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Haute-savane

Haute-savane

Titel: Haute-savane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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aussi…
    — Pourquoi, en ce cas, coupa l’autre, a-t-elle choisi de me rejoindre alors que le grand chef blanc avait ordonné qu’elle fût ramenée à Sagoyewatha ?
    Le ton ironique n’enlevait rien à la hargne toujours latente dans la voix du chef.
    — Que t’a-t-elle dit quand elle t’a rejoint ? demanda le chevalier.
    — Qu’elle était captive du grand chef blanc, que l’on voulait la ramener à son époux mais qu’elle choisissait, librement, de venir à moi parce qu’elle ne pouvait plus appartenir qu’au plus grand des guerriers des Six Nations. Il y a peu de place, dans tout cela, pour ce grand amour dont tu me parles…
    Gilles ne répondit pas tout de suite. Il devinait que l’amour-propre du mâle était en jeu et qu’à cette minute il risquait peut-être de perdre l’enfant comme il avait jadis perdu la mère. Comment, sans l’offenser, faire admettre à Cornplanter que, si la belle Indienne avait choisi, alors, de se livrer à lui au lieu de retourner auprès de Sagoyewatha, son époux, c’était pour éviter de faire couler le sang ? Elle s’était sacrifiée, puisqu’il ne lui était pas possible de vivre avec Gilles l’existence dont elle rêvait, sachant bien que Sagoyewatha, dans sa noblesse, s’inclinerait devant son choix quel qu’il fût sans faire parler les armes. Alors qu’il en eût été tout autrement si elle ne s’était pas rendue au désir de Cornplanter. Celui qui n’avait pas craint, à cette époque, d’oser une tentative d’enlèvement presque sous les yeux de son époux n’aurait pas hésité une seconde à déclencher une guerre tribale pour s’emparer d’elle.
    Par-dessus les flammes du foyer, il vit luire, entre les paupières mi-closes, les yeux de son ennemi. Cornplanter ressemblait à présent à un chat sauvage, l’emblème même de son clan, guettant la proie sur laquelle il va fondre. Il eut alors un haussement d’épaules désabusé.
    — Je t’ai dit qu’elle m’avait aimé, soupira-t-il, mais peut-être m’aimait-elle moins. Elle était fille de chef, femme de chef… et je n’étais, moi, qu’un soldat tenu à l’obéissance.
    Le rire de gorge de Cornplanter sonna comme les trompettes du triomphe. La vanité satisfaite était en train de balayer la méfiance.
    — Elle était la plus belle, il lui fallait le plus grand ! proclama-t-il vaniteusement. Comment pouvais-tu espérer la retenir, toi, un homme de rien ?
    — Je ne suis pas un homme de rien, coupa sèchement Gilles. Dans mon pays, mon clan est l’un des plus nobles et, depuis la nuit des temps, nombreux sont les grands guerriers qu’il a produits.
    — J’en suis heureux pour toi car il eût été singulièrement téméraire de venir proclamer ici que « mon » fils portait en lui un sang misérable. Quel est ton nom ? J’entends te donner la satisfaction de le faire résonner ici avant que je n’efface définitivement son porteur de la surface de la terre.
    Le cœur de Gilles manqua un battement à cette paisible déclaration qui ressemblait si fort à une sentence de mort mais il ne sourcilla même pas. Et ce fut avec un aimable sourire qu’il demanda :
    — As-tu oublié que je ne suis pas venu seul ?
    — Je n’oublie jamais rien, mais tes amis n’auront aucune raison d’intervenir. Ils ont dû, de leur poste d’observation, constater que tu entrais en paix et librement dans cette demeure, n’est-ce pas ?
    — En effet.
    — Et ils sont, je suppose, décidés à attendre paisiblement que nos palabres s’achèvent. Chez nous, les Iroquois, la parole est lente et la décision plus lente encore. Cela laissera à mes Chats sauvages tout le temps de repérer tes amis… et de les éliminer l’un après l’autre. Mais toi tu seras mort depuis longtemps.
    Lentement, Gilles se releva, déployant sa longue silhouette, ce qui lui permit de dominer Cornplanter. Il n’avait pas cessé de sourire.
    — Crois-tu que je me laisserai tuer en silence ? Ma voix est aussi puissante que mes muscles…
    — Ta mort sera si rapide que tu n’auras même pas le temps d’un appel… Nahena !
    La jeune femme reparut et, sur un ordre, alla chercher un assez grand panier fait de fortes fibres tressées et dont le couvercle était solidement attaché. Avec une visible répugnance, elle vint le déposer entre les mains de son seigneur et maître. Celui-ci retroussa les babines comme un chien prêt à mordre.
    — Tu ne m’as toujours pas dit ton

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