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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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les mets les plus fins qu’on eût pu trouver dans le palais d’un roi. Gauvain mangea et but à satiété, en compagnie du nautonier. Puis, quand celui-ci l’eut laissé, il décida de se coucher dans le Lit de la Merveille. Mais si, cette fois, rien ne vint perturber le calme de la salle, Gauvain eut du mal à trouver le sommeil, tant le hantait l’image d’Orgueluse. « Hélas ! pensait-il, pourquoi suis-je couché dans ce lit, alors que j’ignore où se trouve Orgueluse ? Il faut que je la retrouve, ou je n’aurai jamais de joie parfaite. » Cependant, sa fatigue était telle qu’il finit par s’endormir.
    Le lendemain, le soleil était déjà haut dans le ciel quand Gauvain se leva et revêtit la belle robe qu’on lui avait préparée. Ne voyant personne aux alentours, il sortit de la salle et s’en alla de pièce en pièce jusqu’au pied d’un escalier qui, perçant le plafond, s’enroulait vers le haut comme une spirale. Tenaillé par la curiosité, il entreprit de le gravir. Tout en haut se dressait une belle colonne, qui n’était point faite de bois périssable, mais qui, claire et solide, eût été suffisamment forte pour supporter un poids énorme.
    La chambre à laquelle menait l’escalier était ronde comme une tente. Il était évident, vu la perfection de ses lignes, qu’elle était l’œuvre d’un magicien habile. Ses fenêtres, magnifiques, aussi larges que hautes, étaient tapissées de diamants, d’améthystes, d’émeraudes et de topazes. Le plafond portait les mêmes ornements que les colonnes entre les fenêtres. Mais aucune de ces colonnes ne pouvait être comparée à celle qui s’élevait au centre de la chambre. Pour la mieux contempler, Gauvain monta dans une rotonde où étincelaient d’innombrables pierres précieuses, et il vit alors des choses si merveilleuses que son regard ne s’en pouvait lasser. Il lui sembla que tous les pays de la terre lui apparaissaient dans cette grande colonne, s’y mouvaient en ronde, que les hautes montagnes s’y faisaient la chasse les unes aux autres. Il y vit aussi paraître l’image de gens montés ou à pied, les uns qui couraient, les autres immobiles. Il s’assit dans l’embrasure de la fenêtre, tant l’enchantait l’examen de cette merveille.
    C’est alors qu’apparut, flanquée de deux jeunes filles si belles que Gauvain en faillit perdre le souffle, la reine aux blanches tresses. Pourtant, le souvenir d’Orgueluse le faisait cruellement souffrir. Il les salua courtoisement, et elles lui rendirent son salut. Puis il pria la reine de lui expliquer les étranges vertus de la colonne.
    « Seigneur, répondit-elle, depuis que je la vis pour la première fois, la pierre dont elle est faite n’a jamais cessé de répandre une clarté dans tout le pays jusqu’à six lieues à la ronde. Tout ce qui se passe dans les environs, sur l’eau ou dans la campagne, vient s’y refléter : elle en est le miroir fidèle. Oiseaux ou bêtes sauvages, chevaliers ou forestiers, gens du pays ou étrangers, il n’est rien ni personne dont on n’y distingue l’image. Son éclat s’étend même au fond de la moindre des vallées. Elle est si dure et si résistante que le forgeron le plus vigoureux ne saurait l’entamer à coups de marteau. M’est avis qu’elle n’a pas sa pareille au monde. »
    Cependant, Gauvain, qui regardait toujours attentivement, aperçut sur la colonne un chevalier et une femme qui chevauchaient à vive allure. La femme lui parut fort belle. L’homme, ainsi que son cheval, était recouvert d’une armure, et son heaume était surmonté d’un fier cimier. Il les vit se hâter sur un chemin que coupaient des marais, puis déboucher dans une plaine. C’était sans doute la fin de leur voyage. Ils empruntèrent, pour traverser les marais, la route qui rejoignait la rivière. Le chevalier conduisait par la bride le cheval de la femme. Visiblement, il venait dans le but de rompre des lances.
    Gauvain se tourna vers la fenêtre. Mais ce qu’il vit ne fit qu’aggraver son tourment. Il avait cru que la colonne le trompait. Or il reconnut, à n’en point douter, que c’était Orgueluse de Lorrois qui, accompagnée d’un chevalier aux intentions belliqueuses, traversait le grand pré pour gagner le port. Et, de même que la senteur de certaines herbes, en venant irriter sournoisement l’intérieur du nez, contraint à éternuer, de même l’image d’Orgueluse s’insinua-t-elle dans le cœur de

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