Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
Vom Netzwerk:
prononcé.
    Louis s’y attendait. Lorsque Malesherbes vint tout en larmes lui annoncer l’arrêt de mort, il le trouva dans l’obscurité, les coudes appuyés sur une table, le visage dans ses mains, et livré à une profonde méditation. Au bruit qu’il fit, Louis XVI se leva, et lui dit   : « Depuis deux heures je suis occupé à chercher si, pendant mon règne, j’ai pu mériter de mes sujets le plus petit reproche. Eh bien   ! M. de Malesherbes, je vous le jure dans toute la vérité de mon cœur, comme un homme qui va paraître devant Dieu   ; j’ai constamment voulu le bonheur du peuple, et jamais je n’ai formé un vœu qui lui fût contraire. » Malesherbes lui fit espérer que le sursis ne serait pas rejeté, ce que Louis ne crut point. Il pria Malesherbes en l’accompagnant de ne point l’abandonner dans ses derniers instants   : Malesherbes lui promit de revenir   ; mais il se présenta plusieurs fois, et ne put jamais pénétrer jusqu’à lui. Louis le demanda souvent, et fut affligé de ne pas le revoir. Il reçut sans trouble l’annonce de sa sentence, que vint lui signifier le ministre de la justice. Il demanda trois jours pour paraître devant Dieu   ; il demanda en outre d’être assisté d’un prêtre qu’il désigna, et de communiquer librement avec sa femme et ses enfants. Ces deux dernières demandes lui furent seules accordées.
    Le moment de l’entrevue fut déchirant pour cette douloureuse famille   ; celui de la séparation le fut encore bien davantage. Louis, en la quittant, promit de la revoir le lendemain   ; mais, rentré dans sa chambre, il sentit que cette épreuve était trop forte, et, se promenant à grands pas, il disait   : Je n’irai point. Ce fut son dernier combat   : il ne pensa plus qu’à se préparer à la mort. La nuit qui précéda son supplice, il eut un sommeil paisible. Réveillé à cinq heures par Cléry, auquel il en avait donné l’ordre, il fit ses suprêmes dispositions. Il communia, chargea Cléry de ses dernières paroles, et de tout ce qu’il lui était permis de léguer, un anneau, un cachet, quelques cheveux. Déjà les tambours roulaient, un bruit sourd de canons tramés et de voix confuses se faisait entendre. Enfin Santerre arriva. «  Vous venez me chercher, dit Louis, je vous demande une mi nute. » Il remit son testament à un officier municipal, demanda son chapeau, et il dit d’une voix ferme   : Partons.
    La voiture mit une heure pour arriver du Temple à la place de la Révolution. Une double haie de soldats bordait la route, plus de quarante mille hommes étaient sous les armes   ; Paris était morne. Parmi les citoyens qui assistaient à l’exécution, il n’y eut ni approbation, ni regrets apparents   : tous furent silencieux. Arrivé sur le lieu du supplice, Louis descendit de voiture. Il monta d’un pas ferme les degrés de l’échafaud, reçut à genoux la bénédiction du prêtre, qui lui dit alors, à ce qu’on assure   : Fils de Saint-Louis, montez au ciel   ! Il se laissa lier les mains, quoique avec répugnance, et, se portant vivement sur la gauche de l’échafaud   : « Je meurs innocent, dit-il, je pardonne à mes ennemis   ; et vous, peuple infortuné   !… » Au même instant le signal du roulement fut donné, le bruit des tambours couvrit sa voix, les trois bourreaux le saisirent. À dix heures dix minutes, il avait cessé de vivre.
    Ainsi périt, à l’âge de trente-neuf ans, après un règne de seize ans et demi passé à chercher le bien, le meilleur, mais le plus faible des monarques. Il hérita de ses ancêtres une révolution. Plus qu’aucun d’eux, il était propre à la prévenir ou à la terminer   ; car il était capable d’être un roi réformateur avant qu’elle éclatât, ou d’être ensuite un roi constitutionnel. Il est le seul prince, peut-être, qui, n’ayant aucune passion, n’eut pas celle du pouvoir, et qui réunit les deux qualités qui font les bons rois, la crainte de Dieu et l’amour du peuple. Il périt victime de passions qu’il ne partageait pas   : de celles de ses alentours qui lui étaient étrangères   ; et de celles de la multitude, qu’il n’avait pas excitées. Il y a peu de mémoires de roi aussi recommandables. L’histoire dira de lui, qu’avec un peu plus de force d’âme il eût été un roi unique.

CHAPITRE VII
     
    Situation politique et militaire de la France. – L’Angleterre, la Hollande, l’Espagne, Naples, et

Weitere Kostenlose Bücher