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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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valoir en faveur de la musique sa liaison intime avec la civilisation grecque traditionnelle, son rapport avec la piété et le culte des dieux, la manière dont elle apaise les passions et unit les hommes. L ’ Épicurien est au contraire le véritable rationaliste, l ’ esprit libre qui ne s ’ en laisse pas imposer par les usages et les coutumes, contestant par exemple que le Chant n ’ ajoute rien à la gravité des pensées d ’ un poème.
    Son petit traité Sur la Colère , qui utilise Chrysippe dans la description de cette passion, distingue la colère vaine d ’ une colère naturelle, l ’ indignation, que seuls les méchants n ’ éprouvent pas et qui est inévitable même chez le sage  [583] .
    On a vu déjà le mal que se donne Philodème pour défendre l ’ orthodoxie épicurienne contre les hétérodoxes de l ’ école qu ’ il appelle les sophistes et contre qui il a écrit un traité spécial. Dans un court fragment de ce traité, récemment étudié, il indique le fameux quadruple remède (tetrapharmakon) épicurien contre tous les maux  : « Dieu n ’ est pas à craindre, la mort n ’ est pas redoutable, le bien est d ’ acquisition facile, le danger facile à supporter », sorte de formulaire dont Épicure avait donné le goût à ses disciples  [584] .
    C ’ est enfin l ’ époque qui a vu naître l ’ admirable poème de Lucrèce De la Nature qui chante la sérénité d ’ un esprit apaisé par la vision épicurienne des choses. Les éloges d ’ Épicure nous sont une preuve de l ’ accueil enthousiaste que ses idées trouvaient chez les meilleurs esprits de Rome. Il y a là une gravité d ’ accent qui fait contraste avec l ’ agilité dialectique des autres écoles grecques, avec cette virtuosité qui devaient être peu prisées à Rome. Dans ce vaste poème, tout vient-il d ’Ép icure  ? Non assurément  ; bien des détails techniques de l ’ explication des météores au livre IV reviennent plutôt p.411 à Posidonius ou à Théophraste  ; il prend aussi parfois directement à Empédocle  ; on y trouve des interprétations allégoriques peu habituelles chez les Épicuriens. De plus, le sentiment même n ’ est pas tout à fait épicurien, et la sérénité de Lucrèce est mélangée de pessimisme  ; elle ne vient pas d ’É picure, cette histoire de l ’ humanité qui se trouve à la fin du livre V , et qui montre dans la civilisation une déchéance plutôt qu ’ un progrès  ; ce sentiment de la décadence irrémédiable, mille fois exprimé, n ’ a pas son modèle chez le maître. Qu ’ on songe aussi au livre III sur la mortalité de l ’ âme  : Lucrèce a montré par une foule d ’ arguments que l ’ âme est mortelle  ; cela suffirait à un Épicurien  ; mais toute la fin s ’ adresse à ceux qui gardent des inquiétudes, une fois la thèse admise  ; Lucrèce veut encore nous protéger contre l ’ horreur du néant, par la méditation de la « mort immortelle ». La célèbre prosopopée de la nature n ’ use pas d ’ arguments épicuriens, mais elle insiste sur l ’ éternelle monotonie des choses ( eadem sunt omnia semper ), suggérant ainsi bien plutôt le dégoût de la vie que l ’ intrépidité devant la mort. Lucrèce, ici, utilise, bien plus qu ’ Épicure, les thèmes pessimistes que nous avons rencontrés dans les diatribes.
     
    IV. — LA FIN DE LA NOUVELLE ACADÉMIE
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    La crise qui atteint toutes les écoles dans la première moitié du premier siècle touche aussi l ’ Académie  : les deux scholarques qui succèdent à Clitomaque, Philon de Larisse (110-85) et Antiochus d ’ Ascalon (85-69), ne s ’ entendirent ni avec leurs prédécesseurs ni entre eux sur la signification à donner à la doctrine académicienne. Nous pouvons nous faire une idée de ce débat par les Académiques de Cicéron. Cicéron, qui connut Philon à Rome entre 88 et 85, qui fut élève d ’ Antiochus à Athènes en 79, écrivit en 46 un premier traité, les p. 412 Premiers Académiques , dont le premier livre, perdu, le Catulus , contenait l ’ exposé de la théorie de Carnéade, et le second, conservé, le Lucullus , contient précisément l ’ exposé de la doctrine d ’ Antiochus par Lucullus, suivi de la réfutation qu ’ en donne Cicéron  ; en se conformant à Philon de Larisse. L ’ année suivante il écrivit une seconde rédaction du même traité, en quatre livres, les Seconds Académiques ; le premier livre, seul

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