Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
monarchie essaie de centraliser les activités coloniales, en les faisant dépendre du secrétariat d’État à la Marine, un trait qui marque la politique française puisqu’il dura jusqu’à la III e République. Le tournant se situe à l’époque de Colbert où plusieurs orientations sont assumées et mises en place.
Une tentation asiatique d’abord, plus riche de profits virtuels ; elle se traduit par toute une série d’échecs, et même de désastres, telle la perte d’une flotte de 9 navires armés de 2 500 hommes, dont les 500 survivants furent rapatriés par les Hollandais, une humiliation (1669). Pourtant, un premier résultat est atteint quand François Martin obtient la concession du futur Pondichéry (1674).
La deuxième orientation, inverse en un certain sens, est le maintien au Canada, moins pour le commerce que pour y perpétuer une colonie royale. Afin de consolider cette colonisation de type agricole, l’immigration de femmes est organisée à plus ou moins grande échelle. Les expéditions vers des terres nouvelles n’en continuent pas moins, animées par les « coureux de bois », le plus illustre étant Cavelier de La Salle, qui étendit la présence françaisejusqu’au Mississippi. Ainsi, commerciale à ses débuts, la présence française au Canada est devenue terrienne, catholique, aboutissant à la constitution d’une sorte de petit empire militaire. Mais cette Louisiane, qui sur une carte « coince » les colonies anglaises de l’intérieur, ne prend de l’importance qu’à l’époque de Law (1720). Enfin, troisième orientation, dans les Antilles, se développe un petit impérialisme purement colonial, que la traite des Noirs alimente à partir de 1680, et que sur place des colons vont animer, en coordination avec les ports français et la monarchie qui les aide et les contrôle, sous l’égide de Seigneley.
Au départ, il y a donc une « double faillite coloniale » de la France aux XV e et XVI e siècles… Au XV e siècle, parce que ses marins ne participent pas aux grandes découvertes ; au XVI e , parce qu’elle est absente aussi de la conquête des bases navales, des routes des grands profits qui s’effectuent en Asie ou en Amérique.
De fait, la masse territoriale française, avec sa forte monarchie et sa noblesse puissante, mais étrangère au commerce, constituait une sorte de pôle négatif à l’ouest de l’Europe. Les circuits actifs du commerce s’étaient déplacés et la contournaient : de Venise à Gênes et Barcelone par la mer ; de Lisbonne à Anvers et Amsterdam par l’Atlantique. Les grandes routes terrestres qui traversaient la France, par la Champagne notamment, entre les Pays-Bas et l’Italie, étaient désormais en sommeil. Toutes ces données s’additionnaient pour que l’expansion coloniale, en France, ne pût être que volontariste, émanant de la monarchie. Et celle-ci, peu soutenue par la société, ne fut active qu’avec ses propres moyens, et pour autant qu’elle luttait pour son existence contre l’hégémonie espagnole ; ou que, catholique, elle se heurtait aux Anglais protestants.
Et puis les Hollandais…
La France se vante d’être la fille aînée de l’Église. Les Hollandais revendiquent d’être les fils aînés de l’Océan. Et, de fait, de tous les peuples qui fondèrent des colonies, lesHollandais et les Zélandais furent, sans doute, ceux qui étaient le plus accouplés à la mer. Terre flottante sur l’eau, à demi inondé, ce pays a bien l’eau pour élément vital : « La République des Provinces-Unies étant sortie de la mer en a tiré sa force » (W. Temple, cité in F. Braudel, Le Temps du Monde , p. 157). La pêche au hareng, le sel puis la fumaison ; le Vlieboot , « La Flûte », ce navire aux flancs renflés, des marins rudes et d’une grande frugalité, des coûts imbattables sur les chantiers navals d’Amsterdam grâce à une technologie plus avancée que partout ailleurs — tels sont les fondements de la fortune d’une flotte qui assure bientôt à la Hollande le roulage des mers du monde. Elle doit peu à l’État, différence avec le Portugal et l’Espagne, mais les villes qui aident à sa constitution ne peuvent échapper à une action commune, car leurs intérêts les enchaînent les unes aux autres.
A l’origine de l’essor, fulgurant, de l’expansion hollandaise, il y a d’abord la ruine d’Anvers, lors de la crise de 1576-1609 et de la guerre des
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