Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
tous les cercles de l’Empire, accèdent à la coalition. – Dumouriez, après avoir conquis la Belgique, tente une expédition en Hollande. – Il veut rétablir la monarchie constitutionnelle. – Revers de nos armées. – Lutte des Montagnards et des Girondins ; conspiration du 10 mars. – Insurrection de la Vendée, ses progrès. – Défection de Dumouriez. – Les Girondins accusés de complicité avec lui ; nouvelles conjurations contre eux. – Établissement de la commission des Douze pour déjouer les conspirateurs. – Insurrections des 27 et 31 mai contre la commission des Douze ; elle est supprimée. – Insurrection du 2 juin contre les vingt-deux principaux Girondins ; ils sont mis en arrestation. – Défaite entière de ce parti.
La mort de Louis XVI rendit les partis irréconciliables, et augmenta les ennemis extérieurs de la révolution. Les républicains eurent à lutter contre toute l’Europe, contre les nombreuses classes de mécontents, et contre eux-mêmes. Mais les Montagnards qui conduisaient alors le mouvement populaire, se croyaient trop engagés pour ne pas pousser les choses à l’extrême. Effrayer les ennemis de la révolution ; exciter le fanatisme du peuple par des discours, par la présence des dangers, par des insurrections ; rapporter tout à lui, et le gouvernement et le salut de la république ; lui communiquer le plus ardent enthousiasme, au nom de la liberté, de l’égalité, et de la fraternité ; le maintenir dans ce violent état de crise pour se servir de ses passions et de sa force : tel fut le plan de Danton et des Montagnards, qui l’avaient pris pour chef. Ce fut lui qui augmenta l’effervescence populaire avec les périls croissants de la république, et qui fit établir sous le nom de gouvernement révolutionnaire, au lieu de la liberté légale, le despotisme de la multitude. Robespierre et Marat allaient encore beaucoup plus loin que lui, et ils voulaient ériger en gouvernement durable ce que Danton ne considérait que comme transitoire. Celui-ci n’était qu’un chef politique, tandis que les autres étaient de véritables sectaires, le premier plus ambitieux, le second plus fanatique.
Les Montagnards, par la catastrophe du 21 janvier, avaient remporté une grande victoire sur les Girondins, qui avaient une politique beaucoup plus morale que la leur, et qui aspiraient à sauver la révolution, sans l’ensanglanter. Mais leur humanité, leur esprit de justice, ne leur servirent de rien, et tournèrent contre eux. On les accusa d’être ennemis du peuple, parce qu’ils tonnèrent contre ses excès ; d’être complices du tyran, parce qu’ils avaient voulu sauver Louis XVI ; et de trahir la république, parce qu’ils recommandaient la modération. Ce fut avec ces reproches que les Montagnards, depuis le 21 janvier jusqu’au 31 mai et au 2 juin, les poursuivirent avec la plus constante animosité dans le sein de la convention. Les Girondins furent long-temps soutenus par le centre, qui se rangeait avec la droite contre les meurtres et l’anarchie, avec la gauche pour les mesures de salut public. Cette masse, qui formait, à proprement parler, l’esprit de la convention, montra quelque courage, et balança la puissance de la Montagne et de la commune, tant qu’elle eut au milieu d’elle ces Girondins intrépides et éloquents qui emportèrent dans leur prison et sur l’échafaud toute la fermeté et toutes les résolutions généreuses de l’assemblée.
Il y eut un moment d’accord entre les divers partis de l’assemblée. Lepelletier Saint-Fargeau fut poignardé par un ancien garde-du-corps nommé Pâris, comme ayant voté la mort de Louis XVI. Les conventionnels, réunis par le danger commun, jurèrent sur sa tombe d’oublier leurs inimitiés, mais ils y revinrent bientôt. On poursuivait à Meaux quelques-uns des meurtriers de septembre, dont les républicains honorables voulaient le châtiment. Les Montagnards, craignant qu’on n’examinât leur conduite passée, et que leurs adversaires ne prissent avantage d’une condamnation pour les attaquer plus ouvertement eux-mêmes, parvinrent à faire cesser les poursuites. Cette impunité enhardit encore les chefs de la multitude ; et Marat, qui avait, à cette époque, une incroyable influence sur elle, l’excita au pillage des marchands, qu’il accusait d’accaparer les subsistances. Il s’élevait violemment dans ses feuilles, et aux
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