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Hannibal, Sous les remparts de Rome

Hannibal, Sous les remparts de Rome

Titel: Hannibal, Sous les remparts de Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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créature aussi splendide. Sa récente maternité
n’avait pas déformé Imilcé mais, au contraire, l’avait épanouie. Elle était
devenue encore plus féminine et sûre d’elle-même sans avoir rien perdu de sa
jeunesse. Son fils, âgé de quelques mois, dormait non loin de là, surveillé
nuit et jour par un véritable essaim d’esclaves grecques et ibères. Par un
reste de superstition, elle ne lui avait pas encore donné de nom afin de
détourner de son berceau les génies malfaisants. Caché derrière une tenture,
Hannibal demeura un long moment à contempler son épouse qui arpentait la pièce
en bouillant d’impatience. Finalement, il toussota légèrement pour signaler sa
présence et s’enquit d’un ton badin auprès de la jeune femme :
    — Ta
journée fut-elle bonne ?
    — Aussi
agréable que possible. Quel magnifique spectacle que ces colonnes de fantassins
marchant d’un pas martial, et ces lourds chariots traînés par des bœufs ou des
chevaux. Je ne voulais pas en perdre une seule miette, de peur de rater ton
passage à la tête de tes hommes, pour te faire mes adieux comme il sied à une
épouse aimante.
    — Ton
ironie me transperce le cœur.
    — Te
parlerais-je du mien ? Tu fais un singulier guerrier, Hannibal. Tu n’as
pas ton pareil pour haranguer tes hommes et leur tenir de beaux discours sur la
gloire et la grandeur de Carthage. Tu es capable de déployer des trésors
d’ingéniosité pour négocier avec les Romains, leur tenir le langage qu’ils
veulent entendre et, dans le même temps, faire le contraire de ce que tu
affirmes. Mais parler avec ta femme de son sort est au-dessus de tes
forces !
    — C’est
faux.
    — Tu
mens mal.
    — Je
t’assure que jusqu’à ce soir, je n’avais rien encore décidé te concernant. S’il
ne tenait qu’à moi, tu ferais partie, avec mon fils, de cette expédition.
    — Prétendrais-tu
que le Sénat de Carthage s’y oppose ? Lui as-tu seulement envoyé un
émissaire à ce sujet ? Crois-tu qu’il pourrait te refuser cette
faveur ?
    — Les
choses ne sont pas aussi simples. J’ai besoin de toi.
    — Donc
je pars.
    — Tu
ne m’as pas laissé te dire l’endroit où ta présence me sera le plus utile.
C’est à Carthage et non au milieu de mes hommes.
    — Pourquoi ?
    — Voilà
près de dix ans que je suis loin de ma patrie, coupé de mes partisans au sein
du Conseil des Cent Quatre. Jusqu’à présent, lorsque le besoin s’en faisait
sentir, je pouvais ordonner à l’un de mes frères de se rendre dans notre cité
pour y plaider ma cause. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. L’un d’entre eux,
Hasdrubal, restera ici pour veiller au calme de cette province. L’autre, Magon,
doit me suivre. La partie qui s’engage est décisive et mes ennemis au sein du
Sénat guettent avec impatience mes premiers faux pas et une éventuelle défaite.
Bien sûr, je puis compter sur Itherbaal, le chef du parti barcide, encore que
je ne me fasse aucune illusion sur l’être humain. Il m’est dévoué, mais, je le
sais, soit par conviction, soit par goût de l’intrigue, il pourrait me trahir.
J’ai besoin d’une personne qui soit totalement fidèle à notre famille parce
qu’elle y appartient et parce que notre perte signifierait la sienne. Je n’en
connais qu’une : toi. Tu n’as jamais cessé de me prodiguer de très sages
conseils. Tu es habile et assez retorse pour déjouer les ruses de nos
adversaires. Tu sauras te faire respecter de nos partisans et ils sauront que
tu parles en mon nom et que ton avis primera sur le leur. Ils n’agiront pas de
même si je leur envoie l’un de mes conseillers.
    — Tu
oublies que je ne suis pas carthaginoise.
    — C’est
au contraire un atout précieux. Une Punique a les défauts de sa race :
elle est tantôt cupide, tantôt calculatrice et avare, prête à toutes les
lâchetés pour conserver sa fortune. Toi, même si ta grand-mère est l’une des
nôtres, tu appartiens à un peuple qui connaît le prix de l’indépendance pour
l’avoir perdue. C’est de là que te vient ta fierté ; aussi, je suis persuadé
que tu sauras faire les choix qui s’imposent. Je sais ce que te coûte cette
séparation et, par Melqart, je jure qu’elle me pèse aussi, bien que je doive
n’en rien laisser paraître devant mes hommes. Après tout, eux aussi doivent
abandonner leurs familles. Mais la mission que je te confie en dit long sur
l’amour que je te porte. C’est désormais

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