Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
à Nehru de transformer l’Inde en un dominion à la fin de la guerre, mais à une date où jamais le Japon n’avait été si près des frontières de l’Inde : « En nous promettant le statut de dominion après la guerre, répondit Nehru, les Anglais nous signent un chèque antidaté sur une banque en faillite. » C’était l’impasse.
Alors Chandra Bose franchit le pas et s’engagea résolument dans la coopération avec l’Allemagne et le Japon. Il constitua bientôt un gouvernement indien libre, à Singapour, et fut reçu en grande pompe par Hitler d’abord, puis par le gouvernement de Tokyo, à la fin de 1943.
En Birmanie, il constitua une armée avec des prisonniers de guerre que les Japonais avaient raflés. Mais, si son soulèvement prit les caractères d’un mythe et que le Congrès l’honora après sa mort, accidentelle, son choix ne fut pas vraiment suivi. C’est que, depuis l’entrée en guerre de l’URSS, les communistes indiens avaient rompu avec son courant ; en outre, les paroles de F.D. Roosevelt sur l’application de la charte de l’Atlantique à toutes les nations sous domination étrangère suscitèrent l’espoir des Indiens. Après les grandes émeutes qui suivirent l’arrestation de Gandhi, en 1942, le Congrès, conduit par Nehru, fitentrer l’Inde dans la guerre, au moins sur le plan économique. Il restait à en récolter le fruit.
Demeuraient le problème musulman et l’attitude de Londres.
Depuis Lord Curzon, le colonisateur tablait sur la haine qui opposait hindous et musulmans. Certes, il y avait eu, dans le passé du pays, des moments de réconciliation, des tentatives de syncrétisme aussi. Mais les différends étaient plus forts… Il revint à Gandhi d’avoir su comprendre que cet antagonisme jouait contre le swaraj, et, après les lois Rowlatt, il organisa, avec Swani Shradd Hanand une grève de solidarité religieuse coordonnée avec la Grande Mosquée. Il y eut 5 morts hindous et 4 musulmans, ce qui inquiéta les autorités britanniques, car le mouvement hartal — grève interreligionnaire — prit une très grande ampleur. Le gouvernement de Delhi sut alors aider au développement de la Ligue musulmane que dirigeait Jinnah, et les incidents se multiplièrent, notamment à l’occasion d’élections. Les grèves de la faim, menées par Gandhi pour prévenir une escalade, étaient sans effet réel sur le conflit. De fait, la Ligue musulmane voyait avec inquiétude la montée en puissance du Parti du Congrès et la tentation qu’il avait de monopoliser le dialogue avec les Britanniques.
L’idée d’une nation indienne musulmane séparée fut émise en 1933, et, avec elle, apparut le Pakistan, terme magique qui signifiait aussi « Terre de Pureté ».
Pour Gandhi, l’idée d’une nation musulmane en Inde était absurde — pourquoi pas, ensuite, une nation sikh, une nation parsi, disait-il, nous sommes tous de la même race… Mais cette incompréhension n’était pas vraiment innocente, car les musulmans jugeaient qu’ils compteraient pour rien dans un État entre les mains du Congrès. Si la non-violence était une bonne technique, ses objectifs, par la voie d’un parlementarisme à l’occidentale, avaient pour résultat de ruiner ceux qui jugeaient avoir une identité propre…
Mais Gandhi n’en voulait rien connaître, et cette montéede l’Inde musulmane le laissa sans réplique : il en fut abattu, un signe que la nature du problème lui échappait.
De son côté, la Ligue n’avait ni la richesse, ni la puissance, ni l’organisation, ni l’enracinement du Parti du Congrès. Elle était vaincue d’avance dans toute figure d’épreuve de caractère institutionnel. Aussi Muhammad ’Ali Jinnah voulut-il se battre seulement sur les dimensions et les frontières de cet État, et il fut intraitable, éludant toute discussion sur le contrôle futur de l’armée et des impôts.
Les échanges de population et les grands troubles que causa la partition eurent lieu, après qu’elle fut décidée, causant près de 200 000 victimes. Lord Mountbatten, vice-roi en 1947, mena la négociation en fixant des dead-lines , obligeant ainsi la Ligue et le Congrès à constituer des gouvernements, à préparer la gestion de « leur » pays, etc. : indépendance en juin 1948, transfert des pouvoirs en août…
Furent sacrifiés les Sikhs, les princes, les intouchables, que les différents partenaires abandonnèrent à leur destin,
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