Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
enverrait ses oisifs, y vendrait ses produits, y trouverait sa nourriture (1583). De sorte que dès la fin du xvf siècle, la double identité de l’Empire anglais apparaît déjà : des bases navales, ou l’installation de colons ; c’est-à-dire, d’une part, des colonies commerçantes, d’autre part, des terres d’implantation pour la foi, pour l’établissement de ceux qui n’ont rien — une colonisation qui, à sa manière, rappelait et perpétuait l’expansion anglaise en Irlande. Au reste, c’étaient les mêmes hommes qui, en Irlande et outre-mer, la stimulaient.
En Amérique, à la différence de la pénétration française qui s’était effectuée vers l’intérieur des terres, celle des Anglais se réalisa à partir de plusieurs établissements côtiers, de l’Hudson à la Virginie. Jacques I er concéda à deux Compagnies le littoral américain du 34° au 38° et du 41° au 45° de latitude nord — 104 colons débarquèrent ainsi en baie de Chesapeake, où le port s’appela Jamestown en l’honneur du roi. Les débuts furent difficiles, et notamment les rapports avec les Indiens : le quart de la colonie fut massacré en 1622, au point de se demander si on survivrait à ces épreuves… La colonie put les surmonter et sut créer une culture riche d’avenir, le tabac, pour lequel elle obtint un monopole des ventes en Angleterre.
Simultanément, il partit de Virginie une expédition vers le nord qui découvrit et décrivit ce qui s’appela désormais la Nouvelle-Angleterre. Les Pères Pèlerins qui y parvinrenten 1620 sur le Mayflower avaient d’abord imaginé débarquer en Virginie ; les tempêtes en décidèrent autrement. Or, ces Pilgrims Fathers, ces puritains, n’étaient que 35 sur les 200 immigrés qui débarquèrent au cap Cod, fondant le port de Plymouth. Ils surent faire accroire, et leur descendance surtout, qu’ils avaient été les fondateurs des futurs États-Unis (1620). A leur manière, ils le furent néanmoins pour autant qu’ils signèrent une sorte d’accord, le Compact du Mayflower , qui fut la base d’une démocratie calvinienne. Cette colonie du Massachusetts, avec son université de Cambridge fondée par un clergyman de Boston, Harvard, fut bientôt un exemple de gouvernement, que les autres colonies imitèrent.
Jusque-là, pour les Anglais, le pillage et la course avaient été plus avantageux que la prise de possession de territoires d’outre-mer. Et puis, il semblait bien que les Espagnols eussent raflé tous les gros lots. Après le désastre de l’Invincible Armada et la décadence de la puissance espagnole, l’essor des Pays-Bas, les perspectives changèrent… Elles se modifient bientôt en Inde où, après une victoire navale des Anglais sur les Portugais, Sir Thomas Roe, ambassadeur de Jacques I er , était reçu par le Mogol.
Entre les deux empires, plusieurs différences : géré au centre par la Castille, l’outre-mer espagnol est composé d’entités bien séparées. Postérieur à la Réforme protestante, l’Empire anglais est, pour l’instant, laissé à l’initiative des individus : catholique au Maryland, puritain au Massachusetts.
Le tsar russe : multiplier les contribuables
Selon les Russes, leur « colonisation » n’a rien à voir avec celle des autres puissances occidentales. Effectivement, dès le XII e siècle les Russes de Novgorod et de Souzdal envoyaient des colons s’installer au-delà du fleuve Kama pour s’y associer aux Mordves, des Finno-Ongriens, à la recherche de fourrures. Aujourd’hui aussi nombreux que les Estoniens, les Mordves constituent la population non russe la plus dispersée de toutes à l’intérieur de l’ex-Empire ; 28 % des Mordves seulement se trouvent dans leur République autonome, autour de Saransk, sur la Volga. C’est le signe d’une totale assimilation.
Les deux siècles de joug mongol interrompirent cette quête, qui reprit dès que la Horde d’Or se décomposa, après la prise de Kazan par les Russes (1552).
La conquête de Kazan mit fin à l’État tatar ; elle permit également aux Russes de s’étendre sur les deux versants de l’Oural et bien au-delà, une région qui dépassa un million de kilomètres carrés et qui s’appela la Sibérie, un terme destiné ensuite à s’étendre jusqu’au Pacifique. La toute première poussée, sur le Kama, dans le nord, reprenait l’essor d’avant l’époque tatare ; mais le mouvement principal, en 1558, fut
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