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Herge fils de Tintin

Herge fils de Tintin

Titel: Herge fils de Tintin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoit Peeters
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d’accorder sa confiance à quelqu’un.
Autant il aime dialoguer, surtout en tête à tête, autant il
déteste le bavardage, les festivités et les mondanités. À cet
égard, vivre à Bruxelles l’arrange, car il n’est jamais très à
l’aise à Paris.
    Depuis qu’il vit avec Fanny, Hergé prend des vacances.
Souvent au mois de septembre, pour être loin de ces
foules qu’il abomine. Parfois, c’est un simple moment de
détente, au bord de l’eau et au soleil ; d’autres fois, de
longues marches en Ardenne. Quel que soit le temps, il
apprécie ce contact avec la nature. Il continue d’affectionner la Suisse et est souvent retourné avec Fanny sur les
bords du lac Léman, chez ses amis Charlie et Lise Fornara.
    Alors qu’il n’a longtemps voyagé que par les livres et
l’imagination, il accepte maintenant de partir pour des
destinations lointaines. Comme le raconte Fanny : « Le
premier grand voyage qu’on a fait, aux États-Unis, c’était
au départ pour des raisons de santé. Et moi je lui ai dit
qu’on allait en profiter pour aller visiter tout une série
d’endroits : Chicago, New York, Washington, Las Vegas,
Los Angeles. Il trouvait que j’étais folle. Mais une fois
qu’on était sur place, il était absolument ravi et il aurait
voulu prolonger le voyage 4 . »
    C’est au cours de ce premier voyage en Amérique que
Hergé va se rendre dans une réserve indienne, avec une
lettre de recommandation du père Gall. Mais il tombe à
un mauvais moment et est horriblement déçu. « Un
Indien qui a perdu sa tradition est exposé sans défense à
ce qu’il y a de pire dans la société blanche », commentait
le père Gall. « Lorsque Hergé est revenu me voir, il ne m’a
pas parlé de sa déception, il était trop délicat, il croyait me
faire de la peine 5 … »
     
    L’écrivain Gabriel Matzneff, que Hergé a rencontré
pour la première fois en 1964, puis revu régulièrement,
lui voue une immense admiration : l’auteur de Tintin ,
écrira-t-il, fut pour lui « comme un père spirituel » qu’il a
aimé « plus que son père par le sang ». Le Hergé qu’il
décrit est bien différent de l’homme assez dur qu’il était
dans les années cinquante :
« Je suis venu très tard à la lucidité », déclarait-il modestement. Sans doute, disant cela, songeait-il à sa vie privée, à sa
rencontre avec Fanny, à son affranchissement du carcan catholique et droitier qui, jusqu’alors, l’avait subjugué. J’ignorecomment était Hergé « avant Fanny », l’ayant toujours
connu avec elle. En revanche, j’atteste que chaque fois que je
rencontrais le délicieux couple qu’ils formaient, je me sentais
pacifié, en harmonie avec le monde et avec moi-même.
Hergé m’a incité à lire Carl Gustav Jung, le Tao et Alan
Watts, mais c’est par son comportement dans la vie, sa
manière d’être, bien plus que par ses conseils de lecture qu’il
aura été pour moi un modèle, un ami rare 6 .
    Les liens d’Hergé avec son ancien milieu ne sont pas
tout à fait rompus pour autant. Paul Jamin, redevenu un
caricaturiste à succès sous le pseudonyme d’Alidor,
continue de faire partie de son entourage proche. Et
lorsque l’auteur de Tintin doit se rendre à Paris, il en profite pour revoir de vieilles connaissances, comme Raymond De Becker ou Félicien Marceau. Quand il en a la
possibilité, il va même jusqu’à Marly-le-Roi où vivent
plusieurs anciens collaborateurs comme Paul Werrie et
surtout Robert et Germaine Poulet, avec lesquels les
contacts se maintiendront jusqu’à la fin :
Il nous apportait, quand il venait nous voir avec sa jeune
femme, outre les signes d’une affection profonde et fidèle, un
peu de cette humeur truculente, mystificatrice, que les
Bruxellois appellent la « zwanze », purgée chez lui de toute
vulgarité, car il avait une sensibilité d’aristocrate 7 .
    Au début des années soixante, l’un de ses rêves remonte
à la surface : celui de la peinture. Hergé ne veut pas faire
les choses à moitié. Il demande à Louis Van Lint, un
peintre lyrique abstrait, « d’une honnêteté rigoureuse
dans ses jugements 8  », de lui enseigner les bases de son
art.
    D’abord sous sa direction, puis seul, Hergé va peindre
trente-sept toiles, presque toutes abstraites, où l’on peut
reconnaître l’influence de Miró et de Poliakoff, deux
artistes auxquels il voue alors une très grande admiration,
ainsi que celle de Van Lint lui-même. Ces

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