Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
méchante l’entraîne, et il ne reviendra plus, car elle ne laisse échapper aucun de ceux sur lesquels elle a jeté son dévolu. Hélas ! quelle douleur est la nôtre, pauvres infortunées que nous sommes ! »
    Gauvain se retourna vers Orgueluse : « Jeune femme, dit-il, finissons-en de tous ces discours. Tu m’avais dit que tu me suivrais partout, ne serait-ce que pour assister à ma honte. Alors, accompagne-moi dans cette forteresse. – Il est trop tard, répondit Orgueluse. Jamais plus le nautonier ne te fera traverser. Quand tu l’appelleras, il ne t’entendra même pas, et, sans son aide, il est impossible de passer cette rivière. Moi-même, si je peux parfois la franchir, c’est parce que j’en ai le droit. Mais je n’ai pas le pouvoir de mener quelqu’un d’autre. – Qui es-tu donc ? soupira Gauvain, étreint d’une soudaine angoisse. – Je te l’ai dit : je suis Orgueluse de Lorrois. »
    Gauvain était fort perplexe. D’un côté, il aurait voulu tout tenter pour retourner dans la forteresse de la reine aux blanches tresses ; de l’autre, son désir pour la belle Orgueluse ne faisait que s’exaspérer. Et plus il la regardait, plus il la trouvait merveilleuse. Devinant trop bien son trouble, elle se mit à rire de son air penaud. « Gauvain, dit-elle, te souviens-tu du serment que tu as fait à Escavalon ? Tu dois partir en quête de la Lance qui saigne et la rapporter dans un délai d’un an. Faute de quoi tu devras combattre Guinganbrésil pour te justifier de l’accusation de trahison qu’il a lancée contre toi. Que fais-tu de ton honneur ? – C’est juste », dit Gauvain. Et, lentement, il fit avancer son cheval le long de la rivière, s’éloignant de plus en plus de l’étrange forteresse dans laquelle il avait été le témoin d’incroyables merveilles. Et Orgueluse le suivait, au pas tranquille de son palefroi {18} .

6
 
À la recherche de Gauvain
    Au temps du roi Arthur, dont la valeur exceptionnelle avait su rassembler la fine fleur des chevaliers courtois, vivaient, quelque part dans le royaume de Bretagne, deux jeunes chevaliers de grande renommée. L’un avait nom Méraugis de Portleguez, l’autre Gorvain Cadruz. Ils étaient compagnons d’armes, ainsi que les meilleurs amis du monde. Chaque fois que l’un devait participer à un tournoi, l’autre se faisait un devoir de l’accompagner et de l’assister. Et l’on ne tarissait pas d’éloges sur eux, à propos tant de leur vaillance que de leur indéfectible amitié.
    Or, un jour, dans la ville de Lindesore, la dame de Landemore, qui gouvernait le pays, organisa un grand tournoi auquel elle avait convié les meilleurs chevaliers du temps. Celui qui aurait l’honneur de se voir désigner vainqueur du tournoi remporterait en prix un cygne perché sur un pin, et il aurait le privilège d’embrasser la dame de Landemore, qui n’était pas un laideron, tant s’en faut. Une fois le cygne remis au vainqueur, on sonnerait du cor auprès de la fontaine sous le pin : sur un perchoir de sapin, se tiendrait un épervier déjà mué auquel nul ne toucherait avant que ne fût déclarée victorieuse celle qui se révélerait la plus belle de toutes les dames et les jeunes filles présentes. Sa robe pourrait bien être trouée aux coudes, aucune femme inférieure à elle en beauté ne pourrait obtenir l’épervier.
    Méraugis de Portleguez et Gorvain Cadruz ne se firent pas faute de venir à cette assemblée. Et bien qu’aucun des deux n’eût été reconnu vainqueur du tournoi, tous deux s’y distinguèrent avec tant d’éclat que nombre de jeunes filles ne voyaient plus qu’eux. Entre celles-ci se trouvait une fille de grand mérite, nommée Lidoine, dont le père était le roi de Cavalon. D’une beauté remarquable, elle avait des traits harmonieux et les cheveux plus dorés que les ailes d’un loriot. Elle avait un front haut, pur et régulier. Ses sourcils bruns {19} , fort bien dessinés, atteignaient si fort à la perfection qu’on les eût dits tracés au pinceau. Ils étaient légèrement étirés vers les tempes et bien écartés. Ses yeux avaient une expression si subtile que la flèche de son regard aurait bien transpercé l’épaisseur de cinq boucliers, triomphant ainsi du cœur le plus profondément enfoui dans une poitrine. Et elle avait le teint plus frais et plus vermeil que la rose des prés, un nez fin et droit, une belle bouche et des dents très blanches. Quand sa langue se

Weitere Kostenlose Bücher