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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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pourriez même le conserver comme amant et…, si vous étiez moins conformiste, nous pourrions en user tous trois, nous deux et votre fille… Ça ne sortirait pas de la famille !
     
    Atterré par tant de cynisme, Axel attendait, serrant les poings, une réplique cinglante de sa maîtresse, mais seuls lui parvinrent des éclats de rire se faisant écho, mêlés, complices.
     
    – Je reconnais bien là votre sens de la famille ! lança enfin Elizabeth.
     
    – De la famille et… de l’économie, ma chère !
     
    De nouveaux rires ponctuèrent cette réplique et sir Christopher, poursuivant son chemin en lançant des « Ah, ah, ah ! » assez puissants pour faire tinter les pendeloques de cristal du grand lustre, quitta la maison. L’heure était venue, pour lui, d’aller, comme chaque jour, visiter les serres où il élevait des orchidées et s’entretenir avec les jeunes jardiniers qu’il ramenait de Londres.
     
    Le premier réflexe d’Axel fut de se précipiter chez Chantenoz, mais celui-ci passait la journée à Salisbury. Il décida alors que, dès le retour de son précepteur, il lui ferait part de la scandaleuse conversation qu’il venait de surprendre et le convaincrait de quitter au plus vite Pendlemoore.
     
    Meurtri, souffrant de la pire des salissures qu’il eût jamais imaginée, le garçon se contint jusqu’au dîner, n’attendant que le retour de son mentor pour réagir. Comme, à l’heure du coucher, Chantenoz n’était pas rentré, Axel regagna sa chambre et poussa le verrou de la porte. Ne le voyant pas arriver chez elle, Eliza ne manquerait pas de venir le relancer. Il n’eut pas à attendre longtemps et Mrs. Moore, étonnée de trouver close une porte toujours ouverte, agita le lourd loquet pour manifester son impatience.
     
    – Va-t’en ! Je te déteste. J’ai entendu, cet après-midi, ta conversation avec sir Christopher. Tu es une mauvaise femme et lui un…
     
    Eliza, atterrée, se fit aussitôt suppliante :
     
    – Quelle conversation ? Laisse-moi entrer, Axel. Tu n’as rien compris, tu interprètes mal ce que tu as entendu ou cru entendre ! Je t’en prie, il faut que je t’explique.
     
    Comme il demeurait silencieux, elle changea de ton :
     
    » Si tu n’ouvres pas, je fais un scandale. J’appelle… tout le monde… Janet aussi !
     
    Il ne lui restait qu’à céder. Axel ouvrit sa porte et laissa passer Eliza, pâle, le visage crispé par la colère. Il l’obligea à s’asseoir dans un fauteuil, loin de lui.
     
    – Je t’écoute. Qu’as-tu à dire ? Inutile de nier vos propos. Je vous ai entendus et bien entendus ! Veux-tu que je te les répète ?…
     
    Eliza renonça à tergiverser :
     
    – Mon mari est un malade, Axel. Je dois entrer dans son jeu. Quand il est en crise, il ne faut surtout pas le contredire. Un jour, à Vevey, tu m’as demandé pourquoi j’étais malheureuse. Maintenant, tu le sais. Christopher est un dépravé et un joueur, qui nous ruine. Tu es ma seule, et certes coupable, consolation. Mais c’est ainsi que…
     
    Elle n’acheva pas sa phrase et vint se jeter aux pieds d’Axel, lui entourant les jambes de ses bras en pleurant.
     
    – Relevez-vous, dit-il, gêné par l’humiliation que s’infligeait cette femme.
     
    Il refusait de croire à sa sincérité, d’où le voussoiement qui lui était revenu spontanément.
     
    – Et ce projet de mariage avec Janet, qui vous a tant amusés, sir Christopher et vous ?
     
    – Je veux te conserver, Axel. Je veux que tu restes avec moi… C’est une phrase en l’air, lancée comme ça dans mon désarroi… pour calmer mon mari… Je ne sais que faire, que dire, pour te convaincre, acheva-t-elle en allant s’asseoir sur le lit.
     
    Le déshabillé, seul vêtement que portait Eliza quand elle rejoignait Axel, s’était ouvert dans l’agitation du moment. Elle se soucia peu de couvrir son corps nu. Ses cheveux défaits croulaient sur son buste et, les mains posées à plat sur les genoux, elle prit l’humble attitude d’une coupable dans l’attente du jugement.
     
    – Demain, tout à l’heure, nous quitterons Pendlemoore avec Martin… et Janet. Nous irons à Londres, loin de ton mari, ordonna-t-il, sans trop savoir pourquoi.
     
    – Je ferai ce que tu voudras…, oui, partons demain ! C’est ça, partons ! Mais maintenant, viens, dit-elle, brusquement rassérénée, en lui tendant les bras.
     
    – Ah ! non ! Pas comme ça. Pas

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