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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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peut les renouveler que par la virtuosité de la forme. La philosophie tomberait-elle dans la pure rhétorique  ? C ’ est pour elle un constant danger  ; combien de fois Épictète l ’ a-t-il senti, qui reproche constamment à ses élèves leur absence de sentiments profonds et leur tendance à la pure habileté rhétorique  ! Combien de fois déjà Sénèque sacrifie-t-il la pensée au balancement de la phrase et à la découverte d ’ ingénieuses formules ! Et l ’ on voit un Maxime de Tyr exposer en style élégant le pour et le contre sur les sujets philosophiques les plus graves, la vie pratique et active, le rôle des sciences dans la philosophie  [590] . Si bien que, dans la lutte constante entre les professeurs de rhétorique conférenciers ou sophistes et les philosophes, les sophistes sont près de triompher  ; un Ælius Aristide (117-177), qui critique passionnément la condamnation de la rhétorique par Platon dans le Gorgias , met l ’ éducation formelle du rhéteur bien au-dessus de celle du philosophe  [591] .
    Cette tournure frivole de la pensée, qui ne trouve aucun obstacle dans une activité méthodique de l ’ esprit, a au contraire son contrepoids dans des préoccupations morales et religieuses qui sont foncièrement les mêmes dans toutes les écoles. On cherche à ce moment, chez le philosophe, un guide, un p.418 consolateur, un directeur de conscience. La philosophie est une école de paix et de sérénité. Si elle prétend rester recherche et connaissance de la vérité, c ’ est à cause de la valeur que cette connaissance a pour la paix de l ’ âme et son bonheur. «  La philosophie, dit Albinus en son Manuel de philosophie platonicienne , est, en même temps que le désir de sagesse, la délivrance de l ’ âme et sa conversion en dehors du corps, qui nous tourne vers les intelligibles et les êtres véritables. » Ce qui importe dans la connaissance de la vérité, c ’ est d ’ atteindre l ’ objet de la vérité, qui seul produit le bonheur  ; ce n ’ est pas la méthode selon laquelle on le recherche. Il s ’ agit moins, on l ’ a vu déjà à propos du stoïcisme, de découvrir une vérité nouvelle que de transformer l ’ esprit et la vision qu ’ il a des choses, les jugements qu ’ il porte sur elles  ; ce résultat est acquis moins en instruisant l ’ esprit qu ’ en le frappant.
     
    I I . — LE STOÏCISME A L ’ ÉPOQUE IMPÉRIALE
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    Aussi, quelles sont les formes littéraires que prend la philosophie stoïcienne  ? Des sortes de catéchismes moraux comme les discours de Musonius, des sermons à thèmes philosophiques comme ceux de Dion Chrysostome, des lettres ou des traités de direction spirituelle, comme chez Sénèque, des causeries qui visent à l ’ entraînement spirituel chez Épictète, l ’ examen de conscience chez Marc-Aurèle. Mais, au-dessous de ces œuvres littéraires, il faut songer aux innombrables anonymes qui, au milieu des vices croissants de la société romaine, où les non possédants ne songent qu ’ à vivre de la clientèle des riches et sur les fonds publics, se donnent pour mission le relèvement moral. Quelquefois nous assistons à la naissance de ces vocations . c ’ est par exemple le marchand Damasippe qui, après une faillite se fait Stoïcien  ; «  n ’ ayant plus d ’ affaires à moi, je m ’ occupe de celles des autres », lui fait dire Horace  [592] ; c ’ est Dion p.419 Chrysostome, le brillant conférencier mondain qui, ruiné par l ’ exil sous Domitien en 83, prend le bâton des Cyniques et va de ville en ville prêcher la bonne parole. Autour des plus célèbres se forment des cercles de jeunes gens, véritable foyer de propagande  ; le satirique Perse  [593] nous dit l ’ enthousiasme qu ’ éveillait chez les jeunes gens le Stoïcien Cornutus, l ’ auteur d ’ une petite théologie stoïcienne allégorique qui nous est conservée. Lucien nous dit quelle place tenait dans sa ville Démonax, le Stoïcien dont la parole apaisante calmait les disputes dans le privé comme dans le publie. On sait combien de jeunes Romains éta ient envoyés chez Épictète, sur les rivages lointains de Nicopolis, et combien il avait de mal à leur faire quitter l ’ ombre de l ’ école pour la vie publique. Il faut lire l ’ Hermotime de Lucien pour voir jusqu ’ où allait l ’ engouement pour les philosophes directeurs de consciences chez qui l ’ on trouvait des disciples aux cheveux

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