Histoire de France
d’Alençon reçut un apanage. Les Montmorency reprirent leurs charges. Les protestants obtinrent le libre exercice de leur culte, sans restriction d’aucune sorte, des places de sûreté, des sièges dans les Parlements, tout ce qu’ils demandaient, depuis un quart de siècle, les armes à la main, plus un désaveu de la Saint-Barthélemy, une vraie amende honorable, quatre ans après la célèbre journée. Encore une fois, la monarchie cherchait un accord avec le parti protestant.
Chez les catholiques, la réponse ne tarda pas, et elle fut violente. C’est alors que naquit la Ligue que pressentait Charles IX et dont la crainte l’avait déterminé, la veille de la Saint-Barthélemy. À l’exemple des protestants qui avaient levé des armées, formé un gouvernement, dressé un État contre l’État, les catholiques constituèrent à leur tour une association politique. Le mouvement partit de Picardie, dont les habitants refusaient de laisser Péronne comme place de sûreté aux huguenots, mais l’idée s’en était déjà répandue sur beaucoup de points lorsque le manifeste de la « Sainte-Union » fut lancé par Henri de Guise. Le Balafré (il venait d’être blessé au visage en combattant les reîtres) était aussi populaire que son père l’avait été. La situation qui s’était vue sous les règnes précédents avec le duc François se reproduisait : le parti catholique aurait un chef politique plus puissant que le roi lui-même.
Le manifeste d’Henri de Guise n’était pas expressément dirigé contre la monarchie. Mais il contenait déjà des indications inquiétantes. On y demandait pour les « provinces de ce royaume » le rétablissement des « droits, prééminences, franchises et libertés anciennes, telles qu’elles étaient du temps du roi Clovis, premier roi chrétien, et encore meilleures, plus profitables, si elles se peuvent inventer ». Ce bizarre souci d’archaïsme et de tradition, cachait, disait-on, la grande idée des Guise, qui prétendaient descendre de Charlemagne et qui voulaient se faire rois. En tout cas la Ligue, à peine constituée, montra sa force. Henri III s’empressa de la reconnaître et de se mettre à sa tête pour ne pas être débordé. Il était difficile de gouverner dans des conditions pareilles et la monarchie, par ses oscillations, trahissait sa faiblesse. Dans son perpétuel effort pour maintenir l’équilibre, elle suivait les impulsions et ne les donnait pas. Elle n’avait même plus d’argent pour les dépenses les plus nécessaires ni autorité pour en avoir. Afin d’obtenir les ressources indispensables, des états généraux, où la Ligue ne fit élire que des catholiques, furent tenus à Blois en 1576. Ils s’achevèrent dans la confusion de vœux et de votes contradictoires, tant sur la question de religion que sur celle des subsides. Henri de Guise n’en sortait pas vainqueur, mais le roi en sortit bien diminué.
De cette date jusqu’à 1585, le gouvernement vécut au jour le jour dans un affaiblissement extrême. L’année d’après les états de Blois, Henri III tenta un coup d’autorité et prononça la dissolution de toutes les ligues, protestantes aussi bien que catholiques. Ce fut en vain. Les moyens d’être obéi lui manquaient. Beaucoup de gens crurent alors la royauté près de la fin. C’est à peine si le roi était en sûreté dans son Louvre et sa cour ressemblait à celle d’un petit prince d’Italie entouré de complots et d’assassinats. Il lui fallait à son service, pour le protéger, des spadassins, qu’on appela les mignons et qui furent ensuite les Quarante-Cinq. Conseillé par sa mère, il essaya, pour durer, toutes les recettes de Catherine de Médicis et même celles de Charles IX, l’entente avec Élisabeth d’Angleterre et la diversion extérieure par une campagne aux Pays-Bas. L’expédition réussit mal et c’est après l’échec d’Anvers que mourut le duc d’Alençon, quatrième fils d’Henri II. Dès lors, Henri de Bourbon qui, depuis longtemps, s’était échappé de Paris et qui était retourné au calvinisme, devenait, de toute certitude, l’héritier du trône. Ce fut pour les Guise l’occasion de ranimer la Ligue en excitant les catholiques contre Henri III qui voulait laisser sa couronne à un protestant et imposer un « roi hérétique » à la France.
La Ligue, qui eut à Paris son foyer le plus ardent, était une minorité, mais une minorité active et
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