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George Sand

George Sand

Titel: George Sand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elme Caro
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de mauvaises herbes, elle plante du lierre ; elle s'éreinte dans un jardin de poupée, et cela la fait dormir, dit-elle, et manger on ne peut mieux.
    On la voit d'ici, et dans quel costume négligé je la surpris, cette bonne travailleuse de la terre !
La vie d'intérieur, elle l'avait d'ailleurs recherchée, même à travers les circonstances les plus contraires, à condition que l'intérieur fût réglé par elle et qu'on lui laissât certaines libertés, d'ordinaire inconciliables. Quel est le sentiment qui dominait quand elle alla s'établir avec ses enfants à Majorque, traînant avec elle le pauvre Chopin, déjà très malade ? Il faut lire ses lettres de l'hiver de 1839, datées de l'abbaye de Valdemosa, pour se rendre compte de cette sorte de maternité exaltée dans laquelle s'était transformée toute autre affection et qu'elle étendait sur le grand artiste souffrant. Dans cette famille réunie d'une façon assez bizarre, n'est-ce pas comme un autre enfant à elle qu'elle soigne et pour lequel elle se dévoue ainsi ? Ne pourrait-on pas s'y tromper ? La vieille Chartreuse était d'une poésie incomparable ; la nature était admirable, grandiose et sauvage ; des aigles traversaient l'air au-dessus de leur tête ; mais le climat devenait horrible, la pluie torrentielle ; les habitants hostiles les regardaient comme des pestiférés. Tout cela eût paru tolérable si Chopin avait pu s'en arranger ; mais cette poitrine, blessée à mort, allait de mal en pis. Une femme de chambre, amenée de France à grands frais, commençait à refuser le service, comme trop pénible. On voyait le moment où Lélia, après avoir fait le coup de balai et le pot-au-feu, allait aussi tomber de fatigue ; car, outre son travail de précepteur pour Maurice et Solange, outre son travail littéraire, il y avait les soins continuels qu'exigeait le malade et l'inquiétude mortelle qu'il lui causait.
    Enfin, faut-il le dire ? Lélia était couverte de rhumatismes. On partit enfin ; Chopin put partir aussi et, grâce à elle, arriver à Paris [Voir spécialement les lettres des 14 novembre, 14 décembre 1838, des 15 et 20 janvier, 22 février et 8 mars 1839.]. Il n'était que temps. Sans insister sur ce sujet, on pourrait dire qu'il y eut presque toujours ainsi, dans les affections les plus diverses de George Sand, je ne sais quel instinct maternel indécis ou égaré, ce qui faisait dire à un homme d'esprit «qu'elle était la fille de Jean-Jacques Rousseau et de Mme de Warens». L'infirmité morale de cette nature, incomplète et prodigue, était de confondre des sentiments trop différents dans une sorte de mélange que l'opinion, même la plus indulgente, jugeait souvent équivoque et refusait de comprendre.
Quand l'instinct maternel fut à peu près dégagé de l'alliage et rendu à ses véritables objets, il s'empara de cette vie en maître, presque en tyran. La vie de famille l'envahit. Elle est l'esclave de ses enfants et de ses petits-enfants ; elle organise toute son existence pour les tenir en joie avec des jouets, avec des récits, pour les élever, plus tard pour leur gagner des dots et les bien marier. C'est pour eux qu'elle fonde son fameux théâtre des marionnettes, qui tient une si grande place dans sa vie. Maurice est l'impresario ; elle-même est le poète de ces petits drames [Mme Sand a recueilli avec soin les principales de ces pièces dans un volume à part : le Théâtre de Nohant, où se trouvent le Drac, Plutus, le Pavé, la Nuit de Noël, Marielle. Ce ne sont pas tout à fait les pièces telles qu'elles avaient été récitées sur la scène de Nohant, d'après un canevas détaillé, mais telles que l'auteur les a écrites après coup, sous l'impression qui lui en était restée.].
    «Je suis restée très gaie, sans initiative pour amuser les autres, mais sachant les aider à s'amuser.»
Quand elle voulut bien me promener à travers toute sa maison, après une station au jardin, non loin de la rivière où elle avait manqué, aux jours d'autrefois, dans un accès de jeune désespoir, de chercher une fin à une existence dont la perspective la troublait déjà, c'est dans la petite salle de théâtre qu'elle me conduisit, comme dans un lieu consacré par les rites joyeux de la famille. Mais le théâtre était vide et démeublé. Sur les parois humides je pus voir encore
Du spectacle d'hier l'affiche déchirée.
Tout sentait l'abandon momentané dans la gentille salle, habituée aux

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