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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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et au commerce du canton, en compliquant les rapports avec l’étranger, quand elle ne les supprimait pas complètement. Le gouvernement français n’avait-il pas interdit toute relation commerciale de la Suisse avec l’Angleterre, gros client des horlogers genevois ?
     
    Le pays de Vaud, qui ne produisait pas que du vin et possédait, avec Vevey, un centre d’échanges important, n’avait donc rien à gagner et tout à perdre d’un nouveau conflit européen. Déjà, la Révolution avait porté un coup sérieux à l’activité industrielle développée au long des deux biefs de la Veveyse, la Monneresse de la rive droite et celle de la rive gauche. Ces deux canaux à ciel ouvert fournissaient, depuis le xiii e  siècle, l’énergie hydraulique, d’abord aux moulins, plus tard aux tanneries, mégisseries, fabriques de bas, de peignes, de dentelles, forges, armureries, marbreries et chocolateries. Depuis que la République helvétique avait mis fin au protectionnisme organisé par Leurs Excellences de Berne, les industriels veveysans souffraient de la concurrence des autres villes suisses.
     
    Ainsi, à la fin du xviii e  siècle, sur les trois mille trois cents habitants de Vevey, plus de quatre cents travaillaient, à domicile, à la fabrication des pièces de mouvement pour les horlogers de Genève. Devenus moins nombreux, du fait du développement de l’industrie horlogère du Jura et de Neuchâtel, ils s’étaient fait, pour survivre, une spécialité de la confection des cadrans, boîtiers de montres et de la décoration des boîtes à musique, dont Sainte-Croix détenait le monopole. Certains, débrouillards, réussissaient encore à vendre, en contrebande, leur production aux horlogers étrangers, mais la plupart des artisans veveysans végétaient. Le nombre des fabricants de peignes en os était passé de six à trois, la disparition des débouchés de la Savoie et du Piémont ayant sensiblement réduit la demande. Les tanneries, dont celle d’Henri Brun, fondée en 1738, traitaient encore, bon an mal an, trois ou quatre mille peaux de mouton, de veau, de chevreau et la fabrique de gants employait une cinquantaine d’ouvriers, mais plusieurs ateliers de maroquinerie avaient dû fermer. Les cordiers fournissaient toujours en cordages les bateliers du lac, mais les exportations de ficelle et de corde, autrefois fort rentables, s’amenuisaient. En revanche, la fabrique de colle à bois, qui approvisionnait non seulement les ébénistes de la région, mais ceux des grandes villes, Genève et Lyon, était encore prospère, comme la fabrique d’étoffe créée par la municipalité de Vevey pour assurer des fonds à la caisse de secours publics. Les étoffes communales, marquées aux armes de la ville, continuaient d’être partout appréciées pour leur moelleux et leur solidité.
     
    – Nous espérons tous que le Premier consul saura rendre la paix à l’Europe et que nous pourrons bientôt reprendre les affaires d’un État à l’autre, sans entraves ni restrictions, conclut M me  Métaz.
     
    Fontsalte eut ainsi une aimable illustration de ce que pouvaient être la naïveté politique d’une femme, l’égoïsme bourgeois et l’arrière-plan affairiste du neutralisme helvétique.
     
    Simon Blanchod, tout en approuvant le dire de Charlotte Métaz, voulut montrer que les soucis des Vaudois ne se limitaient pas à des préoccupations mercantiles. Républicain libéral, grand lecteur de Jean-Jacques Rousseau, il avait toujours su, au cours des périodes troublées, faire preuve de modération et de tolérance. Il ne craignait pas de qualifier de simagrées les mouvements révolutionnaires vaudois et condamnait la démagogie comme la violence.
     
    – Je reproche à vos consuls, au premier d’entre eux surtout, dont j’approuve la volonté qu’il a de remettre de l’ordre en France, les restrictions apportées à la liberté des citoyens : suppression des journaux royalistes de Paris, répression sanguinaire de la chouannerie, représailles contre les familles des émigrés. Je suis huguenot, monsieur l’officier, et j’admets le progrès des sciences, tout en pensant que Dieu saura bien mettre un frein à l’appétit de connaissance des hommes, quand il le jugera nécessaire. La mésaventure biblique d’Adam et Ève est là pour le prouver, n’est-ce pas ?
     
    Fontsalte allait répondre que la République comptait encore des ennemis et que toute faiblesse du nouveau

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