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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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développées tout ou partie des possibilités contenues dans l ’ état initial. D ’ où la formule célèbre  : «  Le mouvement est l ’ acte du possible en tant que possible  [298] » . Ce n ’ est pas en tant qu ’ être vivant d ’ une telle taille que l ’ enfant grandit, c ’ est en tant qu ’ il est enfant, c ’ est-à-dire qu ’ il a la possibilité d ’ atteindre la taille adulte  ; cette possibilité réalisée, le mouvement cesse. Le mouvement n ’ a donc de sens que dans le rapport de la forme à la matière, de l ’ actuel au virtuel.
    Le mouvement est en général désigné par référence à l ’ état final vers lequel il tend  ; le noircissement est l ’ altération qui p.205 tend vers le noir  ; mais il ne faut pas perdre de vue que le mouvement part d ’ un état initial qui est le contraire de l ’ état final, ou intermédiaire entre cet état et son contraire  [299] . Si une chose noircit, c ’ est que, au début, elle était blanche ou du moins grise  ; si elle grandit, c ’ est qu ’ elle était petite  ; si une pierre tombe vers le bas, c ’ est qu ’ elle était en haut. Tout mouvement par conséquent a lieu entre des contraires, du haut en bas, du blanc au noir, puisqu ’ il ne fait que substituer un contraire à l ’ autre  ; de plus, l ’ état initial et l ’ état final, étant des contraires, sont nécessairement dans le même genre  ; il n ’ y a de mouvement que d ’ une couleur à une couleur, d ’ un lieu à un lieu. Il y aura donc autant de genres suprêmes de mouvement qu ’ il y a de genres de l ’ être qui admettent des contraires  ; or parmi les catégories, seules, celles de la qualité, de la quantité et du lieu sont dans ce cas  ; d ’ où les trois seuls genres de mouvements  : altération, augmentation et diminution, mouvement local  ; ces trois genres de mouvements sont tout aussi irréductibles à un genre commun que les genres de l ’ être dont ils dérivent  [300] . Dans chacun de ces genres le mouvement a pour point de départ la privation d ’ une certaine qualité et pour point d ’ arrivée la possession de cette qualité  ; le mouvement va du non-blanc au blanc, du non-musicien au musicien. D ’ autre part, privation et possession doivent appartenir à un sujet qui ne change pas pendant le devenir, un homme par exemple ( Physique, I, 7 ).
    A ces trois genres, Aristote en ajoutait d ’ abord un quatrième qu ’ il a ensuite exclu  [301] , ; c ’ est la génération et la corruption, c ’ est-à-dire la naissance d ’ une substance et sa mort  ; ce passage du non-être à l ’ être et de l ’ être au non-être ne doit pas s ’ appeler un mouvement, d ’ abord parce que « aucune substance n ’ a de contraire  » , ensuite parce qu ’ il est brusque et discontinu. La génération est sans doute précédée de mouvements de toute p.206 espèce qui ont modifié la matière pour la mettre en état de recevoir la forme  ; tel le travail préliminaire du statuaire  ; le savant a même pour principal objet l ’ étude de ces transformations  ; par exemple le traité De la génération des animaux étudie, avant tout, les modifications de la semence qui la rendront capable de recevoir la forme  ; mais il ne faut pas confondre cette série de modifications qui sont de véritables mouvements avec la génération même qui coïncide avec l ’ état final où amènent ces mouvements dirigés vers elle et qui a lieu en un instant indivisible.
    Les intentions de cette théorie du mouvement sont aisées à apercevoir si l ’ on songe au développement antérieur de la philosophie grecque  : le mouvement était par excellence le flux, l ’ indéfini, l ’ illimité, cet élément rebelle à la pensée conceptuelle, que les platoniciens appelaient l’ autre ou l ’ inégal  [302] . Ce flux universel qui fait naître et emporte des formes sans cesse changeantes rend impossible toute science et toute connaissance  ; il ne restait plus qu ’ à « fuir d ’ ici  » [303] et à chercher la science dans un monde transcendant. A cette image, qui considère comme des réalités absolues des êtres en puissance, Aristote substitue la sienne, selon laquelle l ’ être en puissance est tout relatif à l ’ être en acte. Il n ’ y a point de flux universel  : il n ’ y a qu ’ une collection de mouvements, dont chacun est limité d ’ une manière précise par un état initial et un état

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