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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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non plus hétérogène, puisque, on l ’ a vu, les éléments dont il se compose devraient être tous infinis, donc occuper tons les lieux  ; or, les éléments ne peuvent être hétérogènes que si chacun a son lieu propre  [306] .
    Donc pas de corps infiniment grand. Est-ce à dire que l ’ on peut nier l ’ infinité  ? On ne le saurait sans absurdité  ; le temps se prolonge sans fin dans le passé et dans l ’ avenir  ; la suite des nombres est illimité (infini par addition), la grandeur p.209 géométrique est indéfiniment divisible (infini par soustraction). Mais en quoi consiste la divisibilité  ? Dans le dernier cas, par exemple, en ce qu ’ il est toujours possible, ayant pris la moitié d ’ une grandeur, de prendre la moitié de cette moitié  ; chaque grandeur que l ’ on prend est toujours une grandeur finie, mais chaque fois différente. Il en est de même de l ’ infini du temps et de la suite des nombres qui consiste non pas à arriver effectivement à un nombre infini, mais à toujours pouvoir prendre un nombre plus grand que celui auquel on s ’ est arrêté  ; l ’ infini par addition est en un sens le même que l ’ infini par soustraction, puisqu ’ il consiste à maintenir la possibilité de toujours prendre une grandeur en dehors de celle que l ’ on a prise. Loin que l ’ infini soit comme on l ’ a dit ce en dehors de quoi il n ’ y a rien, c ’ est ce en dehors de quoi il y a toujours quelque chose. Cela revient à dire que l ’ infini n ’ est pas en acte, mais en puissance. Ainsi Aristote libère la philosophie de l ’ imagination présocratique du contenant infini qui serait la source toujours rajeunissante des mondes  ; l ’ infini et l ’ illimité sont termes relatifs au fini, à l ’ achevé dans lesquels ils se trouvent comme une matière et par rapport auxquels ils prennent un sens  ; car « il est absurde, il est impossible que ce soit l ’ inconnaissable et l ’ illimité qui contienne et qui définisse » ( Physique , III, 6 ).
    Mais à quel prix cette libération  ? Et n ’ est-on pas forcé de nier du même coup la fécondité illimitée du devenir ? Or, c ’ est ce que ne veut pas Aristote  ; en son monde limité, fait de substances définies, le devenir est inépuisable et n ’ a ni commencement, ni fin. Pareille chose n ’ est possible que si « la corruption d ’ un être est la génération d ’ un autre ». Si en un sens, le devenir va du non-être à l’être et de l ’ê tre au non-être, il va toujours en un sens plus exact de l ’ être à l ’ être  ; un élément ne peut se détruire qu ’ en donnant naissance à un autre  ; c ’ est en lui-même et non dans l ’ infini que le devenir trouve les sources de son propre rajeunissement ( III, 8 début ).
    La théorie du lieu ( IV, 1-5 ) est faite aussi pour protéger la p.210 nouvelle métaphysique substantialiste. Aristote a très profondément vu que le problème du lieu ne se poserait pas pour lui, s ’ il n ’ y avait pas mouvement local, c ’ est-à-dire changement de lieu  ; dans ce cas, le lieu serait un attribut du corps au même titre que la couleur. Mais il y a changement de lieu  ;«  là où il y avait de l ’ air, il y a maintenant de l ’ eau » . Qu ’ est donc ce singulier attribut que l ’ air n ’ emporte pas, qu ’ il cède à l ’ eau et qui paraît former comme une substance permanente  ? En faire, comme le Timée , un réceptacle indifférent des choses, c ’ est affirmer une substantialité tout à fait équivoque  ; en faire l ’ espace intérieur rempli par le corps, l ’ identifier aux dimensions du corps, c ’ est dire qu ’ il se déplace avec le corps, ce qui est absurde. Le problème paradoxal qui se pose, c ’ est de rattacher le lieu au corps pour faire du lieu un attribut, tout en le laissant pourtant séparé. Si nous considérons un corps, nous pouvons envisager la surface qui lui appartient, comme en contact immédiat par tous ses points avec la surface limitante qui appartient à son milieu  ; cette surface limitante, sorte de vase idéal dans lequel est contenu le corps, est le lieu du corps : ainsi le lieu d ’ une sphère céleste est la surface interne de la sphère plus grande en laquelle elle est emboîtée. Le lieu d ’ un corps, tout au moins son lieu particulier, est donc «  l ’ extrémité du corps qui le contient ». Il suit de là que le «  lieu existe en même temps que la

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