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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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Académie.
    Elle se marque avant tout par une réaction très vive contre les nouveaux dogmatismes, contre ces conceptions d ’ ensemble de l ’ univers qui se donnent comme la condition de la sagesse, contre les prétendues certitudes dont ils sont issus. L ’ Académicien n ’ est pas, comme ceux dont nous venons de parler, un homme qui se retranche dans une solitude dédaigneuse et dans l ’ indifférence  ; c ’ est un combatif  ; il attaque et pourchasse l ’ adversaire  ; loin de laisser tomber la dialectique, c ’ est d ’ elle qu ’ il se sert pour renverser le dogmatisme.
    Pour bien comprendre leur doctrine, il nous faudrait mieux savoir à quel point le milieu de l ’ Académie, avec ses traditions restait différent des nouvelles écoles dogmatiques  ; lorsque le jeune Arcésilas, après avoir suivi, frais débarqué à Athènes, les cours de Théophraste, entra en contact avec Cratès et Polémon, il crut, nous dit-il, voir « ces êtres divins, le reste de cette ancienne humanité faite d ’ une race d ’ or ». Aussi la lutte entre Arcésilas et Zénon est-elle une lutte entre de u x esprits différents. p.380 Du côté d ’ Arcésilas, c ’ est l ’ esprit de la culture sophistique et humaine  ; instruit en mathématiques et en musique, faisant d ’ Homère sa lecture quotidienne, familier avec Pindare, il acquit, grâce à ses heureux dons et à cette éducation, une facilité de parole et un art de persuader qui lui attirèrent une grande foule d ’ élèves  [530] ; rien du style lourd et encombré de mots techniques des Stoïciens  ; rien non plus de leur gravité un peu pesante  : Arcésilas est un moqueur acerbe et redouté. Leur conception de l ’ enseignement devait être fort différente  : les Stoïciens sont d ’ infatigables polygraphes qui fixent leur dogme en formules écrites  ; Arcésilas est un infatigable jouteur qui accommode de mille façons la discussion à l ’ occasion qui s ’ offre, un improvisateur  ; aussi devait-il mettre la parole vivante au-dessus de l ’ écrit muet, et il n ’ a rien écrit, pas plus que Socrate ou Pyrrhon. D ’ autre part, au point de vue politique, son attitude est tout autre que celle des grands Stoïciens  ; s ’ il s ’ abstient, comme eux, de politique active dans la cité, il ne montre pas le même empressement auprès des pouvoirs naissants  : personnage considérable dans la ville par sa fortune personnelle comme par son enseignement, il se dérobe aux avances que lui fait le protecteur des Stoïciens, Antigone Gonatas  ; il n ’ a de relations personnelles qu ’ avec Eumène. roi de Pergame  : on ne voit nulle trace chez lui du cosmopolitisme stoïcien.
    Ces circonstances peuvent servir à comprendre les résistances que trouva chez lui la prétention affichée des Stoïciens à la certitude, prétention qui tranche tellement sur l ’ ordinaire modestie des philosophes grecs  ; c ’ est, en lui, tout l ’ esprit critique et analyste des Grecs qui se révolte contre la synthèse définitive que voudraient imposer les Stoïciens. Non seulement Arcésilas leur oppose le dicton de Socrate (la seule chose que je sais, c ’ est que je ne sais rien), mais il retrouve chez tous les p.381 philosophes la même hostilité au dogmatisme, chez Empédocle, Anaxagore, Démocrite, Héraclite, Xénophane, Parménide et Platon  ; ce sont bien là aussi les ancêtres que lui trouve l ’ Épicurien Colotès, comme on l ’ a vu plus haut  ; ses adversaires et lui sont d ’ accord pour dégager dans la pensée grecque une tradition antidogmatique  [531] .
    «  Par devant Platon, par derrière Pyrrhon, au milieu Diodore », tel est le portrait composite qu ’ Ariston donne d ’ Arcésilas. Sa manière est la manière libre et enjouée de Platon  ; sa conclusion est celle de Pyrrhon, c ’ est que le sage doit suspendre son jugement  ; mais sa méthode est celle de Diodore le Mégarique, c ’ est la dialectique. Le résumé très précis que Sextus a conservé de sa discussion sur la théorie de la certitude de Zénon nous montre en effet l ’ emploi de la dialectique au sens le plus précis du mot  [532] . Arcésilas n ’ introduit aucune affirmation et se sert uniquement de celles qui sont posées par ses adversaires. C ’ est, insistons-y bien, en se plaçant dans l ’ hypothèse des Stoïciens qu ’ il les réfute.
    Les Stoïciens distinguent entre la science, compréhension inébranlable, qui

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