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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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adressés à un collégien de treize ans, traite fort éloquemment la question sociale, soulevée par toutes les écoles réformatrices d'alors. «Quand tu seras plus grand, écrit-elle à Maurice, tu liras l'histoire de cette Révolution dont tu as tant entendu parler et qui a fait faire un grand pas à la raison et à la justice.» Mais, à son estime, l'oeuvre révolutionnaire n'est qu'ébauchée, imparfaite. Il faut la parachever, en organisant une société meilleure, toute différente de «cette immense armée de coeurs impitoyables et d'âmes viles qui s'appelle la Garde Nationale» Elle ne veut pas que son fils se range un jour du côté de ces hommes, plus bêtes que méchants, qui défendent la propriété avec des fusils et des baïonnettes et qui regardent comme des brigands et des assassins ceux qui donnent leur vie pour la cause du peuple. Sur tous ces points elle catéchise Maurice, elle lui communique la ferveur républicaine, en lui recommandant de ne montrer ses lettres à personne,-ce qui visait particulièrement M. Dudevant, modèle achevé de l'électeur censitaire et du bourgeois rétrograde. «Dis-moi, demande-t-elle à son fils, si tu trouves juste cette manière de partager inégalement les produits de la terre, les fruits, les grains, les troupeaux, les matériaux de toute espèce, et l'or (ce métal qui représente toutes les jouissances, parce qu'un petit fragment se prend en échange de tous les autres biens). Dis-moi, en un mot, si la répartition des dons de la création est bien faite, lorsque celui-ci a une part énorme, cet autre une moindre, un troisième presque rien, un quatrième rien du tout ! Il me semble que la terre appartient à Dieu, qui l'a faite, et qui l'a confiée aux hommes pour qu'elle leur servît d'éternel asile.
    Mais il ne peut pas être dans ses desseins que les uns y crèvent d'indigestion et que les autres y meurent de faim. Tout ce qu'on pourra dire là-dessus ne m'empêchera pas d'être triste et en colère quand je vois un mendiant pleurant à la porte d'un riche.»
    Voilà le mal social clairement et justement dénoncé. Où est le remède ? George Sand le cherchera avec persévérance. Elle le demandera aux divers systèmes socialistes qui sollicitaient la faveur ou la curiosité publique. De même que Sainte-Beuve, elle traversa le saint-simonisme, mais sans y trouver la satisfaction de son esprit et la réalisation de ses rêves. En compagnie d'Alfred de Musset, elle avait assisté à l'une des cérémonies rituelles de cette nouvelle religion humanitaire. Elle ne se soucia pas d'être la Mère que cherchait le Père Enfantin, et elle explique ses réserves dans une lettre du 14 février 1837 à Adolphe Guéroult. Les saint-simoniens ont le tort grave, à ses yeux, de déserter la cause de la justice et de la vérité en France, de transporter leurs efforts en Orient, de pactiser avec le gouvernement de Louis-Philippe et de négliger l'idéal républicain. Ces compromissions-là, elle ne peut y acquiescer. Dès le 15 février 1836, dans l'ardeur de son premier zèle de néophyte, elle écrivait à la famille saint-simonienne de Paris : «Fidèle à de vieilles affections d'enfance, à de vieilles haines sociales, je ne puis séparer l'idée de république de celle de régénération ; le salut du monde me semble reposer sur nous pour détruire, sur vous pour rebâtir. Tandis que les bras énergiques du républicain feront la ville, les prédications sacrées du saint-simonien feront la cité. Vous êtes les prêtres, nous sommes les soldats.»
    Suit un hymne enflammé où, républicaine, elle annonce sa foi combative en de vagues croyances philanthropiques : «Quant à moi, solitaire jeté dans la foule, sorte de rapsode, conservateur dévot des enthousiasmes du vieux Platon, adorateur silencieux des larmes du vieux Christ, admirateur indécis et stupéfait du grand Spinoza, sorte d'être souffrant et sans importance qu'on appelle un poète, incapable de formuler une conviction et de prouver, autrement que par des récits et des plaintes, le mal et le bien des choses humaines, je sens que je ne puis être ni soldat ni prêtre, ni maître ni disciple, ni prophète ni apôtre ; je serai pour tous un frère débile, mais dévoué ; je ne sais rien, je ne puis rien enseigner ; je n'ai pas de force, je ne puis rien accomplir. Je puis chanter la guerre sainte et la sainte paix ; car je crois à la nécessité de l'une et de l'autre. Je rêve dans ma

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