de blessures pouvant découler dâune telle surutilisation sont énormes.
Mais je me sentais invincible et je refusais systématiquement de prendre des jours de congé. Lorsquâune possibilité de sauvetage survenait, je voulais quâon me remette la balle. Point à la ligne. Par conséquent, je nâai jamais accepté quâon mâimpose une journée de congé.
Jâai donc passé les plus belles années de ma carrière à mentir. Quand le gérant ou lâentraîneur des lanceurs me demandait comment je me sentais dans les heures précédant un match, je savais exactement ce quâil avait derrière la tête. Alors je ne leur disais jamais que je ressentais de la douleur ou de la fatigue.
â Tout est parfait! No problem!
Cette attitude a dâailleurs donné lieu à plusieurs accrochages avec mes entraîneurs, qui nâétaient tout de même pas nés de la dernière pluie. Il arrivait parfois que notre entraîneur des lanceurs, Jim Colborn, me dise:
â Ãric, nâenfile même pas tes souliers à crampons aujourdâhui. Nous te donnons congé. Tu ne joueras pas.
Et je lui répondais:
â Fuck you, hostie! Iâll put my cleats on and Iâm going out!
Il y a des gens qui mâont fortement conseillé dâêtre plus prudent et de ménager mon corps. Mais jâétais comme une sorte de cheval sauvage qui refusait systématiquement de laisser qui que ce soit tirer sur les guides.
Je me rappelle notamment de quelques réunions au cours desquelles mon agent, Scott Boras, mâa parlé dans le blanc des yeux pour tenter de me faire entendre raison.
â Ãric, ça nâa pas dâallure! Il faut que tu arrêtes! Il faut que tu dises aux entraîneurs de lâéquipe quâils ne peuvent pas tâemployer dans plus de trois matchs consécutifs. Si tu continues comme ça, tu vas raccourcir ta carrière de cinq ou six ans!
â Scott, tu ne me feras jamais dire que je ne veux pas lancer. Ãa irait complètement à lâencontre de ma personnalité. Je ne serais pas capable dâaller dans le bureau du gérant et de lui dire une chose pareille. Ãa ferait de moi le type de joueur que jâai toujours détesté.
Jim Colborn, que nous surnommions «Colby», sâétait joint aux Dodgers en 2000. Il me connaissait donc depuis le début de ma carrière dans les majeures et il était un excellent entraîneur des lanceurs.
Colby avait connu une carrière dâune dizaine dâannées dans les ligues majeures, au cours de laquelle il avait notamment signé des saisons de 20 victoires avec les Brewers de Milwaukee (1973) et de 18 victoires, cette fois en 1977 dans
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