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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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en Suisse en 1793, avant de s’embarquer pour les États-Unis ?
     
    L’enquête que devait conduire Fontsalte dans les cantons forestiers était délicate. Il convenait en effet de ménager les susceptibilités de Bachmann et Reding, combattants courageux, adversaires loyaux, que Bonaparte ne désespérait pas de voir un jour entrer dans une armée helvétique alliée, obligée de la France 8 .
     
    En quelques jours de vagabondage entre Schwyz et Glaris, Blaise apprit que Moore, avant de quitter le pays, avait confié à un habitant d’Altdorf des documents et des plans qui attestaient de la réalité du projet d’assistance des Anglais aux fédéralistes suisses. Fontsalte vit une intention symbolique dans le choix d’Altdorf, ville de Guillaume Tell, héros suisse par excellence.
     
    L’officier n’eut aucun mal à se faire passer pour un émigré qui, autorisé comme la plupart d’entre eux à rentrer en France, usait de cette liberté de mouvement pour jouer les agents de liaison du prétendant au trône, exilé chez le tsar Alexandre I er . En costume civil et se présentant, sous le nom de sa mère, comme baron des Atheux, il entra aisément en contact avec des meneurs fédéralistes, démobilisés mais prêts à relancer au moment favorable la lutte contre les Français. Or, la rupture de la paix avec l’Angleterre ayant été annoncée le 20 mai aux Assemblées françaises après les demandes irrecevables présentées à Talleyrand par lord Whitworth, ambassadeur de Grande-Bretagne, on pouvait penser que la guerre allait reprendre incessamment entre les puissances signataires de la paix d’Amiens.
     
    Au cours d’une réunion à Altdorf avec d’anciens officiers de l’armée de Reding, le baron des Atheux se dit prêt à faire part à Louis XVIII des projets de Moore, qu’on pourrait mettre en œuvre à l’occasion.
     
    – Seulement, il faudrait tout de même que j’aie une idée exacte de leur contenu, ne serait-ce que pour obtenir des fonds et faire qu’une action future puisse être intelligemment coordonnée, expliqua-t-il.
     
    On le crut et le faux royaliste fut conduit dans une maison bourgeoise où, derrière volets et portes clos, on lui permit de consulter le plan d’aide à la rébellion. Ces documents prouvèrent à Blaise de Fontsalte l’évidente duplicité des Anglais. Quelques mois après avoir signé la paix, alors que les citoyens britanniques circulaient librement en France, que des officiers supérieurs étaient reçus aux Tuileries par le Premier consul, les agents de Henry Addington – Premier ministre britannique qui avait négocié le traité d’Amiens – tentaient, en soutenant les contre-révolutionnaires suisses, d’empêcher la fondation d’une nouvelle Confédération amie de la France.
     
    Le baron des Atheux approuva hautement les dispositions prévues par Moore et toujours utilisables avec les aménagements que dicteraient les circonstances. Comme son hôte s’étonnait qu’il n’en prît pas copie, Blaise expliqua que sa mémoire était entraînée à tout retenir.
     
    – Je puis tomber aux mains de sbires à la solde de Bonaparte ou de Fouché. Ils pourraient lire des notes et même déchiffrer un code, mais ils ne pourront pas connaître ce qui est rangé dans ma mémoire, messieurs. Quant à vous, conservez ces papiers en lieu sûr. Je connais assez les agents français pour prédire qu’en cas de découverte vous seriez tous exécutés. La paix a été rompue avec l’Angleterre et, la Confédération helvétique étant l’alliée de la France, vous seriez considérés comme félons et traités conformément aux lois de la guerre.
     
    – Soyez sans crainte, Monsieur le Baron, ce portefeuille n’est même pas caché dans ma maison, mais déposé dans l’oratoire du couvent des capucins, en dehors de la ville. Et nous ne sommes que deux à connaître l’endroit exact, le père abbé et moi, souffla le fédéraliste.
     
    Blaise n’insista pas pour en savoir plus.
     
    – Je pars cet après-midi même pour Bâle. Attendez-vous à avoir de mes nouvelles avant deux mois d’ici, dit-il en prenant congé.
     

    Il se rendit aussitôt à l’auberge, fit seller Yorick, boucla ses sacoches et prit la route de Lucerne. Il chevaucha un moment puis, ayant repéré un endroit à l’écart de toute habitation, sur la rive du lac d’Uri, il mit pied à terre, s’allongea sur l’herbe, pour attendre la nuit en fumant sa pipe, se

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