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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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pensée de l'instabilité commune, un pressentiment vague qu'elle aussi, un coup la frapperait? Elle était dans un moment grave. S'il faut le dire, elle était grosse.
    Elle l'était d'environ sept semaines (sans nul doute du mois de juillet).
    Pendant son mariage, elle n'avait jamais pu amener à bien une grossesse. Celle-ci, inattendue, fortuite, devait l'inquiéter.
    Cet état de péril, de honte, de gêne constante, pouvait avoir mauvaise fin. Et en effet, elle accouche en avril, meurt en juillet, presque à l'anniversaire du premier jour de sa grossesse.
    En Espagne, à Sceaux, en Europe, on crut, on assura que, si Riom y fut pour quelque chose, il n'y fut qu'en second. Non-seulement les ennemis, mais les indifférents, les impartiaux (Du Hautchamp par exemple, écrivain financier nullement hostile au Régent), soutinrent cette chose bizarre que, tout en s'obstinant au mariage qui devait amender sa vie, elle avait des rechutes vers son vice d'enfance, sa dépravation presque innée. En rapprochant les dates, on voit par son accouchement d'avril 1719 qu'elle devint enceinte aux fêtes de Saint-Cloud en juillet 1718, à ce triomphe de famille. Orléans, alors assuré, garanti par Stanhope, lui parut déjà sur le trône, arbitre de la paix du monde. Au même mois il eut en main tous les fils de l'intrigue de la duchesse du Maine, pour la perdre quand il voudrait. Joie violente pour la fille du Régent. Unique confidente, comme toujours, possédée de ce grand secret qu'il lui fallut garder longtemps,elle dut, dans l'orgie furieuse, s'en dédommager à huis-clos.
    Une grossesse ne pouvait alors que nuire à Riom. Il devait peu la désirer. Un tel éclat (qui devait surtout exaspérer Madame), n'allait à moins qu'à briser tout. Il était bien dirigé par sa maîtresse, la Mouchy, qu'il aimait mieux que la princesse. Il n'était pas aveugle, voulait avant tout fixer la fortune. Il gouvernait en maître, en mari. Cela suffisait.
    Riom n'avait ni esprit, ni grâce, ni même agrément de jeunesse. Il avait l'air malsain. C'était un amant un peu ancien pour une personne si mobile. Et, bien pis, c'était un mari. Il en avait déjà les honneurs, les déboires, les ridicules aussi.
    Elle faisait la reine, la régente, sans souci de lui. Elle porta sa maison jusqu'à huit cents domestiques et officiers de toute sorte.
    Elle accepta chez les Condés, à Chantilly, une fête babylonienne où l'on semblait célébrer son avènement; trente mille flambeaux éclairaient la forêt ( Manuscrit Buvat ).
    Au Luxembourg, elle se fit un trône élevé de trois marches, où elle voulait que les ambassadeurs vinssent à ses pieds recevoir audience, selon l'étiquette des reines régnantes. C'était démasquer, afficher violemment la situation, faire trop visiblement de Riom un mannequin.
    À en croire Du Hautchamp, dans un souper, on se gêna si peu qu'il éclata avec fureur. Ni lui ni le Régent ne se souvinrent plus des distances. Ces scènes violentes et dégradantes expliquent peut-être l'apoplexieque le Régent eut en septembre ( Manuscrit Buvat ). Avis sinistre que donnait la nature. D'autant plus entraînés, poursuivant leur destin, ils semblaient le braver et courir au-devant, dans ce chemin fatal qui était celui de la mort. [Retour à la Table des Matières]
CHAPITRE VII
LE ROI BANQUIER—CONSPIRATION ET GUERRE—ŒDIPE
Novembre-Décembre 1718.
    La furie du plaisir fit chez nous la furie du jeu. Le déficit, la banqueroute, que dis-je? la faim même n'eût pas suffi pour faire d'une France de gentilshommes une France d'agioteurs.
    On ne peut dire assez combien elle était sobre, cette ancienne France, combien elle portait gaiement les souffrances, les privations. La vie riche d'alors nous semblerait très-dure. On avait du luxe et des arts, mais aucune idée du confort, de ses mille dépenses variées qui, aujourd'hui, nous rendent si soucieux et font tant rechercher l'argent. Au plus galant hôtel, on campait en sauvages. Nulle précaution. Peu de chauffage. La dame avait des glaces et des Watteau aux derniers cabinets, mais passait son hiver entre des paravents, comme l'oiseau niché sous la feuillée.
    À tout cela peu de difficulté. Mais régler ses dépenses, mais mourir au plaisir, vivre de la vie janséniste, c'est ce qui ne se pouvait pas. À peine on avait eu le temps de mettre le vieux siècle à Saint-Denis, à peine on commençait d'entrer dans l'échappée des libertés nouvelles, et déjà brusquement on

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