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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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médecine française s’était crue et voulue civilisatrice, et ses succès étaient limités, mais ils l’étaient aussi pour les Européens. Son champ était réduit, et les indigènes continuaient à faire appel à leur toubib à peine moins efficace pour certaines maladies courantes, et dont la compétence dépassait la thérapeutique de la maladie puisqu’il « soignait » aussi les dépressions et autres perturbations consécutives à des conflits familiaux ou d’intérêt.
    Avec le triomphe des pastoriens, depuis l’extrême fin du XIX e  siècle, la médecine aux colonies connaît un vrai changement. Jusque-là, on croyait que les maladies contagieuses étaient dues à toutes sortes de données, hygiéniques et culturelles. Désormais, avec les découvertes bactériologiques de Koch, de Pasteur ou de Yersin, le combat s’effectue avec la Nature, avec elle seule, et la victoire attendue sera nécessairement une victoire pour la colonisation. Résoudre un problème médical rend dérisoire et facile, pour la suite, la solution d’un problème social — du moins le croit-on. Ces croyances expliquent en partie les rivalités entre les Institut Pasteur , les Lister Institutes et autres institutions scientifiques qui doublonnent les rivalités impérialistes.
    Le but de cette médecine-là est de protéger la société des acteurs invisibles que sont les microbes et les virus. Seuls des spécialistes peuvent lutter contre ces personnages, enfin identifiés. Et ce sont les maladies en tant que telles, bien isolées les unes des autres, qui constituent l’objet de la médecine dans l’hôpital ; celui-ci prend la relève de la cathédrale ou de la caserne comme symbole de la présence étrangère. C’est quand elle chassait la malaria ou la maladie du sommeil que la civilisation européenne fut la mieux acceptée.
Congo, sauvegarder le capital humain
    L’éradication de la maladie du sommeil au Congo fournit un bon exemple des interférences qui peuvent se nouer entre la colonisation, la santé des indigènes et l’effortentrepris pour soigner les malades et mettre fin à l’épidémie. Liée à la mouche tsé-tsé, la trypanosomiase apparut en 1898, dans le Niari, entre Brazzaville et l’océan, déclenchée par le passage répété des porteurs Loango. Elle se répandit au Gabon, remonta le fleuve Congo et, en 1901, atteignit une première extension mortelle autour du lac Victoria et en Ouganda. En cinq années (1900-1905), 250 000 Africains moururent dans le protectorat britannique. Simultanément le Congo belge était atteint, ou plutôt le Congo du roi Léopold (qui devenait une colonie en 1908). L’image du monarque se trouva atteinte par la révélation de ce désastre : car s’il existait un Institut Pasteur à Paris, une école de médecine tropicale à Londres et à Liverpool, un Institut für Schiffs und Tropenkrankheiten à Hambourg, rien n’avait été prévu par le propriétaire-monarque, qui fit appel aux Anglais et à John Todd, qui raconte : « Après que nous eûmes expliqué au roi comment nous rendrions la santé au Congo, il nous fit, Boyce, Ross et moi officiers de l’Ordre de Léopold II […]. Les journaux hostiles diront forcément que les fonds qui ont été alloués aux chercheurs de Liverpool sont une manière de corruption, le prix payé à notre Institut et à moi-même pour qu’on se taise sur les atrocités commises naguère au Congo et qu’on jette un voile pudique sur ce qui s’y passe » (cité in Maryinez Lyons).
    Les médecins anglais n’étaient pas les derniers à juger que l’installation de tout un système sanitaire au Congo avait pour but, également, de sauvegarder la valeur de ce capital précieux, les travailleurs, que menaçait la maladie. Elle se développa néanmoins jusqu’en 1930, son zénith, ce qui eut pour effet de rendre indispensable la médicalisation du pays tout entier.
    Ultérieurement, les Belges purent faire valoir que le Congo était le pays le mieux équipé de toutes les colonies africaines. Cette situation était bien le résultat d’un processus très ambigu, où les intentions et les résultats doivent être justement évalués et confrontés.
    On a dit qu’en Busoga (Ouganda) il y eut plus de 200 000 victimes entre 1900 et 1905, et que la mort causa des ravages comme la peste, jadis, en Occident. L’épidémieétait-elle africaine d’origine, antérieure à l’arrivée des Européens, ou se

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