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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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alliés de la veille, leurs adversaires d’aujourd’hui, et ils avaient montré qu’ils n’avaient pas les moyens d’exécuter leur menace. Un mois après l’ouverture de la Convention, leur cause était déjà perdue. Les Jacobins, qui avaient commencé par se défendre, prenaient l’offensive. Accusés de meurtre et d’anarchie, ils accusèrent à leur tour. L’accusation qu’ils avaient encourue était capitale. Leur riposte, pour les sauver, devait l’être aussi. L’accusation qu’ils lancèrent était celle dont les Girondins s’étaient servis contre les ministres constitutionnels et contre la royauté : trahison, incivisme, complicité avec les contre-révolutionnaires. La Gironde avait inventé le « comité autrichien ». Sur de semblables apparences, on imagina contre eux le crime de fédéralisme, d’attentat à la République une et indivisible. Ainsi, en tout, les Jacobins manœuvraient la Gironde, la tenaient par sa peur de ne pas sembler assez républicaine, la repoussaient de position en position. La mise en accusation de Robespierre avait été manquée. La riposte des Jacobins fut la mise en jugement de Louis XVI. Le régicide serait l’épreuve de toutes les sincérités républicaines. Tombés dans ce piège, les Girondins n’en sortirent pas. Ils avaient condamné les effusions de sang ; ils étaient mis en demeure de faire tomber la tête du roi ou de se rendre suspects. Ils n’évitèrent ni l’un ni l’autre. Répugnant au crime, ils proposèrent l’appel au peuple en guise d’échappatoire. Aussitôt la rue, les sections, les tribunes menacèrent la Convention qui céda à la même pression que les précédentes Assemblées. Elle repoussa l’appel au peuple. Sur la mort, les Girondins en déroute se divisèrent. La direction leur échappait. Ils n’étaient même plus un parti. La mort sans sursis, enjeu de cette bataille pour le pouvoir, fut votée par 361 voix sur 721 députés présents. Le duc d’Orléans, conventionnel de gauche sous le nom de Philippe-Égalité, la vota avec la Montagne. Mais déjà le régicide lui-même ne pouvait plus sauver personne. La guillotine était en permanence sur la place de la Révolution.
    La déclamation de ce temps-là a laissé croire que la Convention avait lancé à l’Europe la tête du roi comme un défi. Le 21 janvier 1793, jour de l’exécution de Louis XVI, l’Autriche, la Prusse et la Russie étaient occupées à partager la Pologne. L’émotion dans les cours ne fut pas plus grande qu’elle ne l’avait été après l’exécution de Charles ler. À la vérité, son défi le plus grave, la Révolution l’avait déjà jeté, et à qui ? À l’Angleterre. Et ce n’était pas la tête du roi.
    On s’est demandé souvent comment la Révolution était devenue conquérante et l’on a donné beaucoup d’explications qui contiennent une part de vérité. L’esprit de propagande, de croisade révolutionnaire, la tradition des frontières naturelles, le souvenir, resté si puissant, de la politique de Richelieu et de la lutte nationale contre la maison d’Autriche : ces éléments de la vie morale du peuple français ont contribué pour une large part à rendre la Révolution guerrière et à lui donner des motifs d’annexer des peuples sous prétexte de les libérer. Cependant, si nouveaux qu’ils fussent dans les affaires, les Conventionnels n’ignoraient pas tous les grandes lois de la politique européenne. Ils tenaient à la neutralité de l’Angleterre et il était une chose que jamais l’Angleterre ne devait permettre : c’était que la France fût maîtresse des Pays-Bas. Pourquoi avaient-ils accepté les plans de Dumouriez sur la Belgique, que la victoire de Jemmapes venait de lui ouvrir ? Ici, il faut se rappeler que la Révolution tombait chaque jour plus bas dans la détresse financière, qu’elle était écrasée sous le flot des assignats. Les conquêtes furent un espoir. Puisque nos armées, où Dumouriez rétablissait la discipline, avaient délivré la République de l’invasion, pourquoi ne la délivreraient-elles pas de la pauvreté ? Il fallait à tout prix sortir d’une impasse, trouver, disait Cambon, « un moyen d’écoulement pour diminuer la masse des assignats circulant en France » et « augmenter le crédit de ces assignats » par l’hypothèque que fourniront les biens mis sous la garde de la République ». Pour une très large part, cette nécessité

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