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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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ne tenait pas à ce qu’il eût trop d’occasions de rencontrer, dans les rues de Lausanne, certain regard vairon qui lui eût immanquablement rappelé le sien !
     
    Les retrouvailles des amants furent plus affectueuses que passionnées. Avec l’âge – Blaise venait d’entrer dans sa trente-huitième année – l’officier semblait se dessécher, comme ces êtres habitués par les circonstances à vivre de peu. Maigre, noueux, mais plus alerte que jamais, il apparut à M me  Métaz, après trois années d’absence, comme un homme qui avait déposé définitivement les armes. Il avait rasé ses favoris et réduit sa moustache. Sa chevelure frisée, poivre et sel, atténuait seule maintenant la dureté de ses traits, que soulignaient le hâle et les rides. On remarquait plus qu’autrefois son regard bicolore. Après l’avoir tenue à bout de bras et examinée avec douceur, Blaise trouva Dorette « grassouillette comme une caille et moelleuse comme un beignet ». Charlotte voulut ensuite tout connaître de l’Amérique, de la vie qu’y menaient les proscrits et aussi quelle était la noble cause qui lui ramenait son amant.
     
    – J’accomplis ma dernière mission pour les Bonaparte, après quoi je m’installe à Fontsalte, car ma vieille maman veut se retirer, pour finir ses jours, dans le couvent que dirige maintenant ma sœur. De là, je viendrai souvent à Lausanne, dès que l’exploitation de notre source thermale sera mieux organisée, ce qui devrait, avec ma demi-solde de général – une gracieuseté de Louis XVIII – me permettre de vivre, sinon dans l’opulence, du moins dans un confort relatif.
     
    Charlotte applaudit à ce programme, imaginant déjà, alors que Guillaume s’absentait de plus en plus souvent pour ses affaires, une sorte d’existence néoconjugale avec Blaise.
     
    Le général devait en réalité assumer deux missions. Une avouable, l’autre qui l’était moins. La première consistait, à la demande de l’épouse de Joseph Bonaparte qui n’avait pas voulu rejoindre son mari en Amérique, à stimuler l’homme d’affaires chargé de la vente du château de Prangins. Julie et ses filles, Zénaïde et Charlotte, vivaient assez chichement à Francfort et avaient besoin d’argent. L’ex-reine d’Espagne en était déjà réduite à vendre ses bijoux. Elle cherchait à négocier un collier de diamants d’une valeur de quatre cent mille francs et, aussi, une épée de son mari dont la poignée, sertie de pierres précieuses, était estimée à deux cent quarante mille francs.
     
    La seconde mission de Blaise consistait officiellement à protéger, mais en fait à surveiller, Joseph-Louis Mailliard, secrétaire du roi Joseph, que ce dernier avait délégué à Prangins pour déterrer les caisses enfouies dans le parc en 1815 et rapporter leur contenu aux États-Unis. En priorité, les diamants qui seraient placés dans une ceinture spécialement confectionnée pour le secrétaire. Joseph, qui menait à Point Breeze, sur les rives de la Delaware, un train princier, avait, lui aussi, besoin d’argent. Les sacs de pierres précieuses cachés dans le parc de Prangins et, même, certaines correspondances diplomatiques, confiées par Napoléon à son frère et pareillement enterrées sur les bord du Léman, constitueraient des produits négociables.
     
    Mailliard avait quitté les États-Unis le 16 août 1817 pour débarquer en Angleterre. De là, il s’était rendu auprès de la reine Julie avant de passer en Suisse où il avait rencontré, à Prangins, M. Vérat, administrateur des biens de Joseph.
     
    À la veille du jour de l’An 1818, Blaise de Fontsalte, avant de partir pour son Forez natal, ses missions terminées, omit de donner à Dorette certains détails. La récupération du trésor du roi Joseph, effectuée au cours de la nuit du 25 au 26 décembre par Mailliard, qui se faisait passer pour géologue, n’ayant généré aucune mauvaise surprise, un procès-verbal avait été signé à Nyon lors de l’ouverture des caisses par deux témoins de confiance.
     
    En revanche, personne n’avait pu voir le général Fontsalte récupérer, la nuit suivante, dans le parc désert de Prangins, un trésor dont il était seul à connaître l’existence et la cachette, sous la margelle d’une fontaine. Les trois sachets de diamants dérobés et enfouis en 1815 par un domestique indélicat, mort sans avoir pu profiter de son larcin, devinrent ainsi,

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