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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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avait aussi rallongé son corsage, et, au lieu d'avoir l'air d'une pièce de bois habillée, elle avait la taille fine et ployante comme le corps d'une belle mouche à miel. De plus, je ne sais pas avec quelle mixture de fleurs ou d'herbes elle avait lavé pendant huit jours son visage et ses mains, mais sa figure pâle et ses mains mignonnes avaient l'air aussi net et aussi doux que la blanche épine du printemps. Landry, la voyant si changée, laissa tomber son livre d'heures, et, au bruit qu'il fit, la petite Fadette se retourna tout à fait et le regarda, tout en même temps qu'il la regardait. Et elle devint un peu rouge, pas plus que la petite rose des buissons ; mais cela fa fit paraître quasi belle, d'autant plus que ses yeux noirs, auxquels jamais personne n'avait pu trouver à redire, laissèrent échapper un feu si clair qu'elle en parut transfigurée.
    Et Landry pensa encore : Elle est sorcière ; elle a voulu devenir belle de laide qu'elle était, et la voilà belle par miracle. Il en fut comme transi de peur, et sa peur ne l'empêchait pourtant point d'avoir une telle envie de s'approcher d'elle et de lui parler, que, jusqu'à la fin de la messe, le coeur lui en sauta d'impatience.»
    Enfin les aveux s'échangent, le jour où Fadette doit s'éloigner, et les paroles qu'elle prononce sont d'une chasteté parfaite et d'une suavité pénétrante, Landry en est tout troublé. Il rit, il pleure, comme un fou. «Et il embrassait Fanchon sur ses mains, sur sa robe ; et il l'eût embrassée sur ses pieds, si elle avait voulu le souffrir ; mais elle le releva et lui donna un vrai baiser d'amour dont il faillit mourir ; car c'était le premier qu'il eût jamais reçu d'elle, ni d'aucune autre, et, du temps qu'il en tombait comme pâmé sur le bord du chemin, elle ramassa son paquet, toute rouge et confuse qu'elle était, et se sauva en lui défendant de la suivre et en lui jurant qu'elle reviendrait.» Elle revient en effet, et ils s'épousent. Heureuse et riche, elle se comporte en bonne villageoise à l'âme socialiste, tout comme la châtelaine de Nohant. Dans sa demeure elle recueille, quatre heures chaque jour, les enfants nécessiteux de la commune, les instruit, les assiste, leur enseigne la vraie religion, sans doute le christianisme intégral. Mais il y a une ombre à ce patriarcal tableau. Landry, hélas ! n'était pas seul à aimer Fanchon Fadette. Le besson Sylvinet nourrissait les mêmes sentiments. Il lui serait trop cruel d'être le témoin d'un bonheur dont il se trouve frustré. Alors il s'engage dans la Grande Armée, devient capitaine, obtient la croix, et peut-être ira-t-il finir ses jours au village, quand la blessure de son coeur sera définitivement cicatrisée.
    Pour compléter la trilogie des romans champêtres, voici le plus court, mais le plus exquis, la Mare au Diable, qui fut composé avant François le Champi et la Petite Fadette. Ce triptyque, dans la pensée de l'auteur, ne correspondait à aucun système, à aucune prétention révolutionnaire en littérature. George Sand se bornait à traduire d'instinct les douces émotions rurales qui lui étaient familières. «Si l'on me demande, écrit-elle dans la «notice» de la Mare au Diable, ce que j'ai voulu faire, je répondrai que j'ai voulu faire une chose très touchante et très simple, et que je n'ai pas réussi à mon gré. J'ai bien vu, j'ai bien senti le beau dans le simple, mais voir et peindre sont deux ! Tout ce que l'artiste peut espérer de mieux, c'est d'engager ceux qui ont des yeux à regarder aussi. Voyez donc la simplicité, vous autres, voyez le ciel et les champs, et les arbres, et les paysans surtout dans ce qu'ils ont de bon et de vrai : vous les verrez un peu dans mon livre, vous les verrez beaucoup dans la nature.»
    Par quel étrange caprice du romancier cette oeuvre, essentiellement descriptive et reposante, met-elle à son frontispice le mélancolique spectacle d'une composition d'Holbein, presque macabre ? Un laboureur, qui pousse son maigre attelage, est talonné par un personnage fantastique, squelette armé d'un fouet. Ce valet de charrue, c'est la Mort. Et George Sand, dans le chapitre préliminaire intitulé : «L'auteur au lecteur», proteste contre cette philosophie du désespoir, résumée dans le vieux quatrain :
      A la sueur de ton visaige
      Tu gagnerois ta pauvre vie.
      Après long travail et usaige,
      Voicy la mort qui te convie.
    L'optimisme, non pas inné, mais acquis et

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