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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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la Grande-Bretagne, observa gaiement Axel.
     
    – Et je ne parle pas des banquiers, des employés de commerce… et des militaires, qui servirent dans les troupes et la marine de Sa Très Gracieuse Majesté 1 .
     

    La saison de Londres s’étant achevée par un grand bal, comme elle avait commencé, les Moore et leurs invités prirent la route de Pendlemoore. Le domaine, situé au milieu des collines du Hampshire, entre Salisbury et New Forest, où Rufus, fils du Conquérant, avait péri d’une flèche reçue à la chasse – sans que l’on sût jamais s’il s’était agi d’un meurtre ou d’un accident – passait pour un des plus vastes du comté. Le château parut à Axel encore plus fabuleux par son hybridation architecturale que sur le tableau conservé à Londres. Le jeune garçon n’avait vu semblables bâtisses que dans les livres de contes de son enfance. On pouvait se perdre dans les galeries et corridors démesurés, les cloîtres obscurs et les dépendances de cette construction néogothique, agrandie de façon anarchique, au cours des siècles, par des propriétaires indifférents aux anachronismes et aussi peu soucieux de style que de confort. Seule une partie de Pendlemoore, aménagée pour plus de bien-être par lord Moore, restait habitable.
     
    Une rotonde dallée, immense et éclairée par une coupole dont les vitraux de verre coloré offraient à la lumière de l’été une palette élémentaire, tenait lieu d’entrée. Le rez-de-chaussée était occupé par une longue bibliothèque, où Chantenoz déclara vouloir passer ses jours et ses nuits, et, faisant face à ce sanctuaire, le cabinet de travail avec salon de lord Moore. Des armures, d’où les occupants de jadis semblaient s’être évaporés, abandonnant intact et figé leur habit de fer damasquiné, brandissaient, serrées dans leurs gantelets vides, des hallebardes effrayantes. Cette garde aveugle, montée par des fantômes, impressionna Axel et fit sourire son mentor.
     
    De part et d’autre du hall, un escalier à double révolution, pourvu d’énormes balustres, s’élevait vers les deux étages du château. Lord Moore, passant son bras sous celui d’Axel, conduisit le jeune Vaudois au centre de cet atrium prétentieux.
     
    – D’ici, vous pouvez avoir l’impression que ces escaliers symétriques desservent pareillement les paliers supérieurs. Eh bien ! c’est une aberration optique. Celui de gauche monte, sans qu’il y paraisse, directement au second et ne croise ni ne rencontre en aucun point celui de droite, qui s’interrompt au premier. Tout est astuce d’architecte et trompe-l’œil. C’est une invention d’un ancêtre misanthrope, qui ne voulait croiser personne dans son escalier, ni épouse, ni enfant, ni domestiques. J’ai conservé cette très commode disposition privée. J’habite le second… mais, quand l’envie vous prendra, mon jeune ami, et j’espère, je souhaite, je compte, qu’elle vous prendra, vous êtes autorisé à emprunter mon escalier à tout moment, dit, avec une extrême complaisance, Christopher Moore.
     
    L’emploi du temps d’Axel fut rapidement fixé. Le châtelain fit initier son invité à l’escrime par un maître d’armes employé dans tous les châteaux de la région et qui, deux fois par semaine, s’arrêtait à Pendlemoore pour tirer avec le baronet.
     
    – Savoir tenir une épée et s’en bien servir est indispensable à une époque où l’on vous manque facilement de respect, avait expliqué Christopher.
     
    Avec Janet, Axel apprit à monter des chevaux plus vifs et plus rapides que les percherons de M. Métaz. Les jeunes gens firent ensemble de grandes courses à travers la campagne, visitant les fermiers, sautant des haies afin de s’entraîner pour la chasse du renard, impatiemment attendue par tous dans le comté. Ils suivirent en barque les méandres d’une rivière bordée de saules, qui traversait le domaine et se perdait dans un étang poissonneux. Le Veveysan, habitué aux perches, ombles et feras de son lac, apprécia peu les carpes de Pendlemoore : aucune sauce ne pouvait masquer leur goût de vase !
     
    Les jours de pluie, Axel fréquentait la bibliothèque, avec une assiduité qui enchantait son précepteur. Martin se disait ébloui par les trésors alignés sur les rayons. Perché sur un escalier à plate-forme monté sur roues, il poussait des cris de Sioux quand il parvenait à extraire, de la poussière accumulée, un

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