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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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les Genevois restaient néanmoins partagés entre la joie de l’indépendance retrouvée et l’inquiétude. Si les citoyens réalistes souhaitaient voir Genève devenir un nouveau canton de la Confédération, d’autres tenaient à une république indépendante, sans se rendre compte de l’isolement préjudiciable dont souffrirait le nouvel État. La sagesse eût été de renouer les liens anciens entre Genève et les cantons afin que la cité pût s’agréger, sans rien perdre de son autonomie, à une confédération capable de se défendre et de prospérer. Les puissances qui avaient abattu le vrai fondateur de cette entité nationale exemplaire soutenaient les partisans de l’entrée de Genève dans la Confédération. Le baron Henri de Stein, grand seigneur libéral, artisan du redressement prussien – il avait aboli le servage des paysans, ouvert à toutes les classes de la société le droit de posséder de la terre et autorisé la création de municipalités élues – avait dit, en janvier 1814, aux membres d’une députation genevoise : « Il vous faut coller à la Suisse 2 . »
     
    Agrandir la Confédération par l’adjonction des cantons de Genève, du Valais, qui n’était plus département français du Simplon depuis le 24 décembre 1813, de Neuchâtel, qui avait cessé d’être principauté impériale : tel était le souhait des Suisses sensés.
     
    Charlotte Métaz ne pouvait révéler à personne, sauf à Flora, que c’était aussi le vœu de Blaise de Fontsalte et de ceux qui restaient fidèles à l’idée que Napoléon se faisait d’une Suisse indépendante, économiquement prospère et neutre, au milieu de l’Europe qui aurait dû s’inspirer d’une telle expérience.
     

    Le service des Affaires secrètes et des Reconnaissances déserté par les officiers et agents fidèles à l’empereur, qui refusaient de servir ceux qu’ils avaient combattus depuis quatorze ans, travaillait maintenant pour le nouveau régime sous la houlette des Alliés. L’activité de l’organisation, composée d’officiers émigrés, d’espions dévoués à Louis XVIII pendant son exil, plus quelques rares transfuges des bureaux impériaux, portait exclusivement sur la surveillance des bonapartistes susceptibles de comploter contre la monarchie. Les successeurs de Ribeyre et de Fontsalte avaient été fort déçus de ne trouver aux Tuileries que des dossiers vides, documentation et fichiers ayant été transportés en un lieu tenu secret.
     
    Bien que Napoléon eût abdiqué et se fût engagé à résider à l’île d’Elbe, quelques officiers, groupés autour du général Ribeyre, continuaient à servir les Bonaparte. Ils assuraient les liaisons, transportaient fonds et courrier, organisaient les déplacements clandestins, trouvaient des relais et des abris sûrs, s’efforçaient de repérer les espions que les Alliés tentaient d’introduire dans ce qui ressemblait fort à une nouvelle émigration.
     
    Chasseurs devenus gibier, les anciens des Affaires secrètes devaient se tenir sur le qui-vive, l’ennemi restant l’ennemi. Pour ces patriotes, la défaite de la France ne pouvait être qu’accidentelle et l’éviction de Napoléon provisoire. Quand l’aigle aurait repris des forces, il quitterait son aire de captif et chasserait de ses palais ceux que l’étranger y avait logés !
     
    Savary, en tant que ministre de la Police, avait longtemps supervisé le service des Affaires secrètes, du moins ce que l’état-major général voulait bien lui laisser voir. Il s’était retiré dans son château de Nainville après avoir accompagné, le 29 mars, avec une forte escorte de la Garde impériale, Marie-Louise, le roi de Rome et les Bonaparte dans leur fuite vers Blois, siège de la Régence. Mais c’était le général Ribeyre, recherché comme Fontsalte par les Autrichiens, les Prussiens et les Anglais, qui avait ensuite organisé, avec quelques fidèles, le départ de Louis et Jérôme Bonaparte, tandis que Blaise se chargeait, avec d’autres officiers, de faire passer Joseph en Suisse, par Nevers, Autun, Chalon-sur-Saône, Dole, Salins, Pontarlier et Les Verrières, où les fugitifs avaient franchi sans difficulté la frontière.
     
    L’impératrice Marie-Louise ayant refusé de suivre Joseph et Jérôme, ses beaux-frères avaient projeté de l’enlever avec le roi de Rome pour les conduire en Suisse après avoir fait sauter les ponts sur la Loire afin de protéger leur

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