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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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pour autant, Dorette. Un jour viendra où nous saurons tous deux si elle a été ou non sincère en parlant ainsi. En attendant, ne lui racontez rien de nos entretiens ni de mes déplacements. Hier, Trévotte a démasqué un homme qui tentait de se faire embaucher comme domestique chez le roi Joseph. Et c’était un Italien !
     
    Ce fut Blaise qui annonça à Charlotte, trois jours avant la publication de la nouvelle dans les journaux, la mort de l’impératrice Joséphine, le 29 mai, à Malmaison.
     
    – On dit qu’elle a pris froid en faisant une promenade en barque sur le lac de Saint-Cucufa avec le tsar, commenta le général.
     
    – Fin triste mais souveraine ! Aller au-devant de la mort en compagnie du tsar de toutes les Russies est digne d’une impératrice, dit Charlotte, sentimentale.
     
    – En réalité, Joséphine était souffrante depuis plusieurs semaines, une sorte de faiblesse, et les malheurs de l’empereur l’avaient beaucoup affectée. Me croirez-vous si je vous dis qu’elle voulait, au contraire de Marie-Louise, le rejoindre à l’île d’Elbe ?
     
    – Elle l’aimait donc tant ?
     
    – Je le crois. Et lui-même pensait souvent à elle. Combien de fois, aux Affaires secrètes, avons-nous été chargés de porter des lettres ou des cadeaux à Malmaison !
     
    – Mais que faisait-elle sur un lac avec celui qui a envoyé l’empereur à l’île d’Elbe ? demanda naïvement Charlotte.
     
    – Sans Alexandre, adversaire loyal et généreux vainqueur, l’empereur n’eût pas pu choisir son lieu d’exil. Le tsar a, croyez-moi, plus de considération pour la famille Bonaparte que pour les Bourbons. Il était vers le 15 mai en visite à Saint-Leu, chez la reine Hortense, et cette dernière avait demandé à sa mère de la rejoindre. Joséphine, bien que fatiguée, avait accepté le déplacement. Elle comptait qu’au cours de cette rencontre, qui n’était pas la première, elle obtiendrait enfin du tsar des assurances quant au sort futur de ses enfants, le prince Eugène de Beauharnais et Hortense, l’hôtesse du lieu.
     
    – Et que vont-ils devenir ? Le sait-on ?
     
    – Eugène est au mieux avec le tsar, qui l’a invité au congrès de Vienne, et il pourra vivre très tranquillement chez son beau-père, roi de Bavière. N’oubliez pas qu’il a fait six enfants à Augusta, la fille de ce rusé Max-Joseph ! Quant à Hortense, qui n’a jamais supporté de cohabiter avec son mari, le roi Louis, nous croyons savoir qu’elle n’eut pas besoin du charme de sa mère pour amadouer le tsar. Les siens, qui sont bien réels et, m’a-t-on assuré, assez accessibles, avaient sans doute suffi. Le Russe reconnaissant a réclamé au flasque Louis XVIII une forte pension pour la belle-sœur préférée de Napoléon ! C’est ainsi, Dorette, que les princes font payer leurs troussades par d’autres ! Et puis, Hortense hérite de sa mère le château de Pregny. Je ne donne pas six mois avant que Ribeyre vous y fasse inviter !
     

    Depuis qu’il habitait le château d’Allaman, sous le nom de comte de Survilliers, Joseph Bonaparte ne pensait qu’à se fixer sur cette rive bénie du Léman, où la paix semblait établie depuis le commencement des temps et à jamais.
     
    L’ex-roi d’Espagne, fort imbu de sa majesté passée, désirait acquérir Allaman, mais le comte de Sellon ne voulait pas vendre son château, fût-ce à une altesse exilée. Joseph avait, dès lors, chargé ses amis de trouver, entre Genève et Lausanne, une résidence digne de l’homme qui avait régné sur Naples et les Deux-Siciles, puis sur l’Espagne. Il voulait un château où il pût accueillir sa femme, née Julie Clary – sœur de Désirée, l’épouse de Bernadotte – et ses filles Zénaïde et Charlotte, respectivement âgées de treize et douze ans. Toutes trois attendaient son appel, retirées discrètement dans leur belle propriété de Mortefontaine, en compagnie de Désirée. Cette Méridionale devenue princesse nordique détestait la Suède et vivait le plus souvent à Auteuil sous le nom, assez flatteur pour la fille d’un marchand de savon marseillais, de comtesse de Gotland.
     
    Les soucis immobiliers de Joseph allaient se résoudre, le 9 juillet, quand le colonel suisse Charles Guiguer invita le comte de Survilliers à dîner au château de Prangins, situé près de Nyon. Cette belle résidence, sur un plateau dominant le lac d’une cinquantaine de mètres,

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