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Gondoles de verre

Gondoles de verre

Titel: Gondoles de verre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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vous aussi.
    Voilà, comme ça, il aurait la paix un moment.

5
    Vêtue d’une crinoline en satin vert s’harmonisant à ses cheveux châtain clair, Mme Caserta – âgée tout au plus de vingt-cinq ans – se tenait à la fenêtre de son salon dans la suite qu’elle occupait à l’hôtel Regina e Gran Canal . Sa mine traduisait à quel point elle jugeait importune cette visite de la police vénitienne. Elle tenait entre deux doigts pointus la modeste carte que Tron avait remise à sa femme de chambre et sur laquelle il doutait qu’elle eût jeté plus qu’un regard furtif.
    — Vous appartenez à la police vénitienne ?
    Tron jugea la question superflue, d’autant que Bossi, arrêté un pas derrière lui, portait l’uniforme comme d’habitude.
    — Que me vaut l’honneur de votre visite ?
    Son italien aux intonations napolitaines était mêlé d’une inflexion qu’il ne parvenait pas à identifier ; on aurait presque dit un accent allemand. Le plus troublant demeurait toutefois qu’il avait l’impression de la connaître ou, du moins, qu’elle lui rappelait fortement quelqu’un. Mais qui ? Où et quand avait-il déjà vu ce menton énergique, cette bouche sensuelle et ces lèvres un peu tombantes qui lui donnaient une expression boudeuse ? En tout cas, Mme Caserta était une belle jeune femme à la taille élégante et au joli profil. Ses cheveux noués en tresses et disposés avec art autour de sa tête étaient magnifiques.
    La vue de l’autre côté du Grand Canal, elle aussi, était magnifique. La silhouette dorée de la Douane de mer, en face de l’hôtel, scintillait dans la lumière du soleil. Derrière, les mâts des voiliers amarrés aux pontons flottants à l’entrée du canal de la Giudecca se balançaient dans un ciel pur, presque sans nuages – un jour parfait pour une promenade en gondole, pensa-t-il. Néanmoins, Mme Caserta ne semblait pas séjourner à Venise par plaisir. Malgré sa grande assurance, elle dégageait une indéniable nervosité. Le commissaire fit un pas dans sa direction.
    — Quelques questions auxquelles vous n’aurez aucun mal à répondre, madame.
    La jeune femme lui lança un regard à la fois sombre et indécis, semblant prête à refuser de répondre à ses questions, qu’elles soient faciles ou non. Pour finir, elle approcha de son visage la carte de visite qu’elle tenait toujours entre les doigts de sa main droite et plissa les yeux. Tron la vit alors ouvrir la bouche d’étonnement, puis se tourner vers lui avec de grands yeux ronds.
    — Commissaire Tron ?
    Il s’inclina en silence. Mme Caserta ne se donnait aucune peine pour dissimuler sa surprise.
    — Comte Tron ?
    — Commissaire, madame. Pendant le service, commissaire. Vous me connaissez ? demanda-t-il d’un air gêné.
    Depuis ses fiançailles avec la princesse de Montalcino, toutes sortes de gens, et pas seulement à Venise, semblaient s’intéresser à lui – une célébrité douteuse dont il se serait bien passé. Mais à ce moment-là, la jeune femme lui offrit une surprise qui le disposa véritablement en sa faveur.
    — L’affaire de la Lloyd ! s’exclama-t-elle gaiement. Votre fuite des prisons de plomb ! Le bal masqué ! Ma…
    Elle s’interrompit soudain, toute gaieté s’évanouit de son visage.
    — Ma femme de chambre m’a tout raconté.
    Elle reprit sa respiration, comme après un terrible effort.
    — Mais je vous fais perdre votre temps, commissaire. De quoi s’agit-il ?
    — D’un marchand d’art habitant au palais da Lezze, répondit Tron.
    — Vous voulez parler de M. Kostolany ?
    — C’est cela même.
    — Que se passe-t-il ? demanda-t-elle en fronçant les sourcils.
    Tron n’avait jamais été amateur de longs préambules dans ce genre de situation.
    — Il a été assassiné chez lui la nuit dernière.
    Mme Caserta pencha la tête en arrière, comme si elle venait de recevoir une gifle. Pendant un instant, elle resta figée devant la fenêtre. Ses yeux, rivés sur Tron, s’écarquillaient, mais cette fois, ils n’exprimaient que le vide. Enfin, le vide céda la place à la consternation. Tron pouvait littéralement voir ses pensées tourbillonner dans son crâne. Elle dit, les lèvres tremblantes :
    — Kostolany a été assassiné ?
    Il hocha la tête.
    — Son assistant l’a retrouvé mort hier soir et nous a aussitôt alertés.
    — Et pourquoi… êtes-vous venus me voir ?
    La voix de Mme Caserta était à la fois hésitante et essoufflée. Sa mine

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