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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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coup hardipour faire sauter la Banque et chavirer la Bourse. Ils avaient juste à point gagné le premier des agents de Law, l'oracle de la place, qui jusque-là avait poussé la hausse, et tout à coup précipita la baisse.
    Un mot du personnage, Vincent. C'était un homme fort douteux, moitié agioteur, moitié accapareur de vivres. Il avait eu plus d'une fois de petites affaires avec la justice, souvent arrêté, toujours relâché. On ne pouvait pas s'en passer. Les plus mauvais papiers devenaient bons, lorsqu'il les soutenait. Dès qu'il paraissait, chacun regardait s'il était triste ou gai; on achetait, on vendait au froncement de son sourcil.
    Law, au début, avait été heureux de trouver un tel instrument. En mai, par dix agents de change dont chacun avait dix courtiers, Vincent souffla la hausse. Law employait aussi des hommes moins connus à qui la Banque même prêtait de quoi jouer. L'un d'eux, André, gagna à ce métier, en trois mois, trente millions. Cela déplut fort à Vincent, qui d'ailleurs, comme accapareur et enchérisseur de denrées, était gêné par les projets de Law. Il tourna, et le jour même où la cabale vint d'ensemble à la Banque avec un torrent de billets enlever l'or, Vincent donna à la Bourse le surprenant spectacle de sa désertion. Vrai poignard pour égorger Law. Son Vincent, le vaillant Vincent, le héros de la hausse, lâche pied au fort du combat; il est pâle, il a peur; il crie le Sauve qui peut!
    La farce était jouée, la panique opérée. On courait à la Banque; chacun, et à l'heure même, exigeait d'être remboursé. Le 25, au matin, Law tira unearme cachée qu'on n'avait pas prévue, et qui mit tout en fuite. Il frappa ses ennemis d'une mesure trop ordinaire alors et dont eux-mêmes récemment (sous d'Argenson) avaient donné l'exemple. Par arrêt du Conseil, l'or tombe, le louis vaudra un franc de moins. Les amateurs de monnaie forte, qui enlevaient l'or de la Banque, n'en veulent plus, s'enfuient.
    On croit que Law est fort. «Il a des reins. Soutenu tellement d'en haut, qui l'empêche un matin de s'adjuger les Fermes, et dès lors de fonder son Mississipi sur la France même?» On commence à gager pour lui. On rougit d'avoir craint. L'élan revient; un poétique éclair a passé sur la Bourse, l'amour et la foi du papier.
    Le papier monnaie immuable (qualifié ainsi par Arrêt), vainqueur du vil métal, variable et capricieux. Qui se fierait à l'or? Altéré et changeant à toute crise, haussé, baissé, sans caractère, sans consistance ni tenue, il semble un piége à faire des dupes. C'est l'objet du mépris, de la haine. Il est conspué. On vit, rue Quincampoix, un créancier tirer l'épée contre le débiteur perfide qui voulait le payer en or. [Retour à la Table des Matières]
CHAPITRE XI
LA BOURSE—LES MISSISSIPIENS
Août-Septembre 1719
    Nous avons faiblement marqué le péril qu'avait couru Law. Mais il était accru par son triomphe même. Son danger financier devint un danger politique. Les Anglais, furieux d'avoir manqué le coup de Bourse, se découvrirent brutalement par leur ambassadeur, l'enragé Stairs, menacèrent le Régent.
    Reprenons la situation.
    Dans la hausse rapide, impétueuse, qui se fit, Law fut emporté dans les airs comme un ballon sans lest, ou l'homme qu'une trombe eût pris en plaine, soulevé, pour l'asseoir à la pointe de la flèche de Strasbourg.
    Il avait stupéfié, plus que vaincu, ses ennemis. Ils n'étaient pas moins là, campés autour de lui, pour le ruiner, le démolir. Armée serrée, compacte. Avec les Duverney, les meneurs de la baisse, marchaient toute la Maltôte, les Fermiers généraux, leurs cent mille gabeleux , rats de cave, huissiers et recors. À ce corps régulier ajoutez les troupes légères, les associés, intéressés, les accapareurs, fournisseurs, leurs agents, employés, mangeurs, rongeurs de toute espèce.
    Law n'était pas myope. Il voyait, pour comble d'effroi, sous ses pieds mêmes et sous sa base unique, je veux dire auprès du Régent, Stairs qui montrait le poing, et son compère Dubois, qui minait et sapait. Dubois avait eu du faible pour Law et pour sa caisse; mais ce grand citoyen savait dominer ses faiblesses. Ministre et bientôt cardinal par la grâce de l'Angleterre, il en avait, dit-on, de plus une petite pension d'un million.
    Le Régent, si Anglais, était-il sûr pour Law? Était-ce un homme encore? À en croire ses maîtresses, c'était l'homme de neige au dégel.
    Contre

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