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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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sentiments, lui représenta qu’il mettait la monarchie en danger, que Coligny l’entraînait à sa perte, que si les Guise prenaient la direction de la réaction catholique qui s’annonçait, ils deviendraient les maîtres de l’État. L’unique ressource était de les devancer et de frapper lu, parti protestant à la tête.
    La Saint-Barthélemy fut ainsi bien moins l’effet du fanatisme que la conséquence de la politique de bascule et de la politique de ménagements. Le roi, pour avoir penché du côté de Coligny, était dans une impasse. Les protestants étaient installés au Louvre avec son beau-frère. Comment les renvoyer ? Mais s’il continuait à gouverner avec Coligny, une révolution pouvait les renverser tous les deux. Chasser Coligny ? Autre perplexité. C’était aussi chasser Henri de Bourbon à qui le roi venait de donner sa sœur. C’était désavouer ce mariage qui avait coûté tant de peine, suscité tant d’opposition, et qui avait tant d’importance pour l’avenir du trône. Cependant un coup d’État des Guise, qui avaient refusé de quitter Paris et que la population approuvait, était imminent.
    Les deux journées qui précédèrent le 24 août 1572 furent remplies par des conseils orageux où furent exprimés les avis les plus divers. Le plus curieux, celui qui peint le mieux la situation, fut donné par Catherine de Médicis qui songeait à laisser le champ libre aux Lorrains, comme on appelait les Guise, pour se retourner contre eux quand ils auraient décapité le parti calviniste. Ainsi la monarchie n’eût pas trempé dans la sanglante affaire et elle eût été affranchie de tous les grands, de tous les chefs, catholiques et protestants. Ce plan parut compliqué, dangereux, incertain, capable de donner aux Guise une autorité qu’il eût été difficile de leur reprendre ensuite. D’ailleurs le temps pressait. Il fallait se décider. Il fallait agir. On savait que les huguenots allaient venir en corps accuser les Guise devant le roi. Charles IX se vit entre deux périls et ses dernières hésitations furent vaincues.
    Loin qu’il y ait eu préméditation dans la Saint-Barthélemy, on y distingue au contraire l’effet d’une sorte de panique. Les objections du roi étaient celles d’un homme qui ne voit que dangers à tous les partis qu’on lui soumet. Un autre trait révélateur c’est que Charles IX commença à se décider lorsque Gondi lui eut suggéré que le roi pourrait dire à la France : « Messieurs de Guise et de Châtillon se sont battus. Je m’en lave les mains. » Ce n’était pas héroïque, mais cette anxiété, cette prudence, ce soin de se couvrir de tous les côtés montrent que Charles IX avait le sentiment que le sort de la monarchie et de l’État se jouait. Michelet convient que, dans le conseil royal, l’hypothèse qui parut la plus redoutable (et elle se réalisera plus tard avec la Ligue) fut celle où un grand parti catholique s’organiserait et se dresserait contre la monarchie compromise avec le parti protestant. L’expérience devait prouver que la raison était forte. Par elle se décida le coup.
    Il n’y eut pas besoin qu’on excitât Paris. Non seulement Coligny et les chefs, mais tous les protestants furent massacrés avec une fureur enthousiaste. Paris avait de vieilles rancunes, à la fois religieuses et politiques. Le petit commerce parisien reprochait aux huguenots de faire du tort aux « affaires » par leurs guerres civiles. Jusque dans le Louvre, on tua les gentilshommes protestants, et il y avait parmi eux les plus beaux noms de France. Charles IX eut peine à sauver son beau-frère et Condé, qu’il voulait épargner, non seulement par sentiment de famille, mais aussi pour garder quelqu’un à opposer aux Guise. Le vrai sens de la fameuse journée est là. Plus tard, dans ses Considérations sur les coups d’État, Gabriel Naudé écrira que celui de 1572 était resté « incomplet » parce que les princes lorrains n’avaient pas subi le même sort que les Châtillon.
    Avec passion, les provinces avaient suivi l’exemple de Paris. Un peu partout les protestants furent tués en masse, comme si les catholiques n’eussent attendu que ce signal et l’autorité intervint pour modérer cette ardeur plutôt que pour exciter au massacre. L’effet de terreur fut profond sur les calvinistes. Beaucoup abjurèrent, surtout les gentilshommes, les grands bourgeois, à l’exemple d’Henri de Bourbon, qui, une

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