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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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leurs idées, ou qui espéraient faire partie de la chambre haute. La majorité de la noblesse aurait voulu, non une pairie, mais une assemblée aristocratique dont elle aurait élu les membres. Ils ne purent dès lors pas s’entendre, le parti Mounier se refusant à un projet qui aurait ressuscité les ordres, et les aristocrates rejetant un sénat qui confirmait la ruine de la noblesse. Le plus grand nombre des députés du clergé et des communes était pour l’unité de l’assemblée. Il paraissait illégal au parti populaire de constituer des législateurs à vie   : il croyait que la chambre haute servirait d’instrument à la cour et à l’aristocratie, et serait dès lors dangereuse, ou bien deviendrait inutile en se réunissant aux communes. Ainsi le parti nobiliaire par mécontentement, le parti national par esprit de justice absolue, rejetèrent également la chambre haute.
    Cette détermination de l’assemblée a été l’objet de beaucoup de reproches. Les partisans de la pairie ont attribué tous les maux de la révolution à son absence, comme s’il eût été possible à un corps, quel qu’il fût, d’arrêter sa marche. Ce n’est point la constitution qui lui a donné le caractère qu’elle a eu, ce sont les événements occasionnés par la lutte des partis. Qu’eut fait la chambre haute entre la cour et la nation   ? Déclarée en faveur de la première, elle ne l’eût ni conduite ni sauvée   ; en faveur de la seconde, elle ne l’eût pas renforcée, et, dans les deux cas, sa suppression était infaillible. On va vite, en pareil temps, et tout ce qui arrête est de trop. En Angleterre, la chambre des lords, quoiqu’elle se montrât très-docile, fut suspendue pendant la crise. Ces divers systèmes ont chacun leur époque   ; les révolutions se font avec une seule chambre, et se terminent avec deux.
    La sanction royale excita de grands débats dans l’assemblée, et une rumeur violente au-dehors. Il s’agissait de déterminer l’action du monarque dans la confection des lois. Les députés étaient presque tous d’accord sur un point. Ils étaient résolus à lui reconnaître le droit de sanctionner ou de refuser les lois   : mais les uns voulaient que ce droit fût illimité   ; les autres, qu’il fût temporaire. Au fond, c’était la même chose   ; car il n’était pas possible au prince de prolonger son refus indéfiniment, et le veto, quoique absolu, n’aurait été que suspensif. Mais cette faculté, donnée à un homme seul, d’arrêter la volonté d’un peuple, paraissait, exorbitante, hors de l’assemblée surtout où elle était moins comprise.
    Paris n’était point encore revenu de l’agitation du 14 juillet   ; il était au début du gouvernement populaire, et il en éprouvait la liberté et le désordre. L’assemblée des électeurs, qui, dans des circonstances difficiles, avait tenu lieu de municipalité provisoire, venait d’être remplacée. Cent quatre-vingts membres, nommés par les districts, s’étaient constitués en législateurs et en représentants de la commune. Pendant qu’ils travaillaient à un plan d’organisation municipale, chacun voulait commander   ; car, en France, l’amour de la liberté est un peu le goût du pouvoir. Les comités agissaient à part du maire   ; l’assemblée des représentants s’élevait contre les comités, et les districts contre l’assemblée des représentants. Chacun des soixante districts s’attribuait le pouvoir législatif, et donnait le pouvoir exécutif à ses comités   ; ils considéraient tous comme leurs subordonnés, les membres de l’assemblée générale, et ils s’accordaient le droit de casser leurs arrêtés. Cette idée de souveraineté du mandant sur le délégué, faisait des progrès rapides. Tous ceux qui ne participaient pas à l’autorité se réunissaient en assemblées, et là se livraient à des délibérations   ; les soldats discutaient à l’oratoire, les garçons tailleurs à la colonnade, les perruquiers aux Champs-Élysées, les domestiques au Louvre. Mais c’était au Palais-Royal surtout qu’avaient lieu les discussions les plus animées   ; on y examinait les matières qui occupaient les débats de l’assemblée nationale, et l’on y contrôlait ses discussions. La disette occasionnait aussi des attroupements, et ceux-là n’étaient pas les moins dangereux.
    Tel était l’état de Paris lorsque la discussion sur le veto fut entamée. La

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