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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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et le régiment de Flandre. Cet appareil de troupes donna lieu aux craintes les plus vives   ; on répandit le bruit d’un coup d’état contre-révolutionnaire, et l’on annonça comme prochaine la fuite du roi et la dissolution de l’assemblée. Au Luxembourg, au Palais-Royal, aux Champs-Élysées, on aperçut des uniformes inconnus, des cocardes noires ou jaunes   ; les ennemis de la révolution montraient une joie qu’on ne leur voyait plus depuis quelque temps. La cour par sa conduite confirma les soupçons, et dévoila le but de tous ces préparatifs.
    Les officiers du régiment de Flandre, reçus avec inquiétude par la ville de Versailles, furent fêtés au château et on les admit au jeu de la reine. On chercha à s’assurer de leur dévouement   ; un repas de corps leur fut donné par les gardes du roi   : les officiers de dragons et des chasseurs qui se trouvaient à Versailles, ceux des gardes suisses, des cent suisses, de la prévôté, et l’état-major de la garde nationale, y furent invités. On choisit pour lieu du festin la grande salle des spectacles, exclusivement destinée aux fêtes les plus solennelles de la cour, et qui, depuis le mariage du second frère du roi, ne s’était ouverte que pour l’empereur Joseph II. Les musiciens du roi eurent ordre d’assister à cette fête, la première que les gardes eussent encore donnée. Pendant le repas on porta avec enthousiasme la santé de la famille royale, celle de la nation fut omise ou rejetée. Au second service, les grenadiers de France, les Suisses et des dragons furent introduits, pour être témoins de ce spectacle, et participer aux sentiments qui animaient les convives. Les transports augmentaient d’un moment à l’autre   : tout d’un coup on annonce le roi, il entre dans la salle du banquet en habit de chasse, suivi de la reine qui tenait le dauphin dans ses bras. Des acclamations d’amour et de dévouement se font entendre   ; l’épée nue à la main, on boit à la santé de la famille royale   ; et au moment où Louis XVI se retire, la musique joue l’air   : Ô Richard, ô mon roi, l’univers t’abandonne   !… La scène prend alors un caractère bien significatif   : la marche des hullans et les vins versés avec profusion font perdre aux convives toute réserve. On sonne la charge   ; les convives chancelants escaladent les loges comme si l’on montait à l’assaut, des cocardes blanches sont distribuées, la cocarde tricolore est, dit-on, foulée aux pieds, et cette troupe se répand ensuite dans les galeries du château, où les dames de la cour lui prodiguent les félicitations et la décorent de rubans et de cocardes.
    Tel fut ce fameux repas du 1 er octobre que la cour eut l’imprudence de renouveler le 3. On ne peut s’empêcher de déplorer sa fatale imprévoyance   : elle ne savait ni se soumettre à sa destinée, ni la changer. Le rassemblement des troupes, loin de prévenir l’agression de Paris, la provoqua   ; le banquet ne rendit pas le dévouement des soldats plus sûr, tandis qu’il augmenta les indispositions de la multitude. Pour se garder il ne fallait pas tant d’ardeur, ni, pour fuir, tant d’appareil   ; mais la cour ne prenait jamais la mesure propre à la réussite de ses desseins, ou ne la prenait qu’à demi, et pour se décider elle attendait toujours qu’il ne fût plus temps.
    À Paris la nouvelle du repas, l’apparition des cocardes noires, produisirent la plus grande fermentation. Dès le 4, des rumeurs sourdes, des provocations contre-révolutionnaires, la crainte des complots, l’indignation contre la cour, la frayeur croissante de la disette, tout annonçait un soulèvement   ; la multitude tournait déjà ses regards vers Versailles. Le 5 l’insurrection éclata d’une manière violente et invincible   : le manque absolu de farine en fut le signal. Une jeune fille entra dans un corps-de-garde, s’empara d’un tambour, et parcourut les rues en battant la caisse et en criant du pain   ! du pain   ! elle fut bientôt entourée d’un cortège de femmes. Cette troupe s’avance vers l’Hôtel-de-Ville en se grossissant toujours   ; elle force la garde à cheval qui était aux portes de la commune, pénètre dans l’intérieur en demandant du pain et des armes   ; elle enfonce les portes, s’empare des armes, sonne le tocsin, et se dispose à marcher sur Versailles. Bientôt le peuple en masse fait entendre le même vœu et le cri À Versailles

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