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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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souper. Heureux temps ! ô ma Vallée Noire ! ô Corinne ! ô Bernardin de Saint-Pierre ! ô l'Iliade ! ô Millevoye ! ô Atala ! ô les saules de la rivière ! ô ma jeunesse écoulée ! ô mon vieux chien, qui n'oubliait pas l'heure du souper, et qui répondait au son lointain de la cloche par un douloureux hurlement de regret et de gourmandise !».
    Tels sont les souvenirs que George Sand avait gardés de l'âge d'or, où elle eut comme compagne de jeu Ursule, nièce de la femme de chambre de madame Dupin, et qui restera pour elle, à travers la vie, une amie fidèle, malgré la différence des conditions. Quand il était question pour Aurore de choisir entre sa grand'mère et sa mère, de sacrifier celle-ci au profit de celle-là, Ursulette disait, en toute petite paysanne déjà attachée à l'argent : «C'est pourtant gentil d'avoir une grande maison et un grand jardin comme ça pour se promener, et des voitures, et des robes, et des bonnes choses à manger tous les jours. Qu'est-ce qui donne tout ça ? C'est le richement. Il ne faut donc pas que tu pleures, car tu auras, avec ta bonne maman, toujours de l'âge d'or et toujours du richement.»
    L'enfant développait le mot qu'elle avait entendu sa tante Julie dire un jour à Aurore : «Vous voulez donc retourner dans votre petit grenier manger des haricots ?»
    George Sand convient que sa mère avait un caractère assez difficile à manier. Elle était brusque, emportée, vaniteuse en même temps, au point de se faire adresser son courrier au nom de madame de Nohant-Dupin. L'Histoire de ma Vie lui prête des opinions démocratiques qu'elle n'eut jamais. Elle était grisette dans l'âme et cherchait à inculquer à sa fille des habitudes de frivolité et de coquetterie. Ne passait-elle pas des heures à la coiffer à la chinoise ? «C'était bien, dit George Sand, la plus affreuse coiffure que l'on pût imaginer, et elle a été certainement inventée par les figures qui n'ont pas de front. On vous rebroussait les cheveux en les peignant à contre-sens jusqu'à ce qu'ils eussent pris une attitude perpendiculaire, et alors on en tortillait le fouet juste au sommet du crâne, de manière à faire de la tête une boule allongée surmontée d'une petite houle de cheveux. On ressemblait ainsi à une brioche ou à une gourde de pèlerin. Ajoutez à cette laideur le supplice d'avoir les cheveux plantés à contre-poil ; il fallait huit jours d'atroces douleurs et d'insomnie avant qu'ils eussent pris ce pli forcé, et on les serrait si bien avec un cordon pour les y contraindre qu'on avait la peau du front tirée et le coin des yeux, relevé comme les figures d'éventail chinois.» La grand'mère, qui trouvait ridicules toutes ces futilités et qui n'avait pour les goûts vulgaires et plébéiens de sa bru aucune indulgence, s'évertua et réussit à prendre en mains l'éducation d'Aurore. Les deux femmes, vers la fin de 1810, rompirent la vie commune.
    L'enfant passa presque toute l'année à Nohant, sauf un court séjour à Paris en hiver. Sophie, au contraire, domiciliée à Paris avec sa fille Caroline et jouissant d'une pension que lui servait sa belle-mère, allait seulement à Nohant pour la saison des vacances. Ce train d'existence dura jusqu'à la fin de 1814.
    Outre Ursule, Aurore avait un grand ami à la campagne : c'était un âne, très vieux et très bon, qui ne connaissait ni la corde ni le râtelier. On le laissait errer en liberté. «Il lui prenait souvent fantaisie d'entrer dans la maison, dans la salle à manger et même dans l'appartement de ma grand'mère, qui le trouva un jour installé dans son cabinet de toilette, le nez sur une boîte de poudre d'iris qu'il respirait d'un air sérieux et recueilli. Il avait même appris à ouvrir les portes qui ne fermaient qu'au loquet... Il lui était indifférent de faire rire ; supérieur aux sarcasmes, il avait des airs de philosophe qui n'appartenaient qu'à lui. Sa seule faiblesse était le désoeuvrement et l'ennui de la solitude qui en est la conséquence. Une nuit, ayant trouvé la porte du lavoir ouverte, il monta un escalier de sept ou huit marches, traversa la cuisine, le vestibule, souleva le loquet de deux ou trois pièces et arriva à la porte de la chambre à coucher de ma grand'mère ; mais trouvant là un verrou, il se mit à gratter du pied pour avertir de sa présence. Ne comprenant rien à ce bruit, et croyant qu'un voleur essayait de crocheter sa porte, ma grand'mère

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